Après un événement inexplicable et lourd de conséquences dans son enfance, Jahia a grandi pour devenir une jeune femme intrépide et prometteuse de la tribu Ewe.
Toujours accompagnée de ses deux fidèles amis, Peyam et Zuri, la jeune guerrière se...
- Vous devez expirer toute votre peur dans ce cri. Ne doit rester que la concentration et la force pour combattre votre adversaire, enseigna-t-elle d'une voix qui portait sans difficultés jusqu'au derniers rangs.
Maintenant que Jahia avait été officiellement baptisée devant les Dieux et les membres Ewes, elle devait s'intégrer au quotidien de la tribu. Plus de leçons privées avec Ambe ; même les bras protecteurs d'Abayo ou Cheyma se faisaient plus rares. Elle devait se faire une place par elle-même, créer son propre espace. Les sandales des élèves claquèrent uniformément le sol, tandis qu'ils imitaient les gestes précis de la Protectrice Flamboyante. Jahia y mettait toute sa ferveur... et cela payait. A en croire le regard satisfait d'Ambe, elle se montrait plus performante que les autres enfants. Cette pensée lui arracha un sourire alors qu'elle envoya un poing ferme un avant.
- Repos !
D'un seul homme, les apprentis Protecteurs rangèrent leurs bras le long du corps.
- Bien. Vous maîtrisez désormais les bases du combat à mains nues. Vous allez maintenant créer les détachements. Vous serez répartis en équipes de trois. Ces deux camarades que vous allez choisir vous accompagneront dans tous vos déplacements, dans toutes vos missions. En tant qu'apprentis puis en tant que Protecteurs. C'est avec eux que vous vous entraînerez, avec eux que vous chasserez, avec eux que vous...
Ambe marqua une courte pause en foudroyant du regard un garçon de taille moyenne qui ricanait avec un camarade. Elle saisit le bâton de combat planté dans le sol à ses côtés et fit tomber son extrémité sur le crâne de l'enfant avec un claquement effrayant.
- ... subirez les conséquences de vos bêtises ! Kofi, Akoua, vous apporterez votre aide à l'éleveur et brosserez tous les dromadaires.
Les amis des deux coupables pouffèrent tandis que les deux enfants affichaient une mine déconfite. Ils se turent vite sous le regard aiguisé de la jeune femme. Ambe reprit :
- Ces deux personnes seront vos gardiens. Elles seront les protectrices de vos arrières et de vos secrets, elles sauront tout de vous et vous saurez tout d'elles. Vos liens devront être aussi solides que ceux qui lient les trois Dieux Enfants. Choisissez-les avec sagesse et lucidité. Est-ce que je me fais bien comprendre ?
Le corps d'apprentis Protecteurs hocha timidement la tête.
- Bien. Vous vous placerez en déplacement demain matin. Nous commencerons l'enseignement de combats armés.
Sur ce, la Protectrice Flamboyante tourna les talons et s'éloigna à pas tranquilles, son long bâton dans la main. Alors que les murmures s'élevaient de la classe d'apprentis, sa voix rugit une dernière fois :
- Kofi, Akoua !
Ceux-ci n'attendirent pas leurs restes et coururent vers l'enclos du bétail. Jahia pensa que la femme de feu avait véritablement une aura incroyable pour que sa voix ne soit ainsi jamais contestée. Après tout, elle avait fait plier le Kiongozi d'un simple regard. Jahia sera les poings, tendue, mais pleine d'espoir. Elle s'entraînerait autant qu'il le faut pour devenir aussi forte qu'Ambe, et tuer la bête qui rôdait dans les Ruines de Teli. Mais dans l'immédiat, elle devait trouver son « détachement ». Elle chercha instinctivement des yeux Zuri, la petite fille avec qui elle s'était liée d'amitié quelques jours plus tôt. Elle la repéra rapidement : une silhouette petite et frêle au milieu d'enfants qui feignaient l'assurance. Elle la rejoint et Zuri lui adressa un sourire timide, mais rassuré.
- Nous devons être trois, commenta-t-elle néanmoins en balayant son environnement du regard.
Autour d'elles, certains enfants couraient déjà pour jouer ailleurs ou rejoindre leurs familles. Quelques adolescents et adultes s'attroupaient autour du terrain d'entraînement. Jahia chercha Abayo des yeux.
- Hé frangin, choisis bien. Tu dois trouver les plus robustes. Qui est-ce qui frappe le plus fort ?
Jahia se tourna vers la voix assurée qui s'enthousiasmait dans son dos. Un adolescent questionnait l'un des élèves présents. Le garçonnet ne semblait pas de bonne humeur et croisait les bras en regardant ses pieds.
- Je ne sais pas...
- Allez, vous avez bien dû faire des duels.
- Non, on n'a pas encore combattu...
Le jeune homme semblait un poil exaspéré.
- Tu ne vas pas me dire que tu ne t'es jamais battu ? Même pas pour jouer ?
Le garçon haussa les épaules en se renfrognant un peu plus.
- Bon, d'accord. Alors, qui tire le mieux ?
- Je ne sais pas, Hery, on a pas commencé de tir à l'arc non plus !
- Bon sang, Peyam, fais un effort ! Si tu ne t'associes pas aux meilleurs, comment comptes-tu progresser ? En plus, il te faut des compagnons costauds pour te protéger. Tu n'en es clairement pas capable pour l'instant.
Jahia ressenti la détresse grandissante du garçon. Elle s'approcha et s'immisça entre les deux frères.
- Moi, je suis forte. Et Zuri, dit-elle en pointant sa partenaire du doigt, ne manque jamais sa cible.
Hery haussa un sourcil dubitatif.
- Ha ! Tu es la nouvelle, l'enfant perdue, dit-il, ses yeux brillant de curiosité. Qu'est-ce qui me dit que tu es forte ?
- Mes motivations. Même si je ne suis pas encore aussi forte qu'Ambe, je suis déterminée à le devenir.
Hery lui ria au nez.
- Personne ne peut égaler Ambe.
Jahia planta son regard dans le sien.
- Moi, je le ferais.
Derrière elle, Peyam suivait l'échange avec attention. Hery l'attrapa par le bras et entreprit de l'emmener chercher d'autres compagnons. Peyam résista.
- Non.
- Quoi ?
Il se libéra et se tourna vers Jahia et Zuri.
- Moi aussi, je suis motivé, dit-il à l'intention de la nouvelle Ewe.
Hery leva les yeux aux ciel en affaissant sa main contre son visage.
- Par le fourbe Majii... tu as intérêt à profiter de ce détachement chini pour en être le chef. Baba ne veut pas d'un Protecteur faible dans la famille, soupira-t-il en s'éloignant.
Jahia sourit à Peyam.
- On progressera ensemble.
Zuri approuva d'un signe de tête discret. Néanmoins elle avait accroché le regard du petit garçon, ses petits yeux perçants lisaient le visage ingénu de Peyam ; et Jahia sentait qu'eux aussi, tissaient déjà les premiers liens d'une longue amitié.
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