18 septembre - L'affrontement

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Un déluge s'était abattu sur la forteresse, fouettant les drapeaux cyniques sur les murailles, balayant les chevelures des pans, qui n'osaient agir face à cette prise d'otage inattendue. Olie, tenant Henry sous le joug de sa dague, se savait à l'abri du danger.

– Très bien, je te suis, répliqua-t-il. Mais je garde ton frère près de moi le temps du trajet, par pure précaution.

Lucas indiqua d'un hochement de tête à ses camarades qu'il maîtrisait la situation, et ces derniers, ne pouvant plus que lui faire confiance, réorientèrent leurs arcs en direction des cyniques en contrebas.

Plus que jamais sur ses gardes, Olie suivit Lucas jusqu'à une poterne, donnant sur le fleuve traversant le fort. D'ordinaire infranchissable, la surface de l'eau était gelée en un point précis, faisant office de passerelle, et permettant aux plus téméraires d'atteindre l'autre rive.

– L'apparition de cette glace est due à l'altération de plusieurs pans, expliqua Lucas. De là, nous allons pouvoir nous éloigner du champ de bataille.

– À toi l'honneur.

Lucas aventura un pied sur le sol, le jugea stable, et s'y risqua entièrement. Par chance, aucun assaillant ne les vit se dérober du bastion, et les deux rivaux purent gagner l'orée de la forêt sans encombre. Ils continuèrent leur escapade quelques mètres de plus, avant qu'Olie ne s'arrête en plein cœur d'une clairière, suffisamment dégagée de tout obstacle susceptible d'entraver les mouvements amples que requérait le maniement de sa lance.

– Ici c'est parfait.

Focalisé uniquement sur ce combat tant attendu, Olie relâcha Henry pour saisir l'arme sanglée à son dos. Enfin libéré d'une frayeur bien trop importante pour un enfant de cet âge, Henry se précipita dans les bras de son grand frère, qui le rassura aussitôt de paroles chaleureuses, et d'une accolade poignante.

– C'est fini mon grand, tout est fini, tu es en sûreté maintenant.

– Pourquoi... Pourquoi Elio fait-il ça... ? Sanglota Henry.

– Justement, Elio n'aurait jamais fait ça. Monte dans l'un des arbres autour de nous et attends que je t'indique de redescendre, j'ai quelque chose à régler.

Henry s'exécuta. Désormais, plus rien ne se dressait entre Olie et Lucas. La pluie ruisselant sur leurs visages fermés, ils se tenaient face à face, l'un gardant tout son calme, parfaitement maître de ses émotions malgré un mépris des plus accentué envers son adversaire, qui lui, jubilait d'excitation à l'idée de ce qui se préparait. Le self-control et la hargne semi-bestiale, tout les opposait, mais ce qui était sûr, c'est que l'un comme l'autre, ils étaient déterminés à en finir une bonne fois pour toute.

– N'as-tu pas pris d'arme ? S'étonna Olie.

– Je n'en aurais pas besoin.

Lucas ouvrit les paumes de ses mains, et les plaça à hauteur de visage, signe d'une garde des plus atypique.

– C'est à se demander qui est le plus fou d'entre nous ! Ricana Olie.

Ne pouvant plus attendre de croiser le fer, il s'élança à vive allure, tenant fermement sa lance aiguisée devant lui. La courte distance les séparant fut anéantie en un éclair, et Olie, ne maintenant plus qu'une faible distance de sécurité, fit tournoyer sa lame autour de lui. Son tranchant n'était plus à remettre en cause ; un seul coup et c'était la mort assurée. Luca recula progressivement, et esquiva chaque assaut par des mouvements audacieux. De loin, l'échange s'apparentait à une danse tant les enchaînements étaient adroits. Entre chaque feinte, Lucas pouvait sentir la froideur de l'acier lui caresser le visage, mais il ne faiblissait pas pour autant. Olie enrageait de ne pas réussir à l'empaler ; qu'importe d'où provenait l'attaque, son adversaire restait insaisissable.

Autre Monde - Journal d'un long marcheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant