Le retour en France a été très difficile. Il m'a fallu à nouveau quitter les terres que j'ai longuement arpentées au cours de mes dernières années de vagabondage. J'ai beaucoup voyagé en Angleterre, en Irlande, en Ecosse, tout ça à l'aveuglette, ne sachant où me rendre, puisque le seul endroit où j'aurais voulu être, en compagnie de mes enfants, m'était interdit. Par contrainte mais également par choix, un choix mûrement réfléchi pour leur bien, du moins j'espère ne pas avoir fait une erreur. D'autre part, si ce retour est difficile, c'est parce que je suis éperdument seule. La dernière fois que j'avais posé pied en France, ce n'était pas le cas car j'étais en compagnie de James.
Ecrire le prénom de James m'est difficile. J'avais cessé de consigner mes pensées pendant longtemps, mais à l'époque, l'idée de consigner par écrit la perte de James m'était insupportable. J'aurais voulu que rien de tout ça n'arrive, mais je suis bien placée pour savoir qu'il n'y a jamais de retour en arrière.
J'ai toujours su que je ne pourrais pas garder mon ami pour toujours à mes côtés. Cela aurait d'ailleurs été égoïste de le monopoliser ainsi, même si lui le souhaitait de façon incompréhensible. L'avoir perdu est néanmoins une douleur à vif, une énième douleur parmi toutes les autres pertes que j'ai déjà subies auparavant.
Ne pas savoir s'il est mort ou en vie, c'est sûrement le plus dur. Tout ce que je sais, c'est qu'on l'a arraché à moi et que je n'ai rien pu faire. Je ne veux cependant plus y penser. Il n'y avait rien que je puisse faire avant, et il n'y a toujours rien que je puisse faire aujourd'hui.
Les années ont passé. Tant d'années. Plus que je ne peux en compter. Et ce retour en France, je ne sais pas ce qu'il m'apportera. Mais il me faut continuer à avancer, ne jamais rester trop longtemps au même endroit. Survivre, parce que je ne sais pas quoi faire d'autre, parce que je ne semble pas avoir le choix.
Il me faut oublier James une bonne fois pour toutes. Aujourd'hui, il se peut qu'il ne soit plus de ce monde. Car les années ont passé, comme je l'ai dit, et que si elles n'ont pas d'effet sur moi, elles en ont sur les autres. Peut-être que ces années ont fini par rattraper James et, mort ou vif à l'époque, il n'est peut-être plus de ce monde aujourd'hui. Comment le savoir ? Il me faut donc passer à autre chose. Comme toujours.
Demeurer seule, parce que c'est plus facile comme ça, moins douloureux. Cela a aussi moins de sens, la vie en solitaire, mais je ne vois pas quel autre choix j'ai.
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J'ai voyagé en Espagne. J'ai voyagé en Italie. Toujours seule, indépendamment du temps qui passe. Je crois que je ne supporte plus d'être seule, mais je me souviens pourquoi je suis seule et c'est tout ce qui importe. Enfin, presque.
Ma mémoire me fait de plus en plus défaut. Je remarque que des images s'effacent dans mon esprit. Je peux à peine me souvenir des îles Feroé, des visages de mes parents adoptifs. Tout devient flou. Je me demande si ça n'indique pas quelque chose. La fin de mon calvaire peut-être ? Est-ce que ma fin est arrivée ? Suis-je frappée par les ravages du temps sans que cela ne se voit physiquement ? Une part de moi l'espère.
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Chaque fois, mes pas semblent me ramener en France. J'ai l'impression de me sentir plus proche de James, lui que j'ai de plus en plus l'impression d'avoir abandonné, alors même que je n'y étais pour rien. Mais je ne veux pas repenser à tout ça, je ne le peux pas.
Que ce soit en France ou ailleurs, je ne trouve pas à ma vie le moindre sens. Mais en France, j'ai un sentiment de familiarité avec les lieux qui m'apaise un peu. Ce n'est pas grand-chose, mais c'est tout ce que j'ai trouvé pour me sentir un peu mieux.
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Aina [Embry Call]
أدب الهواةAina arrive à Forks un peu par hasard et s'attend à trouver une bourgade totalement dénuée d'intérêt. Elle comprend son erreur en posant son regard sur les Cullen pour la première fois. De son côté, Edward ne tarde pas à comprendre qu'Aina n'est pas...