L'Astriale - Les Ombres de l'Hiver T1 [TERMINÉ]

Chapitre 26.I : Cérémonie funèbre

Nous avons constaté qu'il était de plus en plus difficile d'enterrer nos morts en toute discrétion. Ainsi, nous vous demandons l'autorisation de les brûler, pour ensuite enfouir les cendres du défunt dans la terre noire du Faucheur.
Lettre de la sénatrice Arthonya Bélier au Grand Prêtre Noir de Buulo, an 910.

𝓣éo serra la ceinture amarante de sa jeune camarade autour de sa taille. Comme Saleann était devenue Espionne depuis un bon moment, sa place avait été libérée, tout comme celle d'Emyria, qui n'avait pas retrouvée preneuse. Ainsi, ces deux places avaient été prises par les deux jeunes taureaux qui faisaient les coquettes, au grand dam de Téo.

– Ma robe est trop grande, se plaignit Zesparyn.

– Tu n'avais qu'à mieux faire tes mesures.

– Téo, tu serres trop, protesta Xylene.

Téo pinça les lèvres, contrariée, souffla un bon coup, et se força à sourire. Sadique, elle serra volontairement plus fort, avant de nouer la ceinture, tandis que Xylene lâchait une exclamation.

– Une robe de deuil se porte ainsi, déclara-t-elle sérieusement. Ce n'est pas un jour à chercher à être la plus jolie. Aujourd'hui, nous rendons hommage à Rat, c'est tout ce que nous faisons. Comme nous tous, vous avez passé du temps à travailler sur vos tenues, toutes uniques en ce jour si triste. Si elles ne vous plaisent plus, tant pis pour vous.

Elle se détourna pour attraper sa propre ceinture, agacée par l'immaturité de ses cadettes. Mais ayant l'habitude de tendre l'oreille, elle ne put qu'entendre ce que murmurait Xylene à Zesparyn, tout en l'aidant à retrousser le bas de sa robe.

– Facile à dire, quand on a une très belle robe alors qu'on est même pas jolie.

En temps normal, Téo ne faisait pas attention aux remarques sur son physique ; elle savait depuis longtemps qu'elle avait des yeux trop grands, un visage trop rond, qu'elle était trop petite et qu'elle était trop rondouillarde, d'après les autres. Tout ces « trop » ne l'empêchaient pas de s'aimer telle qu'elle était.

Alors, pourquoi le prit-elle si mal ?

Elle se tourna vivement vers ses deux camarades, et celles-ci déglutirent difficilement en voyant le regard noir de leur aînée. Téo était réputée pour être sympathique, pour autant, tout le monde savait qu'il fallait mieux éviter de lui manquer de respect. Xylene et Zesparyn semblaient avoir oubliées qu'elle était l'Apprentie la plus forte, qu'elle battait la plupart des Espions, et qu'elle était amie avec presque toute la confrérie.

– Voyez-vous, mes petites (elle accentua bien ce mot pour rappeler qu'elle était le chef de ce dortoir), vous devriez mieux garder ce genre de réflexions bien désagréables et six' patte de cheval pour vous. Moi, je ne le prends pas mal, mais cela reste un manque de respect. Et je pense que vous savez très bien que tout manque de respect à un supérieur est passible d'une punition. Croyez-moi, celles-ci sont loin d'être agréables. Maintenant, terminez vite de vous préparer, car la cérémonie commence bientôt.

Elle se détourna des deux filles, après avoir vérifié que sa tenue était en ordre, et quitta le dortoir. Elle était surprise de sa propre dureté, surtout parce qu'elle appréciait Xylene et Zesparyn, normalement. Et puis même, elle essayait d'être toujours de bonne humeur. Elle ne se comprenait plus.

Toutefois, Téo voulait avoir son espace personnel, et elle commençait vraiment à attendre avec impatience son Espionnage. En soupirant, elle compta les mois à patienter. Cinq mois, ce n'était pas si énorme, non ?

En fait si, cinq mois, c'était beaucoup trop long.

Instinctivement, elle passa ses doigts sur son bracelet d'argent. Un sourire flotta sur ses lèvres quand elle se souvint que Zesparyn, pensant que c'était un bijou, avait trouvé que c'était injuste qu'elle porte des accessoires. Du haut de ses onze ans, Zesparyn avait accepté de reconnaître que c'était incrusté dans la peau de son aînée que lorsque celle-ci l'avait laissé toucher.