Chapitre 22 ✅

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Télio

J'étais à « mon » cours de français, tranquillement assis à la table au côté de Debbie, faisant de mon mieux pour comprendre ce qu'on attendait de moi. La prof avait donné à tout le monde, un peu plus tôt, un texte différent à chacun d'entre nous, apparemment bourrée de fautes. Ce qu'on devait faire, simple, parait-il, était d'en corriger le plus possible. Nous avions une demi-heure, il ne me restait plus que cinq minutes, et je n'avais toujours rien trouvé. Celui de Debbie, par contre, était empli de gribouillage.

— Je ne vois plus rien, murmura-t-elle enfin, secouant son crayon dans sa main. Et toi, tu...

Elle s'interrompit en apercevant ma feuille, vierge de modifications. Elle leva les yeux pour croiser les miens, à la fois amusée et ennuyée.

— Tu n'as rien trouvé ?

Je haussai les épaules ; c'était à peine si je savais lire. Alors, trouver des fautes...

— « Il courrais... » lie-t-elle en pointant la phrase. Ne me dis pas que tu ne vois pas ça.

— C'est « il marchais » ?

Debbie leva les yeux au ciel, poussant un long soupir théâtral.

— T'as de la chance que je t'aime.

— Faites passer les copies ! dit la prof au-devant de la salle. Et n'oubliez pas d'inscrire votre prénom.

Je m'exécutai aussitôt ; enfin une chose que je comprenais. J'attrapai mon crayon et notai « Télio », en haut à droite. Le rouge me monta aux joues devant ma gourde et je m'empressai de gribouiller et d'écrire, un peu plus bas : « mio ».

Debbie, penchée près de moi à regarder tout ce que je faisais, laissa échapper un petit rire.

— Alors, Télio, tu ne sais même plus comment écrire ton prénom ?

— J'avais la tête ailleurs, je réalisais pas ce que je faisais, dis-je nerveusement.

— Eh bien, si tu veux un peu d'aide, je peux te dire que tu as oublié les trémas.

— Les... trémas ?

— L'accent sur le O.

— Oh...

Je m'empressai d'ajouter le tréma, et Debbie leva les yeux au ciel.

— On fera avec, Miô.

Je souris fièrement, puis pris ma copie et celle de Debbie pour les passer à celui qui était à côté de moi, qui continua la chaine jusqu'au-devant de la classe. Aussitôt les travaux récupérés, la prof nous laissa libres pour une pause de dix minutes avant d'enchainer avec la mathématique. Je sortis de la salle pour profiter du moment et aller faire un petit pipi, mais je me rendis compte rapidement que Debbie me suivait.

— Où tu vas ? demanda-t-elle.

— Cet endroit mystérieux qui s'appelle « toilette ».

Et il y avait bien une part de mystère là-dedans, pour moi. La plomberie, c'était certainement ce qui allait me manquer le plus, ici.

— Je peux te poser une question ? dit Debbie.

— Bien sûr.

Je m'arrêtai de marcher pour me mettre droit devant elle, l'attrapant par les épaules, plongeant mon regard dans le sien. Debbie eut un petit sourire, mais retrouva rapidement son sérieux :

— Qui es-tu ?

J'étais pris de court.

— Qui je suis ? répétai-je dans un rire nerveux.

Miö (En Réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant