29 août - Fantômes du passé

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En réponse à mon interrogation, la jeune prisonnière se releva, et apposa ses mains sur les miennes à travers les barreaux, comme pour vérifier que j'étais bien présent, qu'il ne s'agissait pas uniquement d'un délire dû à sa détention. Dès qu'elle réalisa que j'étais bel et bien en chair et en os, face à elle, elle ne put se retenir de fondre en larmes de joie.

– Calme-toi ! Tentai-je de la résonner avant qu'elle n'attire l'attention des autres gardes à l'étage.

– Je n'y crois pas, c'est un miracle ! Ne pouvait elle s'empêcher de répéter entre ses lourds sanglots.

– Tout va bien, respire doucement, ça va aller... Lui indiquai-je en chuchotant, plaçant ma tête contre la sienne, et mes mains sur ses joues afin de la canaliser.

– Eh vous là, c'est quoi ce boucan encore ?

Ce que je redoutais se produisit. Alertés par le bruit, mes deux collègues descendirent dans le couloir, agacés d'avoir été perturbés dans leur somnolence. L'obscurité ambiante des lieux ne leur permit pas de discerner directement la proximité que j'avais avec la captive, et aussitôt, je m'éloignai des barreaux comme si de rien n'était.

– Rien, c'est cette chouineuse qui sanglote pour qu'on la sorte d'ici, déclarai-je sur le même ton courroucé qu'eux.

Peu convaincu, l'un des deux gardes s'avança pour examiner la prisonnière, qui s'était recroquevillée sur sa paillasse. Il m'adressa un regard méfiant, et se retourna vers la cellule d'à côté.

– Toi vieil homme, est-ce bien vrai ce qu'il me dit là ?

Désœuvré par ces soudaines retrouvailles, je n'avais même pas relevé qu'une autre geôle était occupée par un vieux cynique mystérieux. Ayant conscience qu'il détenait là de quoi m'envoyer moi-même derrière les barreaux rejoindre ma camarade, il s'exprima calmement.

– Ce jeune homme dit vrai, cela fait un moment que l'on entend plus que les pleurs de cette enfant capricieuse.

Le garde le toisa du regard un long moment. Ce mensonge avait-il une chance de prendre ? Le verdict tomba quand l'intéressé s'enquit d'un sourire sadique, avant de déclarer.

– Bah, de toute façon, vous n'allez plus l'entendre bien longtemps. Elle s'est révélée inutile lors de nos interrogatoires concernant les plans de ces satanés gosses, on lui implante l'anneau ombilical demain ! Le buveur d'innocence a déjà réservé sa place pour participer aux enchères, ahahah !

Il me fut difficile de dissimuler mon envie de le faire taire sur le coup, mais ne pouvant compromettre mes plans de la sorte, je me contentai d'acquiescer ses dires d'un air narquois.

Le cynique regagna sa place à l'étage, et Noémia se rua de nouveau vers moi.

– Comment se fait-il que tu sois ici ?

– Je... Je suis en mission d'infiltration pour Eden, mentais-je, incapable de lui avouer la triste vérité.

– Et tu es seul ? Lucas, Dimitris ne sont-ils pas avec toi ?

– Non, je suis bien seul. Et toi, comment t'es-tu retrouvée dans cette geôle ?

– Evan, il est ici !! Quelque part dans cette ville, mais ce qu'ils lui ont fait est horrible...

– Ils lui ont implanté l'anneau, devinai-je afin de lui épargner d'évoquer ce détail.

– Oui ! Et c'est le sort qu'ils me réservent également. Elio, tu dois nous aider à partir ici.

Tout se mélangea dans ma tête. Qu'étais-je censé faire ? Les pans n'étaient plus mes alliés, mais Noémia... L'imaginer à son tour endurer le supplice de l'anneau m'était inconcevable.

Autre Monde - Journal d'un long marcheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant