En à peine une heure, Télio se sentait déjà un peu mieux. Juste assez pour s'assoir dans la deuxième chaise et parler normalement, sans se mettre à grimacer chaque fois qu'il riait, car un rien pouvait le faire éclater de rire. Je restai tout de même avec lui, enfermé dans la petite pièce. Je préférai de loin être avec Télio que d'affronter le monde, pour le moment.
— Dès que je le peux, je pars, dit Télio en arrêtant enfin de pouffer après une blague que je n'avais même pas compris. Je me sens trop mal de laisser ma famille et mes amis derrière moi...
— Tu sais, techniquement, notre « famille » est ici, marmonnai-je.
— Parce que tu voudrais rester, toi ?
— Jamais de la vie !
— Bah, moi non plus. Tu vois, seul, c'est bien ; à deux, c'est mieux ; à vingt, c'est... un peu trop.
— Ils sont une dizaine, en fait. Il y a... Hadrien, Simmer, dis-je en comptant sur mes doigts. Seth, Arthur, Riley... d'autres qui ne se sont pas encore présentés, dis-je en levant quatre doigts en plus.
— Riley ? dit Télio en se redressant légèrement.
— Ouais... pauvre gosse. Je te raconterais plus tard.
Télio hocha vaguement la tête, s'adossant à nouveau sur sa chaise. Il baissa ensuite les yeux vers sa blessure, touchant doucement le bandage du bout des doigts.
— Ces salauds ont détruit ma combie, soupira-t-il.
— Il te reste encore la moitié du bas, c'est le plus important, dis-je en haussant les épaules.
— Au prochain stop à Digora, tu sais ce que je vais me prendre. Une nouvelle combinaison.
— Je croyais que tu voulais plus jamais y mettre les pieds.
— Les pieds, oui. Les serres, j'ai rien dit là-dessus.
J'étouffai un rire, pendant que Télio retirait son bandage pour voir à quoi ressemblait la blessure, en dessous. La peau s'était presque refermée, ne laissant qu'une grosse croute brune. Mais je le savais pour l'avoir expérimenté rien qu'assez souvent ; c'était la chaire, à l'intérieur, qui prenait un temps infini à se guérir.
Alors qu'un blanc de conversation s'installait, j'entendis la porte du magasin s'ouvrir. Télio et moi tournâmes la tête dans cette direction, jusqu'à ce que quelqu'un cogne doucement contre la porte de la salle.
— Entrez, dis-je en même temps que Télio.
Aëlle s'avança dans la pièce, portant une grosse pile de vêtements et deux paires de souliers. Elle mit le tout sur la table d'opération, faisant attention de ne pas le laisser sur une tache de sang de Télio, avant de se retourner vers moi.
— De la part de Seth. Je crois que vous faites à peu près sa taille.
— Merci, dis-je – encore une fois en même temps que Télio.
J'échangeai un regard avec Télio, et il me fit un grand sourire plein de fierté.
Aëlle profita du moment pour sortir de la salle en balançant ses longs cheveux au-dessus de son épaule. Nous gardâmes le silence quelques secondes en plus, avant que Télio s'exclame :
— Elle est mignonne. Je la veux dans mon lit !
Je soupirai, les yeux au ciel.
— Tu dois encore t'occuper de Samy en premier.
Je m'approchai des vêtements laissés par Aëlle. Deux teeshirts, deux jeans et deux paires de souliers, tout ce qu'il y a de plus simple – et de plus vieux. Ces vêtements dataient certainement d'avant la guerre, et même usé jusqu'à la corde avant ça. Télio se choisit un teeshirt, le sourire aux lèvres, le levant devant lui comme pour compter tous les trous qu'il y avait.
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Miö (En Réécriture)
Science FictionMiö est tout sauf normal, et il en a que trop conscience. Trouvé par hasard dans une grange abandonnée à l'âge de cinq ans et à moitié mort de faim, Miö fut le sujet de test et d'expérience jusqu'à ces quinze ans. Mais pour lui, c'était carrément de...