Chapitre Trente-trois - Le revers de la médaille

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En tant que Protecteurs d'élite, les trois amis avaient déjà été félicités par le Kiongozi lors de ses visites au terrain d'entraînement. Mais c'était la première fois que Peyam et Zuri étaient solennellement convoqués dans sa tente, et cela avait quelque chose d'excitant.

Kiongozi Nabil-Obi les reçut sobrement. Les trois protecteurs furent invités à s'installer sur les coussins de couleurs qui recouvraient le sol autour de la table basse centrale. Celle-ci arborait une carte des Terres de Shoara incrustée dans son bois, et jonchée des pions représentant les tribus sœurs, à positionner et déplacer. Des encens diffusaient cette fois un parfum de vanille et de citron.

- Le reste du conseil va nous rejoindre sous peu. Oulaï, appela-t-il sans un regard vers le jeune garçon.

Oulaï apparu et s'approcha, aussi effacé qu'une ombre, pour servir une tasse de thé chaud aux invités. Jahia était gênée d'être ainsi servie par quelqu'un qui visiblement recevait peu de reconnaissance pour son travail. Elle réussit à accrocher le regard sous ses yeux mi-clos et lui adressa un signe de tête en remerciement. Jamhani, Atepah, Ambe et Abayo ne tardèrent pas à arriver. Ils s'installèrent à leur tour, rapidement servi par Oulaï, qui apporta également des pâtisseries salées et des olives noires à piquer. Du coin de l'œil, Jahia pouvait voir Peyam lorgner sur la nourriture. Zuri lui donna un coup de coude dans les côtes, discret mais vif, suffisamment pour que Peyam se redressent et referme la bouche.

- Bien. Votre mission consiste principalement à récolter des renseignements, commença le Kiongozi d'un ton presque las. Les rumeurs qui nous sont parvenues prêtent à penser que Xwula a rencontré quelques contretemps dans leur production saline. Abayo, tu es le plus averti. Je te laisse les détails ?

Le cinquantenaire poursuivi d'une voix posée.

- Comme vous le savez, nous dépendons grandement des ventes de sel des Terres Blanches. Les Adjas, dont l'itinéraire indique qu'ils remontaient de Xwula il y a un mois, ont acheté des sacs de sel en grandes quantités à plusieurs caravanes marchandes avec lesquelles nous sommes en contact. Cela laisse imaginer plusieurs choses, mais la piste du pillage de leurs ressources a été écartée par des Protecteurs envoyés en mission il y a deux semaines. Le problème vient donc de Xwula...

- Pour une raison ou pour une autre, les Xwus n'ont pas produit autant que d'habitude. Et vous souhaitez que l'on apprenne pourquoi, intervint Zuri, qui semblait surtout réfléchir à voix haute.

- Exactement. Dans la plus grande discrétion possible.

Abayo marqua une pause, mais garda une mine sérieuse et les sourcils froncés, accentuant les rides de son front. Une expression que Jahia ne connaissait que trop bien. Il n'avait pas fini, et quelque chose le préoccupait.

- Pourquoi ne peut-on pas simplement demander à notre ambassadeur sur place ? S'enquit-elle, pressentant qu'il y avait davantage à cette histoire que ce qu'il laissait entendre.

Le regard d'Abayo coula vers le Kiongozi. Celui-ci reprit la parole en caressa soucieusement sa longue barbe poivre et sel.

- Les relations entre les tribus sœurs se sont dégradées dernièrement. La sècheresse se fait de plus en plus menaçante et réveille de vieux instincts. Nous soupçonnons certaines tribus d'essayer de s'accaparer les zone de Shoara les plus prospères.

- Lesquelles ? réagit immédiatement Jahia.

- Je pressens que tu as déjà une idée, Jahia O'Nyambe.

- En effet. Kiongozi Zenebe...

Elle fut pris d'un léger mais surprenant haut-le-cœur. Zenebe. Elle avait presqu'oublié le malaise qu'elle avait ressenti en quittant les Minas. Zuri plissa les yeux, discernant le trouble de Jahia. La jeune Emissaire se ressaisit.

Coeur Nomade T1 : Le Mystère des Ruines de TeliOù les histoires vivent. Découvrez maintenant