Chapitre 11.II

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— 𝓣éo ?

  — Étoile ?

  — S'il te plaît, évite de faire tomber ce panier comme les deux d'avant, la pria Emyria.

  Elle avait relevé la tête vers Téo, tout en préparant les derniers plats avec d'autres Apprentis et Espions.

  Téo ne put s'empêcher de lever les yeux au plafond, avant de serrer plus fort son panier de petits gâteaux contre elle. Sa mésaventure de l'après-midi avait déjà fait le tour, à son plus grand dam.

  — Ne t'inquiète pas, je vais m'en sortir.

  — Tu m'as déjà dit ça deux fois, répliqua Emyria avec un sourire qu'elle tenta de cacher en baissant la tête vers le gâteau qu'elle découpait en tranches.

  — Et je te le dis une troisième fois !

  Téo se détourna avant que son amie ne lui réponde quelque chose, s'avança prudemment sur la glace qui débutait tout juste à une des sorties des cuisines.

  Finalement, elle avait décrété que son ennemi numéro un n'était pas la glace, mais autre chose : sa maladresse qui commençait à devenir légendaire. Deux fois auparavant, elle avait failli réussir à rejoindre la table sur laquelle elle était assise plus tôt, et deux fois elle s'était étalée de tout son long.

  Heureusement, les Espions avaient pu sauver un maximum de nourriture suite à ses bêtises.

  Toutefois, elle avait bien l'intention d'arriver à cette maudite table sans rien faire tomber. Il en allait là de la survie de son ego.

  Elle s'attendait à ce qu'à un moment, quelqu'un lui propose des patins. Or, ce ne fut pas le cas, si bien qu'elle devait apprendre - et ce rapidement — à patiner sans, comme les autres, malgré le fait que la texture de la patinoire éphémère soit très différent (et sans oublier son ennemi numéro un).

  Avec difficulté, elle patinait doucement vers la table, tandis que la plupart des Espions et des Apprentis étaient déjà présents, profitant de la soirée. Elle comprenait ses camarades ; pour une fois, ils avaient le droit de se coucher tard, les cours du lendemain matin étaient annulés, et ils avaient bien l'intention d'en profiter.

  Se retenant de tirer la langue (elle ne voulait pas se la couper si elle tombait), elle était bien heureuse que les autres fassent attention à ne pas lui rentrer dedans — par contre, l'aider ne leur venait pas même à l'esprit, sans doute parce qu'ils pensaient qu'il s'agissait encore d'une punition.

  Avec espoir, elle voyait la table se rapprocher d'elle. Elle n'était qu'à cinq pas... quatre... trois... d...

  — Par tous les dieux ! blasphéma-t-elle en se sentant basculer en avant.

  Elle lâcha d'un bras son panier, moulina intensément. Pour une fois, elle parvint à retrouver une position stable.

  — Oh ! Toutes mes excuses, je t'avais pas vu, bourgeuse.

  Si son équilibre n'était pas aussi précaire, elle se serait bien retournée vers Lièvre, qu'elle avait reconnu à la voix (de toute façon, il était le seul à oser l'appeler « bourgeuse » en face). Si bien qu'elle se contenta de marmotter une insulte, avant de poursuivre son chemin.

  Enfin, de tenter.

  Ses pieds s'emmêlèrent, elle moulina des bras. Malheureusement, elle se sentait tomber en arrière. Encore (cela en devenait vraiment lassant).

  — Âme noire ! jura-elle.

  Elle allait jurer de plus belle, toujours en pleine chute, lorsqu'elle sentit qu'on saisissait ses bras de part et d'autre.

L'Astriale - Les Ombres de l'Hiver T1 [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant