Chapitre 47.

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     La fine gouttelette roula sur sa joue, glissa dans son cou jusqu'à se mêler à la sueur de son dos. Plusieurs autres firent le même trajet, seules manifestations d'un désespoir appelant aux secours.

La fenêtre calfeutrée n'avait pas changé, elle était toujours la même, cloîtrée dans son mur de béton, cachant le bleu du ciel. La bille amère restait en suspens dans sa gorge, tout comme ses bras, ses jambes, immobiles, figés.

Seuls ses tympans vivaient encore, vibrant au rythme des bruits métalliques qui résonnaient à ses côtés, et de sa voix, à elle, qui ne cessait de s'animer.

« Les copines, ça se prêtent des choses, ça se fait des cadeaux aussi parfois ! Je sais que c'est bientôt ton anniversaire et non le mien... mais je suis impatiente d'avoir mon cadeau à moi ! »

C'était la voix d'un monstre. Un monstre qui avait pris l'apparence d'une fée, qui s'était glissé dans Mahi comme on se glisserait dans un costume. Un vilain avait dû prendre possession de son corps, il n'y avait pas d'autre explication possible.

« ... Je sais que je suis pas très patiente, c'est un gros défaut. Mais je t'attends depuis si longtemps, depuis le Championnat, je mérite bien mon cadeau ! ... Où est-ce que j'ai mis ce truc... »

Les bruits métalliques s'intensifièrent. Elle cherchait. Où ? Quoi ?

Privée de son corps, Haruka ne pouvait que rester fixée sur cette fenêtre qui lui cachait la vue du monde. Les sons la faisaient pleurer de plus belle, imaginant toutes sortes de choses, plus atroces les unes que les autres.

Soudain, Mahi apparut devant elle. Enfin, plutôt le corps de Mahi. Haruka ne pouvait reconnaître en cette enveloppe de chair l'esprit de son amie qui lui était disparue.

Les mains derrière le dos, la rose souriait de toutes ses dents. Les murs gris, la fenêtre cachée et la sensation d'être figée en moins, Haruka aurait eu presque l'impression que tout ceci était normal. C'était la même, en apparence, le même sourire, la même expression angélique. Mais ses mains dans le dos n'annonçaient rien de bon, ni de normal.

Mahi posa son regard sur sa robe à froufrous puis détailla les vêtements de son amie, coincée dans son fauteuil, les joues pleines de larmes. Elle fit la moue.

« T'as pas fait d'efforts... Regarde-moi, je me suis faite toute belle pour ce grand jour ! »

Sur ses mots, elle tourna sur elle-même, révélant, derrière son dos, une large pince de fer aux bords pointus.

Le cri ne sortit pas de la gorge d'Haruka. Aucune peur ne se lut sur son visage. Juste cette expression figée, affichant éternellement sa peine d'avoir causé une telle douleur à une amie, tout ça à cause de son alter.

Une douleur qu'elle ne s'en voulait plus du tout d'avoir infligée. Ses remords si vite balayés.

Mahi s'arrêta de tournoyer, déposant sur Haruka un regard d'une extrême douceur, l'horreur masquée par une mèche de coton rose. Puis, indolente poupée de porcelaine, elle s'approcha de celle qu'elle considérait comme son amie et se pencha sur elle, comme une sorcière se pencherait sur le berceau d'un enfant à maudire.

Attendrie, elle détaillait le visage d'Haruka, s'attardant sur son regard.

« Tu es la pièce maîtresse de ma collection... »

Puis, doucement, Mahi leva une main et l'approcha de l'œil droit de son amie. Elle lui saisit ses deux paupières qui ne cillèrent pas à son approche, figée, et les écarta de ses deux doigts.

La respiration d'Haruka se fit de plus en plus forte, soulevant quelques cheveux roses de celle qui se penchait dangereusement au-dessus d'elle. De nouvelles larmes roulèrent sur ses joues. Elle voulut crier, mais rien ne sortit, elle voulut se protéger, mais aucun de ses alters ne réagit.

Haruka Aizawa (Partie 3) [MHA]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant