Et si on continuait sur notre bonne lancée ? Un nouveau chapitre ?
Merci, merci, merci, du fond du coeur. Malgré les temps d'attente entre les différents chapitres, vous êtes toujours présents , réactifs, vous aimez, commentez et voir vos émotions et vos ressentis c'est la meilleure des récompenses.
70. Révisions
Alice était déjà dans la salle quand il passa la tête par le chambranle de la porte. Son prof de nutrition les avait retenus une dizaine de minutes supplémentaires afin de finir le chapitre sur lequel ils bossaient depuis deux semaines. Il s'était empressé de quitter l'amphithéâtre pour la rejoindre. Elle était assise en tailleur sur une chaise, penchée sur une feuille à y gribouiller des équations, presque submergée par les livres ouverts tout autour d'elle. Il profita un instant de cette vision d'elle, ses cheveux bruns lui tombant devant les yeux, sans qu'elle n'y fasse attention, ses lèvres légèrement pincées, signe de concentration, avant qu'elle ne relève la tête vers lui, comme pour vérifier l'identité de l'intrus. Une fois confirmé que ce n'était que lui, elle se replongea dans ses calculs, le laissant entrer et s'installer à ses côtés.
Elle ne dit rien quand il poussa plusieurs de ses bouquins fermés pour sortir les siens et s'étaler sur la table, en face d'elle, pour commencer à réviser dans le silence. Ce n'était pas désagréable, cette absence de bruits, bien au contraire. Il avait l'impression que ça faisait trop longtemps qu'il n'avait pas pu profiter d'un tel silence pour réviser. Ces derniers temps, il y avait toujours du monde avec lui, que ce soit à l'appartement, pour fêter une victoire, jouer à la console, ou en cours pour mettre leur nez dans des affaires qui ne les concernaient pas. Ses pensées aussi étaient trop bruyantes, l'empêchant de se concentrer. Sa présence l'apaisait. Elle semblait si calme, dans cette salle de cours vide, à écrire ce qui semblait être un essai sur la physique quantique, en ne suivant pas les lignes de ses feuilles à carreaux. Il devrait peut-être penser à lui offrir du papier blanc, vierge de tout tracé. Elle était dans sa bulle et il ne l'avait pas éclatée en y entrant pour relire ses notes d'anatomie, c'était bien le signe qu'ils allaient dans la bonne direction.
L'anatomie n'était pas la matière qui lui posait le plus de problèmes. Il aimait bien étudier le corps humain et ses différentes facettes. La biologie lui avait toujours semblé plus concret, plus logique. Ses facilités n'excluaient pourtant pas la nécessité d'une période de révisions, il y avait beaucoup de termes et de définitions à apprendre par cœur.
Il se pencha ainsi pendant la première demi-heure sur le système cardiovasculaire. Il voulait boucler les chapitres sur la composition du sang, la structure du cœur et le fonctionnement des différents vaisseaux sanguins avant de quitter cette pièce, ce soir. Ce serait une bonne chose de faite.
Il venait de se répéter mentalement une bonne dizaine de fois les différents leucocytes et la composition du plasma sanguin quand il se décida à passer sur le chapitre du cœur. Le graphique de l'organe remontait à plusieurs semaines maintenant et il décida de se le représenter sur une nouvelle feuille afin d'y placer les différents noms des aortes, artères ou autres veines. Sauf qu'il n'avait jamais été bon dessinateur et il dut s'y reprendre à deux fois pour tracer une ligne correcte. Alice lui jetait des œillades depuis qu'il avait commencé ses tracés et finit par prendre la feuille qu'il avait devant lui, gommer les traits maladroits et représenter l'organe. Surpris qu'elle prenne l'initiative et qu'elle se désintéresse de son essai, il la regarda faire. Elle avait le trait fin et une précision du détail. Elle n'hésitait pas à rajouter de la texture pour signifier les différentes zones. Ce n'était pas la première fois qu'il voyait ses dessins, ses carnets en étaient remplis, c'était toujours très net, limite chirurgical. Mais c'était bien la première fois qu'il l'observait prise dans l'action. De nouveau, elle se pinçait la lèvre inférieure. Elle ne cessait de tourner la feuille dans tous les sens en faisant attention à ce que ses mains ne viennent pas tâcher le dessin de gris. Elle n'avait pas besoin de la gomme, tous ses traits étaient pensés.
