Prologue.

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L'odeur boisé mêlé à la douce aigreur d'un parfum d'agrume asphixie l'air autour de nos deux corps entremêlés. Cachés derrière cette mini forêt d'orangers, mon amant continue de prendre possession de moi dans un déhanché rapide pendant que je m'exprime dans un profond râle. À cette heure de l'après-midi, personne ne peut nous entendre, les maisons sont éloignées, les riverains sont en repos.

Le corps tendu au maximum, je suis à deux doigts de la libération. Lorsqu'enfin mon partenaire m'encercle le torse avec puissance, mes doigts aggripent férocement le tronc qui me sert de support, alors en symbiose nous nous soulageons dans les préservatifs. L'ombre que nous offre le verger, cache à peine les gouttes de sueurs qui perlent sur nos corps, je sens ceux de mon étalon couler depuis son menton et tomber sur la cambrure de mes hanches étroites puis rouler le long de mes jambes lisses. Essoufflé, il se repose un peu sur moi avant de se décoller.

— Tu avais raison, c'est bien meilleur comme ça, chantonne ce dernier en me claquant la fesse droite.

Cette phrase m'énerve autant que son émetteur, il gâche ce moment que je préfère le plus après une bonne séance de baise, l'après-sexe. Je n'attendais pas non plus qu'il soit romantique, vu que ceci est un arrangement mutuel de deux hommes mûrs qui sont en feu. Sam se redresse au mieux et ôte son préservatif sans plus se soucier de moi. J'ai l'habitude.

Je me prépare avant d'enfiler mon Jean. Heureusement qu'il est un peu simplet, il a du bon sens de toujours enfiler une capote car ne pas prendre une douche directement après ça me dérange.

— Alors, tu me déposes chez moi ? Je suis venu à pieds, Linda est partie avec ma camionnette ce matin pour son échographie.

Linda c'est sa femme. Samuel est un homme marié qui va bientôt devenir père pour la seconde fois. Derrière sa salopette et ses airs de bon père de famille, il mène une double vie depuis quelques années. Je suis sa double vie, mais juste à titre contractuel.

Il n'est pas bi, il est aussi gay que moi. Je suis le seul de tout le patelin à le savoir. Normal, nous nous sommes rapprochés de façon insolite lorsque je l'aidais pour sa production fruitière. Depuis ce jour, ce quinquagénaire qui a le même âge que mon père et moi entretenons une pseudo relation. Nous nous satisfaisons mutuellement, mais je n'en peux plus de ça. Il me gonfle et me menace de me révéler à mes parents si je le quitte.

J'ai vingt-cinq ans, je m'appelle Rome Haier. Je suis un ingénieur agronome qui va bientôt quitter ce bourg pour un super boulot que j'ai obtenu à Nice. C'est un rêve qui se réalise, fuir cet endroit, fuir Sam.

— Alors, on y va ?

Je ne lui réponds plus. Peu importe le nombre fois qu'on se voit, je ne lui dis jamais rien, à quoi bon, je suis son vide couille. Il sait que pour trahir son secret et arrêter ce harcèlement, je dois aussi trahir le mien. C'est tout bête car je peux nier l'être, mais ce serait sa parole contre la mienne. Savoir qui dit la vérité ou ment, alors qu'il n'y a ni photos ni mots doux, c'est un pari que je ne suis pas encore prêt à prendre.

Il monte dans la voiture que mon père m'a offerte au prix d'un sacrifice pour me féliciter de mon diplôme. Je suis en colère qu'il souille mon siège, mais je ne préfère pas faire de scandale. Dès que je me gare devant sa maison de pierres, je n'écoute pas ses derniers propos, j'appuie sur l'accélérateur.

Sale type !

Aussi éloigné que possible, je file à toute allure pour rentrer chez nous et prendre une douche. Je sens encore son odeur sur moi. C'est étrange que lorsque je me rapproche encore plus du jour de mon départ, je n'arrive plus à supporter tout ça, pourtant j'arrivais à tenir le coup au début. Répéter le même acte au-moins deux fois par semaine avec lui, alors que je devrais être auprès de mon père malade d'une infection pulmonaire, ça me tue.

L.T.D.B.C (M/M)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant