Mille coups d'Amour [TERMINÉ]

15.

Ce fut sous les prémices d'une nouvelle journée que je marchais au sein de la Zone, en compagnie de Julia, ma petite soeurette.

En lui jetant une oeillade, je remarquai qu'elle était devenue un peu pâlotte ces derniers jours, mais je n'avais aucune idée de la manière d'y remédier. Peut-être était-elle en train de tomber malade, cependant je soupçonnais plus le manque de nourriture et d'éléments vitaux.

Je l'avais accoutrée de la robe qu'elle avait portée le soir du grand repas de la Zone il y avait plus d'un mois de ça. Ainsi, elle n'allait pas être fagotée pour cette journée si spéciale : j'allai la faire entrer à l'école de la Zone, à l'instar de mon père qui l'avait fait pour moi. Et j'étais consciente qu'il aurait eu le même dessein la concernant.

On remet le temps en marche, papa.

À chaque seconde qui passait, ses neufs ans l'approchait. Et je voulais qu'elle ait un plus bel avenir que moi. Pour cela, il fallait impérativement qu'elle soit cultivée, qu'elle sache lire et écrire. Je l'avais déjà souvent imaginée traîner entre des bureaux, hurlant des ordres à ses employés et s'asseoir dans son fauteuil de luxe pour boire un café, comme ces personnes travaillant dans les hautes tours de la ville. 

J'espérais de toute mon âme que la vie lui accorde une telle chance. Pour ma part, ce filon m'avait échappé, et cela désormais pour l'éternité...

Je m'accroupissais devant elle alors qu'elle fronça les sourcils en voyant la cabane peinte en jaune poussin au front, à l'intérieur de laquelle beaucoup de gosses entraient. 

— Écoute Julia. Est-ce que tu as envie d'apprendre à lire et écrire pour avoir plein d'argent plus tard, une belle maison, une belle voiture,et des vêtements neufs ?

Elle haussa indifféremment les épaules.

— Oui. Mais je n'veux pas si c'est dur...

Je lui souriais tout en replaçant un cheveu rebelle derrière son oreille.

— Non, ce n'est pas dur d'apprendre surtout si tu en as l'envie, la rassurais-je. Je vais te laisser entre les mains d'une gentille dame qui va t'apprendre tout ça , d'accord? 

Ses yeux s'écarquillèrent soudainement.

— Ça veut dire que je vais aller à l'école ?

— Ouais ma belle !

— D'accord. J'espère que c'est facile sinon j'arrête.

— Ne t'inquiète pas. J'ai été à l'école aussi et regarde, j'ai réussi ! 

Elle s'éloigna légèrement de moi, en ne manquant pas de me lorgner d'un air saugrenu.

— Bah non, tu n'as pas bien appris...Pourquoi tu n'as pas de voiture, de beaux vêtements et pourquoi on n'a pas une belle maison aussi ?

Outch...Je ne pus m'empêcher de grimacer alors que je sentais mon cœur piqué d'une forte déception. Argh.

— Je...Oui tu as raison, je n'ai pas bien appris, je n'étais pas sage. C'est pour ça que je veux que tu apprennes très bien pour moi !

— Oui ! D'accord ! Pour Allyah ! Pour Allyah !, se mit-elle à répéter en serrant les poings.

Elle hocha la tête avant de me taper dans la main. Lorsque nous fûmes arrivées devant la cabane, ni une, ni deux, après m'avoir saluée rondement, elle courut jusqu'à l'intérieur.

Je restais plantée ici durant quelques instants alors que des enfants derrière moi m'hurlaient de dégager le passage. Ma petite sœur grandissait si vite, je m'en sentais toute retournée...Plongée dans mes pensées nostalgiques, je n'avais pas réagis sur le coup à cette paume sur mon épaule.