19 - PARTIE 1

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Quelques jours étaient passés depuis mon escapade au Corcovado et ma confrontation avec ma sœur Maria. Ces journées avaient été longues et emplies d'anxiété en raison de l'état de Julia, mais elle s'en remettait quelque peu. Quand bien même j'étais désormais presque à sec niveau sous, elle allait mieux et c'était tout ce qui comptait.

J'étais revenue à la Zone deux jours après ma fuite à l'entrepôt et avait appris dans le même temps que Rafaël s'était occupé de ma famille durant mon absence, ce qui avait mis à mal ma réputation auprès des femmes de la Zone. Mais j'avais laissée piailler ces péronnelles car de toute évidence, elles ne connaissaient pas la face cachée de l'iceberg.

Ma mère, alors que Maria et moi ne nous adressions aucunement la parole, se trouvait être à bout, ne sachant où donner de la tête entre les bisbilles de ses deux plus grandes filles et la santé de la petite dernière. Je ne savais pas ce qu'elle voyait derrière ses paupières closes à tout jamais...mais cela devait être bien effrayant.

Elle parlait seule, brandissait sa croix à chaque occasion - pour ne pas dire tout le temps - , faisait des cauchemars, ne pointait plus le bout de son nez dehors, enfin... tout ce qui possédait une capacité mortelle à me froisser le cœur. Je ne savais plus quoi faire pour lui venir en aide si ce n'était de laisser la place au temps, tous ces événements lui ayant rappelés sans aucun doute son mari. Et j'avais beau pouvoir être en capacité de faire pas mal de choses, faire revenir mon père était impossible et créer des odes de prosopopée serait mortellement cruel.

Maman était advenue à un point de déprime tel qu'elle espérait que le fantôme de mon géniteur débarque afin de revoir son visage dans le but de reprendre ne serait-ce qu'une étincelle de force. C'était ce que je l'avais entendue dire l'autre soir et...j'avais presque failli fondre en larmes.

Malgré tout cela, j'essayais de garder la tête haute. À vrai dire, je n'en avais pas le choix.

Je me trouvais actuellement dans le sud de Rio à me balader, sous un ciel des plus céruléen. Je n'en pouvais plus de rester à la Zone ; en fait, depuis que Julia était tombée malade, l'atmosphère y était devenue bien trop étouffante et asphyxiante.

Aujourd'hui , Lorenzo et moi n'avions pas prévu de nous voir : il m'avait déjà donné un cours hier.
Vraiment, la boxe apportait un pansement miracle à mon humeur. Lorsque je boxais et que j'étais en sa compagnie, mes tourments s'envolaient comme un grain de sable face aux bourrasques du désert. J'étais désormais trop attachée à l'entrepôt, à mes gants et m'étais vite épris des cours.

Tout ceci était si plaisant que je me surprenais parfois à remercier mon chien Coxinha car de toute évidence, sans lui, j'aurai encore été dans cette petite salle à l'observer derrière la vitre de la porte. Et surtout, j'aurai toujours été aussi boursouflée de solitude.

— Eh Rafaël mon pote ! Ça gaze ? La famille ? La Zone ?

J'étais venue à Esperança Negra, l'une des autres favelas de Rio qui se trouvait à un quart d'heure d'Ipanema, en compagnie de Rafaël. Ce dernier était venu voir ses amis qui étaient éparpillés un peu partout dans la ville comme des dominos. Comme je commençais à me lasser du tapage au centre-ville et car je n'avais également rien d'autre à faire, je m'étais portée positive à sa proposition de sortie.

J'observais mon ami mettre une main sur son cœur tout en souriant d'un air guilleret.

— Ça va. Tout roule. Qu'est-ce que tu fais de beau ? Toujours dans les affaires à ce que je vois...

Rafaël, pour illustrer son propos, désigna du menton le brassard noir que portait son ami. L'un des signes qui montraient une appartenance à un rang haut placé dans des cartels.

Mille coups d'Amour [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant