L'art de la réussite est celui des réconciliations.

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L'art de la réussite est celui des réconciliations.
Jacques Deval.


Marcher, avancer, fouler la terre sans craindre de ce qui peut surgir de toute part. Juste avancer jusqu'à son but. Mon loup a l'impression que ça fait des siècles qu'il ne l'a pas fait, je ne peux pas lui donner tort. On a levé le camp dès les premières lueurs du jour. Tous dans notre peau de loup avec nos sacs dans la gueule.

Juste avant que Foôl, le loup de Trois Pattes, ne prenne la tête sous mon ordre, on lève tous la tête vers le nouveau soleil pour chanter. On chante à la face du monde que nous sommes de retour, que rien ni personne ne se mettra sur notre chemin.

Nos voix entremêlées résonnent dans toute la forêt, on sait aussi que le vent porte notre chant de liberté partout dans le monde. Bientôt, ils sauront tous qu'on est de retour, que les loups sont bel et bien vivants.

Je regarde le chemin que Mère Nature nous dit de prendre à travers les yeux de mon loup, on a pas énormément parlé depuis notre bain mystique. On sait juste que tout va bien, qu'on va bien mieux et au final c'est tout ce qui compte.

De temps en temps, notre Omega soulève sa lourde tête pour hurler. Il indique aux autres loups, on espère qu'il y en a, ou nous sommes et que nous ne voulons bouffer personnes.

Personnes qui abritent un loup on est bien d'accord.

— Profite du voyage.
— Ouais... pour une fois que c'est moi qui fais le caniche de voyage.

Je me marre pendant qu'il grogne en découvrant ses dents.

— T'as pas aimé la comparaison ? Je lui demande avec mon air de ne pas y toucher. Forcement je me fais un peu plus insulter pendant que je me marre comme un tordu.

Je me redresse sur mes coudes quand je vois mon antre changer, pourtant aucun danger ne m'a alerté. Le salon de mon enfance disparaît lentement pour laisser apparaître la forêt qui vient de nous accueillir. Je fronce les sourcils. Tout est pareil, la terre brune et douce, les arbres aux feuilles rousses et vertes, le calme et la fraîcheur. La lune et le soleil se partagent aussi le ciel qui se fonce lentement.

— T'as d'la chance qu'on soit zen sinon tu te serais pris mon poing dans la tronche en guise de bonjour.
— Bonjour Baby Alpha.

Je me laisse retomber sur mon dos sans en rajouter plus, j'utilise mes bras en guise de coussin. Je le sens venir a coté de moi, il s'assoit et passe ses bras autour de ses genoux.

— J'avais pas le droit de t'en dire plus...
— Pour elle ou pour notre remarque du plantage divin !? Je lui demande du tac au tac sans le regarder, oui je lui en veux. Je lui en veux parce qu'on a manqué d'y passer, parce qu'on a été séparé, parce qu'on a souffert comme jamais et qu'on était putain de seul !
— J'suis désolé... Je ne le vois pas, mais j'entends qu'il serre les dents.

Je suis incapable d'en rajouter. Incapable de lui dire que je ne lui en veux pas parce que c'est complètement faux.

J'en veux à la terre entière, j'en veux à ces cons d'humains !

Je ferme les yeux et serre a mon tour les dents, Myst nous ressent, il s'accapare ma colère pour la réduire a néant. La fraîcheur d'hier soir pointe de nouveau son nez, elle apaise ma douleur en la couvrant avec douceur. Elle fait naître la lumière dans mes ténèbres qui vivent en nous depuis bien trop longtemps.

On ressemble tellement à Nautoo en cet instant. Bien trop, j'ai l'impression qu'à cause de ça mon père n'existe plus. Que je le tue une fois de plus. Je bloque ma respiration une bonne seconde avant de respirer de nouveau.

La rage du loupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant