Aussitôt que Léo et Aël furent partis, nous avions levé le camp. Nous savions que, quand le monstre reviendra à la charge, il n'aurait pas besoin de chercher pour nous trouver. Comme il savait que nous étions dans la tour, il saura où nous serons ensuite, et il valait mieux être le plus loin possible de Digora à ce moment-là. Assez d'innocents étaient morts pour aujourd'hui, il était inutile d'augmenter les nombres.
- On s'arrête ici ? demanda Seth, qui portait Riley dans ses bras. Je suis épuisé.
Simmer hocha la tête. Je me laissai aussitôt tomber assis au sol, fermant les yeux pour passer l'étourdissement qui me prenait. Depuis que Léo était parti, je n'étais plus qu'une loque, bon à rien d'autre qu'à suivre les autres. Et pendant la longue marche que nous avions fait pour nous retrouver ici, au milieu du désert, j'avais réalisé une chose à propos de moi-même ; j'étais du genre masochisme. Je suppose qu'avec dix ans de ma vie à servir de cobaye, ce sont des choses qui arrivent.
Au départ, j'avais détesté Télio. Je ne l'aimai pas particulièrement, du fait qu'il avait eu une vie tranquille et bien posée, alors que les rôles auraient facilement pu être inversés, mais je m'étais mit à le détester vraiment quand j'avais réalisé qu'elle genre de personne il était, dans le fond. Et ensuite... à quel moment je me suis mis à le supporter ? Et, petit à petit, à l'aimer comme un frère ? Je n'en avais aucune idée. Mais c'était ça, dans le fond ; Télio – peut-être indirectement – me faisait souffrir, son arrivée avait transformé ma vie en enfer. Et puis - qu'est-ce qui ne tournait par rond chez moi ? Je n'en avais aucune idée -, j'aimais ça. J'aimais que ma vie soit devenue à ce point compliquée, que chaque jour, je me réveille en me demandant « et maintenant, que va-t-il encore m'arriver ? »
Mais maintenant, Télio est mort. Je m'étais automatiquement tourné vers un autre clone, peut-être dans le but de le remplacer ? J'avais frappé Léo deux fois au visage pour ce qu'il avait fait, pourtant, je ne lui en voulais pas totalement. Je savais que, à cause de la puce, il n'avait su contrôler ce qu'il faisait. Moi-même, j'étais passé à deux doigts de tuer Seth. En fait, j'avais frappé Léo – j'avais même essayé de le tuer avec un oreiller, comment l'oublier ? – dans le seul but que lui se mette à me détester, et qu'il m'attaque. Étrangement, j'en avais besoin. J'avais besoin d'un Télio.
Une main sur mon épaule me sortit brutalement de mes pensées. J'ouvris les yeux pour croiser ceux de Simmer, penché devant moi.
- Hé, tu vas bien, Miö ? T'es vraiment pâle.
- Oui... dis-je lentement en évitant son regard. J'ai hâte que la journée se termine. Elle a été tellement longue...
Simmer répondit d'un petit sourire bienveillant avant de s'assoir à côté de moi, sans plus insister. Les autres clones – le peu qui en restait – s'assirent à nous côté pour compléter le cercle. Seth réveilla Riley qui s'était endormi dans ses bras et s'allongea à côté de lui, la tête sur ses genoux.
- J'ai pas fait un seul pas avec vous, mais je suis épuisé, dit-il, les yeux levés vers le ciel qui commençait à se faire de plus en plus sombre. En revanche, j'ai l'étrange impression que j'aurais dû l'être encore plus. Je crois que je suis en train de guérir.
- Tu parles d'un temps, on va tous mourir, dit Hadrien.
Riley se releva sur un coude pour lui lancer un regard noir.
- Merci, tu m'aides beaucoup.
Albert, assis à côté d'Hadrien, lui fourra une claque derrière la tête. Hadrien n'ajouta rien, semblant enfin se rendre compte du moral que nous avions tous. Moi particulièrement ; je savais qu'Hadrien avait raison. Pour sur, un bon nombre d'entre nous allait en pâtir. C'était quoi, l'idée d'éloigner Aël ? Même s'il avait eu peur la dernière fois, sont venin nous serait d'un très grand atout pour venir à bout du monstre. Hadrien en avait aussi, mais à deux, ç'aurait été mieux. Hadrien était plus du genre pessimiste, il aurait trop peur d'affronter le monstre par lui-même.
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Miö (En Réécriture)
Science FictionMiö est tout sauf normal, et il en a que trop conscience. Trouvé par hasard dans une grange abandonnée à l'âge de cinq ans et à moitié mort de faim, Miö fut le sujet de test et d'expérience jusqu'à ces quinze ans. Mais pour lui, c'était carrément de...