26. Les fantômes du passé

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Les nuits que j'ai passées après ma rencontre avec l'étrangère ont été agitées. Les questions qu'elle a ramenées avec elle ont provoqué beaucoup de remue-ménage dans mon esprit. Et même quand Embry est à mes côtés, je ne parviens pas à tenir les cauchemars à distance.

Au réveil, je ne me rappelle de rien de spécifique, si ce n'est des émotions ressenties. La peur et le désarroi, surtout. La colère et la haine, parfois. Et plus rarement, je perçois également un arrière-goût à peine perceptible de bonheur et de joie. Mais souvent, trop souvent, cet arrière goût agréable est totalement gâché par les émotions négatives.

J'ai vite compris de quoi ces cauchemars devaient retourner, sûrement des traces de très lointains souvenirs que je ne suis plus en capacité de me remémorer.

Embry s'inquiète beaucoup de me voir chaque fois me réveiller en sursaut, paniquée. Il aimerait pouvoir m'aider mais même ses bras autour de moi ne parviennent pas à faire reculer les cauchemars. Parce que ces cauchemars, ils existent au fin fond de mon esprit. Ils font partie de moi et rien ne peut les dissiper. Rien à part peut-être des réponses sur mon existence. Des réponses qui me hantent et qu'on refuse de me confier.

Alors, bien souvent, comme maintenant, je suis envahie par la colère, cette émotion destructrice que je hais ressentir, celle qui nous rend capable du pire. C'est à cause de cette colère que j'ai décidé d'aller me promener sur les sentiers de la réserve quileute que j'aime arpenter pour me ressourcer l'esprit et m'apaiser.

C'est alors que mes pensées sont à des années lumières de la réalité que quelqu'un m'interpelle.

— Décidément, tu ne me suivrais pas toi ? C'est Seth qui te fournit mon emploi du temps heure par heure ?

Cette voix massacrante d'ironie, c'est celle de Leah. Dans un sursaut, je me retourne et la découvre derrière moi, une ombre de sourire à la commissure qu'elle ne tarde pas à faire disparaître.

— Je t'assure que je n'avais aucune idée que tu te trouverais là, objecté-je. Ça devient une habitude pour nous de nous rencontrer ici, il semblerait.

— Les terres quileutes sont mes terres, tu sais. Techniquement, tu es chez moi.

— Mais les terres quileutes sont aussi plus larges que cet unique sentier. Crois-moi, c'est un hasard. J'avais plutôt escompté être seule, sans vouloir t'offenser.

— Oh mais tu ne m'offenses pas, moi aussi je souhaitais être seule avant de te découvrir là.

— Mais c'est toi qui as engagé la conversation alors que je ne t'avais pas vue. Tu aurais pu simplement faire demi-tour et ne pas te manifester. Pourquoi ça, Leah ?

Je sais que j'ai tapé juste en constatant le froncement de sourcils de la quileute. Elle ne s'attendait manifestement pas à cette question et elle se retrouve bien embêtée. Avant qu'elle ne trouve à répliquer, je reprends :

— Peut-être n'es-tu pas aussi insensible que tu le prétends ?

Je sais que je m'engage sur un terrain miné mais je ne cherche pas à épargner les sentiments de Leah. Je crois que nous sommes au-delà de ça, nous deux.

— Je ne sais pas ce que tu cherches à me faire dire, mais je ne souhaite toujours pas que nous soyons amies.

— Je ne cherche pas à te faire dire quoi que ce soit. Je trouve juste curieux que tu n'ais pas d'instinct chercher à m'éviter tant que c'était encore possible. C'est ce que tu avais tendance à faire, avant.

— C'est ce que j'aurais effectivement du faire, grogne-t-elle. Si seulement j'avais su que tu serais aussi agaçante !

— Je ne te retiens pas, Leah, tu sais ? Pourquoi es-tu encore là ?

Aina [Embry Call]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant