18 Juin - Dans la gueule du loup (partie 1)

52 9 2
                                    

La tension présente dans la pharmacie était à son paroxysme. Cela allait bientôt faire deux heures que nous patientions, accroupis dans l'ombre des étagères qui encombraient cette pièce. Pourtant, malgré cette attente interminable, aucun de nous deux n'avait relâché ne serait-ce qu'une seule seconde son attention.

Positionné juste à côté de la porte, je me tenais prêt à la bloquer, dès que notre invité se serait aventuré dans la salle. Lucas lui, plus en retrait, avait pour seul but de sauter sur le traître, au moment même où il se retournerait vers moi. Il avait également avec lui une paire de menottes, provenant de notre armurerie. Notre piège, reposait également en grande partie sur l'effet de surprise, que nous conférait la salle, entièrement plongée dans le noir. Bien que notre objectif était avant tout de neutraliser l'individu, j'avais pris le soin d'emporter ma lance, par simple précaution. Notre plan se devait de fonctionner. Voilà ce que je me répétais en boucle depuis que nous nous avions mis en place cette embuscade. J'aurais dû faire le vide dans ma tête, et me focaliser uniquement sur l'instant présent, comme devait sûrement le faire Lucas. Pourtant, je ne parvenais pas à m'empêcher de songer à toutes les failles, toutes les parts d'ombres que ce stratagème pouvait avoir. Mais alors que je me mettais inlassablement à tergiverser, un bruit sourd me sortit de mes pensées. Mon regard se tourna vers la serrure de la porte d'entrée. Celle-ci était en train d'être crochetée depuis l'extérieur. Quelqu'un s'apprêtait à entrer. C'était maintenant.

Mon souffle se coupa. Je cherchai à trouver Lucas du regard, en vain. L'obscurité était trop grande pour que je parvienne à le distinguer, alors je me devais de lui faire confiance, pour me concentrer pleinement sur ma propre mission. Après léger claquement métallique, le bruit s'arrêta quelques instants, et la poignée s'actionna vers le bas. La personne cherchant à rentrer, s'appliquait à faire le moins de bruit possible. Désireux de savoir de qui il s'agissait, je sortis légèrement ma tête de ma cachette, mais lorsque la porte s'entrouvrit, elle fut accompagnée d'un léger trait de lumière, provenant de l'extérieur. Mon premier réflexe fût de me replacer accroupi derrière l'une des étagères de soins médicaux, pour ne pas me faire repérer. Mais dans ma précipitation, j'avais légèrement bousculé une trousse de secours, ce qui produisit un léger chahut. Le mouvement de la porte s'interrompit aussitôt. Je me mis aussitôt les mains sur la bouche, tout en fermant les yeux, afin d'étouffer tout bruit sourd qui pouvait émaner de ma personne. Il ne me restait plus qu'à prier. Si j'avais aussi stupidement fait échouer notre mission, je ne pourrais me le pardonner. Mais finalement, comme un bruit de délivrance, j'entendis la porte continuer son ouverture, avant de se refermer tout aussi silencieusement. Le traître, était désormais dans la pièce, ou plutôt, dans notre filet.

Le soulagement fût énorme, même si la partie n'était pas encore gagnée pour autant. Le plus dur restait à venir, à savoir, appréhender le suspect. Il se mit rapidement à examiner les différentes étagères de la pharmacie, en quête des soins qu'il recherchait. Mais ne parvenant pas à différencier les multiples produits qu'il avait à disposition, il se mit à ouvrir son sac, et en sortit un bocal bien particulier. Dans ce récipient, se trouvait les scararmées que Sam avait récupéré sur la route menant à Princeton. Leurs abdomens si particuliers, dégageant de vives lumières rouges et bleues, illuminèrent la pièce quasiment instantanément. Par chance, il se concentrait trop sur l'origine de sa venue ici pour songer à observer minutieusement les alentours. Mais, maintenant qu'une lumière tapissait ces lieux, il m'était tout à fait possible d'identifier clairement son visage. Il était donc temps de passer à l'action. Au travers des différents rayons qui me séparaient de lui, je parvins tant bien que mal, à discerner les traits révélant l'identité de notre invité mystère. Je ne mis pas longtemps à reconnaître de qui il s'agissait, et maintenant que la réponse se trouvait juste sous mes yeux, la tension qui était présente en moi depuis le début de notre piège, s'estompa enfin, laissant une nouvelle fois place à ma colère initiale.

Autre Monde - Journal d'un long marcheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant