25.

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Le silence qui suivait un drame était sans aucun doute la plus épouvantable des mélodies qui pouvait exister.

Après l'horreur, le calme. Plus aucun bruit, le néant, pendant des secondes, de nombreuses instants qui ne cessaient de s'entasser.

La danse des anges après le chant du diable.

«  Boum boum...boum boum...boum boum... »

Sans mon cœur qui n'avait eût de cesse de tambouriner au sein de ma poitrine, je ne me serais pas pensée comme étant encore vivante. Seuls les sons de cet organe témoignaient du fait que subsister était possible même après que l'enfer eût balayé la terre. Mais peut-être que je me trouvais déjà dans ce que l'on appelait l'au delà. Je n'avais qu'à ouvrir les yeux...mais j'avais peur. Peur de voir devant moi tous les protagonistes de la religion que j'avais tant rejetée de mon vivant.

«  Boum boum...boum boum...boum boum... »

Cinq minutes, trente minutes, soixante minutes, des millions de minutes peut-être s'étaient écoulées. Je n'en avais aucune idée.

Ce que je savais simplement était que collée contre le fauteuil de ma grande sœur, je protégeais ma petite famille, le cœur éploré et les mains affolées.

«  Boum boum...boum boum...boum boum... »

Je n'arrivais plus à supporter cette lourde complainte qui valsait autour de nous. Le chant du drame, c'était traumatisant. Je désirais au moins que les oiseaux se remettent à piailler, eux qui avaient toujours été si bruyants, ou bien au moins qu'un klaxon huche, pour me rassurer. Mais tout était contre moi, car jamais rien ne se fit entendre.

Plus le temps passait, et plus je ressentais l'emprise des bras de Julia sur ma taille. Elle m'étouffait presque, mais cela m'était égal. Au contraire : je savourais. Je m'en délectais, parce que le contraste qui en ressortait était sacrément hallucinant. La froideur de ce mélodrame frappait ma peau alors que la chaleur du corps de ma sœur caressait mon cœur, et la flammèche givrée qui en ressortait eût le don de me réveiller peu à peu.

Alors, lorsque je fus à nouveau munie d'un tiers de ma force, je me décidais à ouvrir les yeux. À bas la peur. À bas mes frayeurs....Je n'étais pas prête, Ô grand non, mais je devais me forcer à l'être, car sans courage, je n'irais jamais loin. Vivre...c'était avoir l'audace d'être courageux.

Mes paupières se détachèrent doucement. Puis mes yeux se secouèrent plusieurs fois. 

D'abord, la première chose qui vint cogner mon regard fut la main de ma mère qui caressait d'un geste tendre la chevelure de Maria. Puis, en ajoutant une pincée de force, je réussis à relever la tête et pu distinguer quelques personnes de la Zone observer en halo autour d'elles.

«  Boum boum boum...boum boum boum...boum boum boum... »

L'épaisse fumée opaque était devenue le nouveau paysage, et la pente qui remontait à la Zone était gorgée de ce brouillard empoisonné.

Subitement, et au fur et à mesure que mes orbes défilaient, un flot de questions vint m'encercler comme le faisait cette fumée. Tant de quémandes, qui à mon plus grand regret sonnaient rhétoriques. Où étaient Rafaël et sa famille ? Lorenzo avait-il réussi à s'échapper à temps ? Ma cabane avait-elle été touchée ?

Je relâchais doucement ma sœur qui se força à faire de même quoique très prudemment. Il fallait que je remonte à la Zone.

— Je reviens ma belle, ne bouge surtout pas..., rassurais-je Julia dont les yeux exorbités me suppliaient de ne point m'en aller.

Mille coups d'Amour [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant