30 août - L'élève dépasse le maître

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L'idée d'attendre le crépuscule avant d'agir n'était pas mauvaise, car si nous voulions mener à bien cette exfiltration culottée, la discrétion se devait d'être notre maître-mot. Malheureusement, suite au sabotage de notre flotte, quelques jours auparavant, le nombre de patrouilles avaient triplé, encore plus à l'approche de ces heures tardives ; il nous fallait donc trouver un moyen d'accéder à notre objectif sans risquer une confrontation avec la milice de Babylone.

Simplement vêtu de mon armure cynique, je n'avais pour le moment rien de suspect, et me présentai ainsi démuni aux gardes surveillants l'accès vers le ministère de la reine, là où se trouvaient les cachots.

– Halte là, où te rends-tu comme ça ?

– Désolé, j'ai oublié quelque chose dans la prison lors de mon dernier service, il a dû tomber dans un coin de la pièce. Je le récupère, et je m'en vais.

Payés pour être suspicieux, les gardes me fouillèrent dans les moindres recoins, s'assurant que je n'emportais sur moi rien de factieux.

– Fais vite, déclara la sentinelle.

Ayant profité du reste de la soirée pour me conditionner, je soufflai un bon coup, et décidai d'enclencher l'opération, en toquant à la porte de la prison. Cette dernière s'entrouvrit sur le geôlier occupant ses journées à se saouler sur son siège.

– Encore toi ? Me lança-t-il d'un ton désagréable. Ton service reprend demain matin, qu'est-ce que tu reviens faire ici ?

Je lui ressortis le même baratin qu'aux gardes du pont. Cette idée ne l'enchantait guère, mais non-désireux de se prendre la tête pour pareille broutille, il ouvrit la porte en grand, et retourna s'avachir à sa place. Premier constat, il était bien seul, exactement comme prévu. Une fois dans le bâtiment, je fis mine de parcourir les étagères, avant de déclarer.

– C'est bon, je l'ai trouvé !

– Tant mieux, me répondit-il, sans prendre le temps de tourner la tête pour me voir approcher de sa nuque. Et qu'étais-tu donc venu récupérer ?

Il eut tout juste le temps de finir sa phrase, qu'il sentit un vif contact métallique parcourir sa chair, lui coupant le souffle net. S'étouffant dans son propre sang, sa dernière vision avant que sa vue ne s'estompe, fut celle de sa gorge tranchée, et celle de mon visage, lui répondant d'un ton tout aussi glacial que le froid de la lame venant de lui ôter la vie :

– Mon couteau.

Immédiatement après avoir essuyé mon arme, je toquai quatre coups distincts sur une ancienne plaque d'égoût, située dans un coin de la salle, et aussitôt, elle fut soulevée de l'intérieur. Killian fit son apparition, ma lance ainsi qu'un imposant sac sur le dos, directement suivi par Evan, dont nous n'avions toujours pas retirer l'anneau ombilical.

Sa sanction, suite à l'échec cuisant qu'avaient subits les cyniques au manoir des Français, fut de lui assigner régulièrement les tâches les plus ingrates au sein de la ville, l'une d'elles consistant à entretenir différentes parties des égouts. Très vite, Killian avait compris qu'il y avait sous Babylone tout un réseau de communication, et que s'il en apprenait les grands axes, cela pourrait potentiellement lui servir un jour ou l'autre. Ce fut le cas aujourd'hui, car grâce à lui, l'escouade venait de réussir la première partie du plan, à savoir s'infiltrer sans encombre. La seconde partie elle, allait être d'une toute autre paire de manche.

– Noémia est en bas, lui indiquai-je en l'aidant à remonter à la surface. Es-tu sur que ton altération est toujours viable ?

– C'est ce que nous allons voir !

Killian et moi descendîmes les quelques marches menant aux différentes cellules, et nous nous ruèrent sur celle de Noémia, qui semblait nous attendre depuis de longues heures déjà.

Autre Monde - Journal d'un long marcheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant