Un voile éthéré recouvrait l'horizon infini. Loin de tout, j'étais comme égaré dans un semblant de paradis. La sérénité qui emplissait ces lieux, me rendait impavide, en totale harmonie. Même son silence, sonnait à l'oreille comme eurythmique. Ce doux repos, je l'avais ardemment convoité, mais maintenant qu'il s'offrait à moi, quelques hésitations revenaient m'importuner. Où avais-je atterri ? Qu'était-il advenu de la guerre, et du sort de mes amis ? Trop de questions restaient sans réponse, je ne pouvais me laisser charmer par cette béatitude ; il me fallait comprendre.
À mes pieds, un tapis scintillant était déroulé, m'indiquant de sa longueur, le chemin qu'il me fallait prendre. Son extrémité se perdait dans une brume opaline, dont je n'avais d'autres choix que de la traverser.
Difficile d'évaluer combien de temps je passai à avancer de la sorte, tant j'étais bercé par la félicité que conférait cette atmosphère à mon âme. L'unique ressenti externe à mon bien-être, fut une sensation très faible d'ascension. Un vertige, signe que je m'éloignais progressivement du bas-monde, pour m'élever vers le lointain.
Un doute m'assaillit. Et s'il s'agissait là d'un allé-simple ?
Une bousculade interrompit mon élan de lucidité. En pleine course, un enfant d'une dizaine d'années, venait de me dépasser nonchalamment.
- Hey ! Osais-je l'interpeller, avant qu'il disparaisse au loin.
Le garçon se stoppa, et se retourna dans ma direction. Ses mèches blondes, et son visage capricieux ne m'étaient pas inconnus. Il me fallut un temps avant que la mémoire me revienne, et que je déclare, avec stupéfaction.
- Tim.. ?!
- Salut, chef ! Proclama-t-il, tout sourire.
Aucun doute, devant moi se tenait l'enfant sauvagement abattu par des cyniques, quelques mois après notre installation au collège.
- Comment, comment est-ce possible ? Balbutiais-je, désorienté.
- Tu en as mis du temps !
- C'est clair, on a bien cru que tu ne viendrais jamais !
De dernière moi, deux nouvelles voix, plus graves que celle du petit Tim, m'interpelèrent à leur tour. Je faillis perdre l'équilibre en reconnaissant Sam et Aaron. Les deux adolescents, rigolèrent innocemment de leur effet de surprise. Ici, tout semblait dépourvu d'importance, et pris avec une légèreté ingénue. C'était un cadre tellement irréel, que je me retrouvais déphasé, sans plus aucun repaire.
La joie de revoir ces deux gaillards restait néanmoins si intense, que sans me poser de questions, je me jetai dans leurs bras.
- Doucement, ce n'est pas parce qu'on est mort, que tu ne peux pas nous étouffer ! Plaisanta Sam.
Sa remarque mit fin à l'enlacement. Sans s'en rendre compte, il venait de confirmer mes doutes.
- Alors vous l'êtes bel et bien ? Mais si je suis ici avec vous, cela veut-il dire que...
- Ne te sent pas obligé d'aller au bout de ta phrase.
Une nouvelle voix s'éleva dans le dos des deux pans. Avant que je ne relève la tête, je vis rouler jusqu'à mes pieds, une vielle bille abîmée, bien plus imposante que la normale. Il ne m'en fallut pas plus pour deviner qui venait de m'adresser la parole. Mon corps se mit à trembler, et mes pupilles se dilatèrent de stupeur, à la vue du jeune homme en question. Les bras croisés, Zac me contemplait de son air malicieux habituel. Pris d'un élan spontané, je me précipitai à sa hauteur, et me laissai choir sur les genoux à ses pieds. L'émotion me submergeait. Je ne complaisais plus qu'une myriade d'excuses, entrecoupées de pleurs, de reniflements et de respirations saccadées.
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Autre Monde - Journal d'un long marcheur
FanficLa grande tempête a frappé. D'étranges éclairs bleus ont emporté les adultes, ainsi que toutes traces de technologies. Les enfants, désormais seuls dans ce monde où la nature semble avoir repris ses droits, doivent s'organiser pour survivre. Mais po...