26 Juillet - Sauvetage in extremis

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Quelle joie le fait de chevaucher de nouveau pouvait me procurer ! Je n'avais ni pris le temps de me changer, ou bien encore de me laver. Le torse presque à nu après que mes vêtements aient été déchirés en lambeaux, et le visage recouvert du sang séché de mon ami, je n'étais pas des plus présentable. Il n'y aurait rien d'étonnant à ce que Lou prenne peur en me découvrant dans cet état, mais l'essentiel était de la retrouver, qu'importe l'accoutrement.

Le cheval de Syrius faisait des merveilles, et fusait à travers les longues étendues d'herbes à la lisière de la forêt aveugle. Ce n'était bientôt plus qu'une question de minutes avant que je n'atteigne la ferme, et alors que je guettais ardemment l'approche de ma destination tant convoitée, une épaisse fumée noire provenant directement du site panesque s'éleva par-delà les plaines.

– Non... Me chuchotai-je à moi-même, comme pour me rassurer dans mon propre dénis.

Arrivai-je trop tard ? Les appels à l'aide s'étaient donc révélés sincères comme j'avais pu le craindre ? Mes doutes se confirmèrent lorsque les lieux m'apparurent, ravagés par les flammes. Comme si un ouragan l'avait traversé de toute part, la ferme ou séjournait Lou il y a tout juste une semaine, n'était plus qu'une ruine chaotique. Je descendis de mon cheval, et me ruai à l'intérieur du bâtiment principal qui, consumé par le feu, n'allait bientôt ne plus être qu'un tas de cendre.

– Lou ? LOU ? EST CE QU'IL Y A QUELQU'UN ?!

De toute évidence, si une personne se trouvait réellement en plein cœur de ce brasier, son sort était déjà scellé. Rien ne servait de risquer bêtement ma vie à mon tour en m'y aventurant. Je devais me raviser, et espérer que les habitants en question aient pu fuir ce carnage à temps.

Passé ce bref instant d'effervescence, je me devais d'analyser la scène, pour agir en conséquence. Sur mes gardes, je me mis à inspecter méticuleusement les environs, en quête d'éventuels indices, pouvant révéler une quelconque information sur ce qui avait bien pu se produire. S'il y avait une chose dont j'étais certain, c'était que le feu n'était pas accidentel, il avait été déclaré volontairement et ce, par pur acte de barbarie. Du sang encore chaud était également répandu sur le sol à divers endroits, signe qu'une bataille avait dû faire rage à l'endroit où je me tenais. Ce raisonnement semblait plausible, pourtant un détail important subsistait : Où étaient les cadavres ? Du sang, des bâtiments ravagés, mais pourtant, aucun corps calciné étendu à terre. Le mystère s'éclaircit dès lors que de multiples traces de roues encrées dans la terre boueuse m'apparurent. Tout m'amenait à penser que les cyniques y étaient pour quelque chose, et qu'ils avaient fait prisonniers les pans qu'ils avaient affronter.

Si cette hypothèse s'avérait véridique, je n'avais plus de temps à perdre. Le feu encore présent était la preuve que le conflit avait éclaté il y a quelques heures tout au plus, et si je partais à leurs trousses dès à présent, il ne m'était pas impossible de les atteindre à temps.

M'équipant simplement d'une machette entreposée dans la réserve, je regagnai mon cheval aussi vite que j'en étais descendu, et ma course reprit de plus belle. La traque n'était pas ma spécialité, mais les traces laissées par le roulement des lourdes cages chargés de nombreux pans ne passaient pas inaperçues. Je poussais mon cheval à atteindre ses limites, sans aucune forme de retenue. Ce sprint s'éternisa jusqu'à ce que ma piste, qui ne faisait que longer la forêt aveugle, s'engouffra en elle par le biais d'un passage qui la coupait littéralement en deux ; Il existait donc un moyen de traverser cette jungle impénétrable, et c'était cette ouverture que les cyniques utilisaient pour rejoindre leur empire. Je ne m'étais encore jamais aventuré aussi loin au sud, mais ce n'était pas le moment de reculer, car secourir Lou et les autres en plein territoire cynique relevait d'une toute autre paire de manches. Je me devais d'agir vite. M'engouffrant à mon tour dans cette route naturelle, je longeai une rivière semblant suivre le même chemin que moi. Comme partout ailleurs, cet endroit n'était pas sûr, et les abords de la forêt étaient idéaux pour tenir un guet-apens. La nuit n'allant plus tarder à tomber, il était évident qu'ils devaient eux aussi presser le pas, non désireux de s'éterniser en un tel endroit. Mon cheval, qui galopait depuis plusieurs heures maintenant, commençait à faiblir, mais je ne le ménageai pas pour autant ; cette course, j'étais prêt à la terminer en courant s'il le fallait. Puis, tout cet acharnement paya à l'instant même où un convoi se dessina devant moi. Privilégiant la sûreté, ils avançaient doucement mais en formation serrée, leurs armes à l'affût du moindre danger. Entraîné par la vitesse à laquelle j'allais, je me rapprochais dangereusement d'eux, et bien vite, je fus en mesure d'analyser la situation.

Autre Monde - Journal d'un long marcheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant