Je préfère vous prévenir pour que vous puissiez vous préparer parce que je pense que vous n'êtes pas prêts. Le chapitre 80 sera le dernier de BB.
79. Apprentissage
Emile avait vu juste. Alice était bien allongée sur l'herbe, là où ils avaient l'habitude de parler. Il ralentit le pas pour l'observer quelques secondes. Ses yeux étaient de nouveau cernés, elle n'avait pas dû beaucoup dormir cette semaine. Il se mordit la lèvre, réalisant que c'était sans doute un peu de sa faute. Il n'arrivait pourtant pas à se sentir coupable. Elle ne lui aurait jamais avoué ce qu'il se passait. Elle se serait tue, comme elle l'avait fait quand elle l'avait invitée à manger chez ses parents et qu'il lui avait demandé des explications. S'il ne l'avait pas trouvé, il n'aurait jamais eu connaissance de l'existence de cette liste.
Il était content de l'avoir trouvée, il n'avait plus l'impression de naviguer à l'aveugle. Après des semaines dans le noir, ça faisait du bien de retrouver un peu de lumière et de savoir où il devait aller. Il s'approcha doucement, pour ne pas la brusquer. Il ne voulait pas qu'elle prenne la fuite à nouveau. Elle se redressa en entendant ses pas, reprenant une position assise. Elle se demandait sans doute comment elle devait réagir alors qu'elle l'avait évité toute la semaine. Il ne lui laissa pas le temps de trop y réfléchir.
— C'est ton frère qui m'a dit que tu serais là. A croire qu'il ne me déteste pas autant qu'il essaie de le faire croire.
Il sourit et elle se détendit. Elle lui lança un regard interrogatif quand il posa le maillot qu'il avait dans les mains juste à côté d'elle.
— C'est un de mes maillots de rechange. Si tu veux l'avoir, il est à toi. Ça me ferait plaisir de voir mon nom sur ton dos.
Elle déplia le maillot pour l'inspecter et il la laissa faire, voyant que c'était important pour elle de prendre du temps pour accueillir chaque nouvelle information qu'il lui donnait.
— On peut allonger ta liste et cocher chaque tiret, vivre tous ces trucs qu'on voit dans les séries, si, après, tu me dis ce que tu veux vraiment.
Elle retournait le maillot pour en voir tous les détails mais il savait qu'elle était en train de l'écouter alors il continua à déblatérer tout ce qu'il avait en tête. Tout ce qui lui avait semblé n'être qu'un mauvais brouillon ces dernières semaines était à présent très clair dans son esprit, comme s'il passait enfin à la rédaction finale.
— Sans doute que certains diraient que si je voulais vraiment te comprendre, je pourrais faire des recherches. Prendre des notes, lire des témoignages, faire en sorte d'en connaître le plus possible pour savoir comment m'y prendre et de ne pas faire d'erreurs. Ne faire aucun faux pas. Mais ce n'est pas ça, la vie. Je n'ai pas besoin d'articles scientifiques pour te connaître. Je vais me rater, oui, à plusieurs reprises, même, mais je vais réessayer, encore et encore. Parce que je m'en fous des autres. C'est toi que je veux comprendre. Toi et personne d'autre. Mais pour ça, il va falloir qu'on se parle, que tu me parles. Ok, peut-être que je te parle aussi. Je vais être maladroit, pas toujours dire ce qu'il faudrait, je ne serais pas parfait. Mais je peux progresser, je vais progresser. Faudra parfois me pardonner, je suis débutant en la matière, je n'ai pas toutes les clefs. Pourtant, je peux te promettre de tout faire pour faire sauter toutes les serrures, les unes après les autres. On va apprendre, tous les deux, ce que c'est d'être dans une relation exclusive et on n'aura pas besoin des autres pour ça. Je te laisserai tout le temps dont tu auras besoin. Si un jour, tu préfères être seule plutôt que de passer du temps avec moi, il suffira de me le dire. Je ne me vexerai pas. Si tu as besoin d'espace, si tu es plus à l'aise en ne me voyant qu'un jour sur deux, si tu veux écrire des listes et qu'on les suive, si tu veux qu'on s'allonge ici à chaque fois qu'on ne sait pas comment se dire les choses, alors on le fera. On peut décider de tout ça, à deux. Il n'y a pas de normes. C'est notre histoire, notre façon de la vivre. C'est à nous de la construire comme bon nous semble. Nous, pas les autres.
Il était un peu essoufflé après un tel monologue mais ce n'était pas grave. Il se sentait enfin libre. Il avait l'impression que ces mots pesaient une tonne sur ses épaules depuis des jours. Ça faisait du bien d'enfin les lâcher. Il s'était lancé, sans filet, parce qu'il savait qu'il n'y avait aucune autre solution que celle-ci. Alice le surprit une nouvelle fois. Alors qu'elle n'avait cessé de retourner son maillot dans tous les sens alors qu'il lui parlait, ne le regardant jamais dans les yeux, elle finit par l'enfiler au-dessus de son tee-shirt et de se rapprocher de lui, hésitant une seconde avant de finalement capturer ses lèvres. C'était la meilleure manière qu'elle pouvait avoir de se défiler pour répondre et il ne put s'empêcher d'approfondir le baiser, passant délicatement sa main dans sa nuque pour réduire les quelques centimètres qui les séparaient encore. La position n'était pas des plus agréables, le faisant tenir sur ses appuis mais il se sentait bien, là, à l'observer tandis qu'elle fermait les yeux. Elle les rouvrit en se reculant et il comprit qu'elle n'allait pas rester muette, pour une fois. Ses doigts étaient agités et il aurait aimé avoir le pouvoir de les calmer mais il savait aussi qu'il devait la laisser trouver ses mots, toute seule.
— Je... Je n'ai pas envie, que toi aussi tu me vois comme un robot. Froid. Comme si j'étais seulement faite d'électricité. Sans émotions. Je ne suis pas aveugle, ni sourde. Je sais très bien que c'est comme ça que les autres me voient. Mais je ne veux pas que toi tu me voies comme ça. Je... Cette liste... C'était pour ne pas faire de bourde. Je ne pensais pas que quelqu'un, que toi, que tu irais au-delà de l'image que je dégage. Je ne voulais pas tout gâcher en étant... moi-même. Je voulais juste m'assurer de connaître... les conventions sociales dans ce genre de situations.
Il l'avait déjà deviné mais ça lui faisait plaisir qu'elle le formule haut et fort. Encore plus quand elle lui avouait à demi-mots ce qu'elle ressentait pour lui. Ça faisait du bien après plusieurs semaines dans le flou, à essayer de faire la cour à quelqu'un qui n'avait peut-être pas les mêmes sentiments pour lui.
— Comment je pourrais te voir comme un robot alors que tu embrasses aussi bien ? Il n'y a rien de mécanique quand tes lèvres touchent les miennes.
Et comme pour le prouver, il l'embrassa de nouveau. D'un baiser plus appuyé, plus passionné, plus confiant surtout. Il ne pouvait que l'être quand il voyait à quel point elle était belle, son maillot sur le dos. Il aurait dû le lui donner dès le premier jour. La vision était bien trop parfaite. Ils allaient apprendre oui, et de la meilleure des manières.
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Blue Blurred
RomantikAlice est une fille à part, détestée des trois quarts des personnes qu'elle connaît. Milan est un coureur de jupons, une fille différente chaque samedi soir. Tous les clichés commencent comme cela. Et pourtant, c'est leur histoire.