— Là tu as le septum interventriculaire. Ils séparent les deux ventricules, gauche et droite.
A chaque fois qu'elle représentait une nouvelle partie du cœur, elle traçait une ligne sur le côté avec sa définition. L'anatomie n'était pas le point faible de Milan mais il ne le lui dit pas, c'était plus intéressant quand elle prenait l'initiative de la discussion, même s'il s'agissait du système cardiovasculaire. C'était bien la première fille qui lui dessinait un cœur sous plusieurs coupes, avec la définition de ses artères et des rameaux interventriculaires.
La démonstration finit rapidement et elle se replongea dans son essai, comme si elle n'avait pas été interrompue. Il n'osait même pas toucher à ses dessins et se contenta de prendre une nouvelle feuille sur le côté pour écrire, plus en détails, les différentes fonctions de chacune des parties du cœur. Même s'il avait senti une accélération de son rythme cardiaque quand elle avait pris d'elle-même les devants, il sentait surtout faire effet sur son cerveau des substances telles que la dopamine ou l'adrénaline, et son corps ne cessait d'en demander plus. Il était foutu. Il était en train de devenir dépendant.
Il aurait aimé ramener le sujet du bar sur la table mais il ne voyait pas comment. Si elle avait accepté aussi rapidement, elle devait avoir ses raisons. Il n'avait juste pas envie qu'elle se sente obligée de venir, tout en appréciant pas la soirée, oppressée par le lieu. Mais il n'était pas naïf, il savait très bien que ce n'était pas qu'une question de bienveillance, il avait également peur de la présenter à tous ses potes. Il ne s'était pas encore fait totalement à l'idée qu'il était en couple. C'était une notion qui lui semblait si lointaine qu'il n'était pas encore habitué aux différentes étapes que ça sous-entendait. Il s'était attendu à ce que ça aille plus lentement avec Alice, à ce qu'ils prennent plus de temps à poser les bases mais, apparemment, il allait devoir s'y faire au plus vite.
Elle releva la tête et l'interrogea du regard, se rendant compte qu'il n'avait pas touché à ses crayons depuis qu'elle lui avait pris la feuille. C'était le moment parfait pour entamer la discussion.
— Tu es sûre de vouloir aller au bar demain soir avec Evan ?
— Pourquoi pas ?
Elle avait marqué une hésitation, et son « pourquoi pas » sonnait bizarre dans sa bouche. Clairement, elle faisait des efforts de communication, elle tentait de rendre son ton léger, elle modifiait sa voix, la rendant plus aiguë. Les changements étaient à peine perceptibles mais Milan commençait à la connaître par cœur.
— Je ne sais pas, je pensais que ce n'était pas ton truc, c'est tout.
— Comme ça je rencontrerai ton équipe.
Ce n'était pas une réponse à l'alicienne, pourtant il n'insista pas. Il voyait qu'elle commençait à ne plus se sentir à l'aise. Il pouvait entendre le tremblement léger de sa jambe gauche, cognant contre le pied de la table, il voyait bien qu'elle se retenait de croiser, décroiser ses doigts. Il n'avait pas envie de la mettre dans une impasse, alors il finit par hocher la tête et reprit ses révisions.
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Blue Blurred
Roman d'amourAlice est une fille à part, détestée des trois quarts des personnes qu'elle connaît. Milan est un coureur de jupons, une fille différente chaque samedi soir. Tous les clichés commencent comme cela. Et pourtant, c'est leur histoire.