22 Juillet - Rébellion

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Trois jours s'écoulèrent. Trois longues journées, où mes jambes ne parvenaient plus à soutenir mon poids maintenu de la sorte, et que mes bras me tiraillaient d'une douleur dont j'avais fini par m'accoutumer au fil du temps. Plusieurs fois par jour, Syrius descendait dans ce dépotoir où nous étions retenus prisonniers, afin de s'adonner à ses sordides expériences. Cherchant à comprendre la particularité de Khélios, il le saignait un peu plus à chaque fois, dans le but d'examiner son sang, car selon lui, c'est au travers de ce dernier que se manifestaient nos altérations. Moi, comme il me l'avait si bien annoncé, je ne lui servais que de défouloir. Lorsque ses expériences se montraient vaines, il se laissait emporter par la rage, et alors là, il empoignait son couteau pour me taillader les flancs avec. Si mon altération rendait toutes ces blessures obsolètes, la douleur elle, était bien réelle. Chaque fois, Syrius veillait soigneusement à ne pas dépasser ma limite. Ainsi, dès qu'il me sentait partir, il se stoppait ; il n'allait quand même pas abîmer son jouet préféré. Mais ce qu'il ignorait, c'est que chacun de ses coups renforçait mon altération, et accentuait la haine que j'éprouvais à son égard, qui allait se déverser sur lui lorsque j'aurais trouvé le moyen de me défaire de mes entraves.

Mis à part ça, accepter mon sort était bien plus simple depuis cette discutions avec Khélios. Il avait su trouver les mots pour me permettre de garder la tête haute. Chaque heure, chaque minute, chaque seconde, je tenais bon, en m'imaginant aux côtés de Lou. Elle occupait toutes mes pensées : c'était à cette vision de nos futures retrouvailles que je m'accrochais désespérément, me permettant ainsi de surmonter toutes les épreuves. Khélios avait dû en prendre conscience, puisqu'à chaque fois que nous discutions, chose dont nous ne nous privions pas de faire en l'absence de Syrius, Lou revenait forcement dans la conversation.

– Elle doit vraiment être exceptionnelle pour que tu m'en parles autant.

– Tu n'imagines pas, j'ai vraiment hâte de te la présenter, je suis sûr que vous vous entendriez à merveille.

Nous discutions de l'avenir comme si cela était déjà acquis que nous n'allions pas tarder à sortir d'ici. Mais la vérité était qu'il faudrait tout bonnement un miracle pour qu'on puisse se délivrer, car ce n'est certainement pas Syrius qui allait débloquer les loquets nous maintenant captif. J'avais à ce propos, déjà envisagé toutes les possibilités d'évasion, et la plus plausible, était qu'un autre long marcheur tombe tout comme moi sur l'arbre-maison en l'absence de Syrius, et qu'il enfonce la porte pour venir nous tirer de là. Malheureusement, Syrius prenait toujours grand soin de camoufler l'entrée de son repère de feuillage lorsqu'il était amené à quitter les lieux. Car oui, d'après Khélios, il lui arrivait de partir plusieurs jours quérir ce dont il avait besoin pour ses expériences, le laissant ainsi seul, sans nourriture, ni eau à proximité. Je n'osais imaginer ce que Khélios avait dû endurer comme horreurs durant ces deux mois de détention, c'était d'ailleurs tout bonnement incroyable qu'il n'ait pas encore perdu la tête. Pourtant, pas une fois je l'avais entendu se plaindre de son sort. J'avais le plus grand respect pour lui, et faisais tout mon possible pour me montrer digne de lui, ainsi que de ses enseignements.

Finalement, à force de relater le passé, de relativiser sur le présent, et d'envisager le futur, le temps passait bien plus rapidement que prévu. Il nous arrivait même de rire franchement parfois, ce qui nous faisait le plus grand bien. Une profonde amitié était même en train de naître entre Khélios et moi, et je me confiais à lui comme je ne l'avais encore jamais fait avec quiconque auparavant. Mais tout se compliqua le quatrième jour, alors que je fus tiré de ma somnolence par l'arrivée précipitée de Syrius dans la pièce.

– Bordel de bordel de BORDEL ! Répétait-il en boucle.

J'eus tout juste le temps de relever la tête dans sa direction, qu'il m'enfonça son poing directement dans le ventre, avec une force qui m'aurait probablement fait régurgiter si j'avais eus quelque chose dans le ventre.

Autre Monde - Journal d'un long marcheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant