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Musique en média conseillée

Allyah
           

L'au-delà, à chaque seconde qui déambulait, devenait un peu plus clairet, témoignant du fait que le jour n'allait pas tarder à se lever. J'admirais les différentes rayures bleues coloriées au dessus de moi d'un regard qui peinait encore à rester ouvert.

Je n'avais dormi que durant l'espace de quelques heures dans cette ruelle, n'ayant nul part où aller et voulant reprendre mes esprits. Mais ceci n'avait pas été suffisant. Ma tête était toujours armée de cette migraine aussi atroce que mille coups de gong à la suite.

La langue pâteuse, les cheveux défrisés, les yeux défoncés et la peau délavée...il était vrai que je ne ressemblais plus à rien. Car même les chats errants avaient refusés de me tenir compagnie durant la dernière partie de la nuit, préférant fuir le monstre que j'incarnais.

Une seule expérience au sein de la rue m'aura été suffisante pour comprendre le mal des personnes y vivant quotidiennement. Cette nuit-là, par chance, le froid n'avait pas été rude, cependant, l'hiver qui arrivait n'allait guère épargner les sans-abris. Je me sentais profondément mal pour eux et m'étais rendue compte durant ma brève somnolence de toute la chance que j'avais de posséder un toit durant toutes ces années, même si l'isolation était très médiocre et que tout craquait.

Mais enfin...Aujourd'hui, idiote et fière comme j'étais, j'allais mettre fin à ma vie à la Zone. Je n'allais plus avoir de toit, certes, pourtant je savais que je pouvais bien me débrouiller parce que j'étais toujours munie de cette adrénaline qui me permettait de faire n'importe quoi n'importe quand et cela, même dans la réticence. Alors je n'avais pas à avoir peur. Cet au revoir allait bien se passer. Cette envolée allait bien se dérouler. Pourquoi avoir peur de me détacher de ma famille si c'était elle-même qui me poussait à le faire ?

Les premiers coqs commencèrent à chanter contre le zéphyr alors que j'attendais patiemment qu'il n'y ait plus de voitures pour traverser la route me séparant de la Zone.

Une fois arrivée, je remarquais avec étonnement que rien n'avait été nettoyé, si ce n'était les plats. La nappe, vide, était toujours sur le sol, les instruments de musique posés négligemment et presque toutes les bougies étaient renversées et condensées. M'avançant doucement au cœur de ce bazar, mon pied buta soudainement contre une petite pierre. Nul doute, celle-ci faisait partie d'une réalisation d'un des enfants hier soir.  Les femmes avaient toujours l'habitude de tout ranger à la Zone, même après n'importe quel événement, que s'était-il passé de si urgent pour que tout soit laissé ainsi ?

Cet étrange atmosphère eut de quoi me mettre la puce à l'oreille. Laissant tout ce bordel derrière moi, je m'avançais cette fois-ci à pas de loups devers ma cabane, bien déterminée à récupérer ce qui m'appartenait.

Ma mère et ma grande sœur dormaient encore à cette heure-ci, ne se réveillant toujours qu'une fois que les rayons du soleil transperçaient le rideau et les trous de notre chez-nous. Je n'avais pas envie de leur faire face une fois éveillées, je n'voulais pas leur reparler...je n'en aurai pas la force. Tout mon corps me le chuchotait.

Après avoir vérifié prudemment autour de moi, je soufflais un bon coup avant de décaler d'une main tremblante le bout de tissu sur le côté. Évidemment, au front, se tenait encore cette ambiance lourde et incommode créée cette nuit. Entre la chaleur des caresses et la foudre de la dispute, le mélange était encore fraîchement électrique.

Mes poumons se crispèrent alors que je me dirigeais sur la pointe des pieds jusqu'au fond de ma cabane, les yeux papillonnant de stress. Aucun bruit ne résonnait à l'entour. Ça me dérangeais et m'inquiétais fortement. Je ne pouvais pas prendre mes affaires sans émettre un seul son, ça n'allait pas être possible, j'allais forcément réveiller quelqu'un.

Mille coups d'Amour [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant