Quelle horreur, je n'avais jamais rien vu de tel ! Tout ce sang, les corps sans vie étalés au sol, les charognards qu'il avait fallu chasser de l'endroit, et puis cette odeur !... Le plus dur avait été d'abord de ne pas vomir, puis de ne pas pleurer.
Le groupe de la pharmacie s'était fait massacrer, il n'y avait aucun survivant. Une attaque aussi brutale que soudaine, on ne leur avait laissé aucune chance. La peur se lisait encore sur les visages figés des jeunes victimes qui avaient perdu la vie avant même de comprendre ce qui leur arrivaient.
Olivier 16 ans, Inès 15 ans, Nathan 14 ans, Théodore 14 ans, Elise 13 ans et Michael, 11 ans et demi. Tous volontaires pour l'expédition, j'avais pu discuter avec chacun d'entre eux au moins une fois. Pas assez longtemps pour les connaître certes, mais assez pour comprendre qu'ils étaient courageux, et qu'ils auraient trouvé leur place dans ce nouveau monde. Puissiez-vous désormais la trouver ailleurs que sur cette terre, car je doute qu'il y ait d'autres mondes plus cruels que celui-ci.
Le massacre s'était déroulé à l'intérieur de la pharmacie, et il y avait eu plusieurs assaillants. L'un d'eux bloquait l'unique sortie pendant que les autres écrasaient les adolescents et les enfants qui ne pouvaient que se replier vers le fond du magasin, sans aucune issue possible. Ce n'était pas l'oeuvre d'autres humains, car les médicaments étaient toujours dans les sacs des anciens membres de l'expédition. Cette boucherie n'avait pour raison que le pur sadisme de créatures agressives et sanguinaires, ce qui correspondait parfaitement à un profil ayant vu le jour juste après la tempête : Les pustuleux. La rencontre tant redoutée avec eux avait finalement eu lieu, mais elle avait été bien pire encore que ce que j'avais pu imaginer.
Alors que le périmètre avait été sécurisé pour ne pas s'exposer à une nouvelle attaque, nous devions faire face à de nouveaux problèmes qu'il allait falloir résoudre. Que faire des corps ?! Les enterrer ? Qui pourrait rassembler les morceaux du corps de chacun, déchiquetés, en pleine décomposition et éparpillés aux quatre coins du magasin ? Et aussi, comment l'annoncer aux autres ? Aux plus jeunes et à ceux qui les avaient mieux connus ? Olivier était arrivé au collège le deuxième jour avec sa copine, et elle avait prié avant notre départ pour qu'on le lui ramène en pleine forme. J'avais toujours pris la parole jusque-là, il était évident que c'était moi qui devrais m'en charger, et Lucas l'avait compris car il était venu me voir pour me dire « Je peux m'en charger si tu ne t'en sens pas capable ». Mais il en était hors de question. C'est moi qui avais planifié cette expédition, moi qui les avais envoyés là dehors avec à peine de quoi se défendre. J'avais été imprudent, et ce sont les autres qui ont payé mes erreurs. Il était donc à moi d'en assumer la responsabilité jusqu'au bout, et donc d'en informer les nôtres une fois rentré.
Mais alors que je faisais face aux cadavres de mes compagnons, il y avait un sentiment en moi qui dominait tous les autres. Un besoin que je n'eusse que très rarement connu jusqu'à maintenant, mais qui pourtant, brûlait à présent au plus profond de mon être d'une telle intensité qu'il m'en faisait tourner la tête. C'était plus qu'un simple besoin, c'était devenu une nécessité. Et ce désir, c'était celui de la vengeance. De quel droit ces stupides créatures avaient elles osé ôter la vie de mes compagnons de la sorte ? La loi du plus fort ? Très bien, je veux bien concevoir que le monde puisse à présent fonctionner de cette manière, mais alors dans ce cas, nous allons être plusieurs à jouer.
Il était maintenant temps de prouver qui pouvait réellement être considéré comme étant "le plus fort", et pour cela, j'allais m'en donner à cœur joie.
Finalement, il avait été convenu de brûler la pharmacie après y avoir récupéré tout ce qui s'y trouvait, et de partir avant que le feu attire l'attention.
Malgré cet événement, nous devions tout de même poursuivre notre trajet jusqu'au château du maire de la ville, voir si les français s'y trouvaient bel et bien. Et je ne m'étais pas trompé ! Ils nous reçurent et un dialogue pu s'instaurer sans trop de complications. Même s'ils manquaient d'organisation et étaient moins nombreux, le fonctionnement était le même chez eux que chez nous. Ils avaient désigné un "chef" parmi les plus âgés, et t'entaient tant bien que mal de s'adapter à ce nouveau monde. Au final, des ambassadeurs allaient être désignés, leurs rôles étant de gérer les échanges et les communications entre nos 2 camps. Les rues étant trop dangereuses, des allées et venues étaient inenvisageables.
Une fois de retour au collège, je fis rassembler tout le monde pour annoncer la triste nouvelle. Je ne retenais pas mes mots, pas pour effrayer mon auditoire, mais pour lui faire prendre conscience du danger constant qui pesait sur nous désormais. Chacun eut ensuite l'occasion de prendre la parole pour partager quelques mots au sujet des victimes en ce jour sombre, et c'est là que les pleurs devinrent impossibles à retenir. Seulement, je m'étais piégé tout seul. J'avais transmis dans mon annonce l'idée de tenir bon, garder la tête haute et continuer de se battre pour donner un sens au sacrifice de nos amis. Et de ce fait, je ne pouvais me permettre de fondre en larmes la seconde d'après, alors même que j'en avais plus que jamais besoin...Pourtant, en regardant autour de moi je vis que Lucas non plus ne pleurait pas. Il tenait ses petites sœurs dans ses bras, lui aussi ne pouvait pas se le permettre. Il était dans la même situation que moi, et là, en le voyant, se retenir devint beaucoup plus évident. Si Lucas ne pleurait pas, alors je ne pleurerais pas non plus.
La nuit est tombée, alors que je fais mes derniers préparatifs pour partir. Quelques vivres, de quoi s'éclairer, se repérer, et évidemment, ma lance, plus aiguisée que jamais. L'idée de quelconques représailles avait été immédiatement réfutée, et de toute façon je ne peux impliquer une autre personne dans cette folie. Pourtant ma décision est prise : ce soir, je sors du collège en toute discrétion, je retrouve ces pustuleux, et je leur fais payer leurs abominations.
Ce soir, je venge mes amis.
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Autre Monde - Journal d'un long marcheur
FanfictionLa grande tempête a frappé. D'étranges éclairs bleus ont emporté les adultes, ainsi que toutes traces de technologies. Les enfants, désormais seuls dans ce monde où la nature semble avoir repris ses droits, doivent s'organiser pour survivre. Mais po...