Le choc, puis le silence régnèrent dans la pièce. Arthur s'était figé, telle une statue. Il me regardait fixement, les yeux écarquillés, la bouche entrouverte. Il n'en revenait. Dans son regard, je voyais qu'il pensait rêver. Néanmoins, je le soutins suffisamment longtemps pour qu'il comprenne que je ne rigolais pas. J'étais plus que sérieux. Enfin, au bout de plusieurs secondes de silence, la surprise passa et Arthur reprit la parole.
— Et où est-ce que tu iras ? me demanda-t-il. Je te rappelle que nous avons le bac dans une semaine.
Ses mots me firent l'effet d'un coup dans le ventre. J'avais l'impression qu'il ne voulait vraiment pas tout me dire et qu'en me posant cette question, il faisait déjà le choix de me laisser partir. Pourtant, si je lui demandais de faire ce choix, c'était bien pour qu'il me prouve à quel point il tenait à moi, qu'il me montre par A+B qu'il m'aimait sincèrement au point de me garder à ses côtés sans tenir compte du danger – qui, d'ailleurs je l'avouais, m'était complètement inconnu.
— Je pense avoir une idée mais je ne te le dirais pas, répondis-je. Car si je pars, c'est pour quitter tout ce que j'ai vécu ici, certainement pas pour garder un lien avec quoi que ce soit. Quant aux études, ce n'est pas si compliqué. Je vais passer le bac durant la session de remplacement en septembre, ma demande a déjà été acceptée. Il me suffit juste de changer le lieu de passage.
— Donc tu repartirais à zéro ? s'assura Arthur.
— C'est ça, confirmai-je.
Le silence se réinstalla. Seul Arthur le brisa en déglutissant un peu trop souvent à mon goût. Je pressais inconsciemment mes mains l'une contre l'autre tant j'étais impatient d'entendre sa réaction.
— Tu me laisses combien de temps ? Je dois vraiment y réfléchir, se justifia-t-il.
De nouveau, il me blessait à hésiter ainsi. Il pensait plus à ma soi-disant sécurité qu'à mes sentiments et cela fissurait mon cœur. Pourtant, je comprenais que tout ne dépendait pas de lui alors je réfléchis avant de lui donner ma réponse. L'important était de savoir combien de temps je tiendrais.
— Une semaine, lui dis-je.
— Quoi ? C'est trop peu ! s'écria-t-il.
— C'est bien assez pour moi, rétorquai-je. Je ne veux pas angoisser plus longtemps à me demander quel choix tu feras. Est-ce que tu préfèreras me laisser partir ou si, au contraire, tu penseras plus à mes sentiments et m'avoueras tout ? C'est déjà dur maintenant, je ne veux pas avoir à me poser cette question trop longtemps. Et puis, si j'attends trop, je serais en retard pour gérer toute la paperasse à propos du bac.
— Et si, au bout d'une semaine, tu n'as toujours pas la réponse ? me questionna Arthur.
— Je partirai quand même car j'estimerai que ton choix sera fait, répondis-je la mâchoire serrée.
Arthur se mordit la lèvre, l'hésitation parfaitement lisible sur son visage. Enfin, il se détacha du mur contre lequel il était adossé et sortit de la chambre sans un regard, feignant l'indifférence comme à son habitude, même s'il me sembla avoir vu ses mains trembler. Quant à moi, je restai sur mon lit à me retenir de pleurer pour de bon. Il hésitait et cela, ça me faisait mal.
Une fois qu'Arthur fut descendu, je vis, à travers la fenêtre, qu'il repartait chez lui avec son père à travers le petit chemin qui reliait nos deux foyers et descendis dans le salon où ma grand-mère m'attendait. Lorsqu'elle me vit, elle me sauta presque dessus.
— Alors ? me demanda-t-elle en hésitant.
Et là, je lui racontai tout. Au passage, je lui fis part de ma colère envers ses non-dits que je lui reprochais depuis mon réveil. Elle comprit mon point de vue mais refusa de m'en dire plus.
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Loup des bois et des rêves (M/M)
RomanceEthan Colas, un garçon brisé suite à la perte de ses parents et de son petit-frère et dans lequel la colère a choisi d'habiter, se retrouve contraint de suivre ses grands-parents dans le Jura. Près de la frontière suisse, il découvre une nouvelle vi...