Loup des bois et des rêves (M/M)

Chapitre 74 : Faire entendre raison

Dehors, la pluie tombait bruyamment. De la fenêtre, elle ressemblait à des milliers de stalactites s'échouant sur l'herbe verte avec une si grande force qu'un petit brouillard sinistre s'était installé. L'eau s'engouffrait par litre dans les plaques d'égouts et là où il n'y en avait pas, elle stagnait, troublée par l'arrivée de nouvelles gouttes. Après un tel soleil d'été, le ciel gris donnait l'impression que l'attention monde s'était détournée de ce coin du territoire. Un temps d'automne en plein été, voilà tout. Des jours que cela durait, ce spectacle hypnotique... Je tournai entre mes doigts ma tasse de café fumante, le regard perdu à travers la vitre sur laquelle l'eau creusait des sillons. Le contraste entre ma tasse chaude et l'extérieur qui semblait si froid me fit me recroqueviller dans les bras d'Arthur qui jouait distraitement mes cheveux. Des jours qu'une sensation de vide se rappelait à moi. L'excitation d'avoir potentiellement trouvé une issue au conflit était retombée aussi rapidement qu'elle était venue. Il nous fallait attendre l'intervention d'Isidore et cette attente était interminable.

— La meute veut organiser une rencontre avec la meute suisse pour lui demander de l'aide, me dit soudainement Arthur.

— Pour retrouver Mamily ? soufflai-je.

— Entre autres, éluda-t-il.

Parfois, il prenait l'envie au brun de me tenir au courant des dernières décisions de la meute alors que lui-même n'y avait plus mis les pieds depuis cette fameuse nuit où il avait été blessé. Il ne pouvait cependant pas briser le Lien qui l'unissait à la meute mais, de ce que Léandre m'avait dit un soir, il s'était mis sur silence radio. Arthur, de son côté, avait repris du poil de la bête et, même si les autres loups garous étaient inquiets, son père avait été heureux de le voir tout souriant et lui adressant un bonjour rayonnant, le soir après que nous ayons contacté les Archontias. Le regard que m'avait lancé Léandre avait été débordant de reconnaissance. Il se fichait que son fils revienne pour le moment au sein de la meute, il ne souhaitait que son rétablissement. Au fond de moi, j'étais persuadé qu'il se doutait que le sourire plein d'espoir d'Arthur cachait autre chose qu'un simple rétablissement mais il n'avait rien dit.

Dès lors, j'avais découvert un Léandre attentionné envers son fils, presque comme un papa poule, à la grande exaspération d'Arthur. Nous étions loin de la froideur de son regard qui m'avait glacé la première fois que nous nous étions rencontrés. Finalement, peut-être qu'il y avait de l'espoir du côté de l'alpha de Mouthe. Bien que je n'en eus pas parlé à Arthur, j'espérais que l'inquiétude du père pour la sécurité de son fils pouvait faire bouger les choses lorsque les Archontias interviendraient. Enfin, s'ils intervenaient un jour. Deux semaines étaient passées depuis, nous étions au beau milieu du mois d'août et l'avenir était plus incertain que jamais.

— Peut-être que je devrais y aller, proposa Arthur, pensif.

— Pourquoi ? Pas que je t'interdise d'y aller, c'est ton choix. Mais que leur diras-tu ?

— Rassure-toi, je ne leur dirais pas que nous avons contacté les Archontias. Les loups le prendraient mal. Seulement, ces Archontias mettent du temps à intervenir. Ça va faire plus de trois semaines que ta grand-mère est aux mains des Leuks et, même si ces deux dernières semaines ont été calmes, personne ne sait ce qu'ils veulent en faire. Même si nous sommes sûrs qu'elle est toujours vivante, personne n'a de nouvelles. On ne la sent presque plus dans le Lien, déplora le brun.

— Merci de m'apprendre ce que je sais déjà, bougonnai-je en me renfrognant.

Depuis l'enlèvement de Mamily, nous n'avions aucune nouvelle. Pas un seul message, ni... Rien. Je ne pouvais m'empêcher de penser au pire.