Chapitre 17.IV

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  𝓙illan était tranquillement en train de s'installer à la table des Espions, ruminant sur son épreuve qui n'allait pas tarder à arriver, lorsqu'il entendit plusieurs cris de joie à celle des Apprentis. Surpris que les plus jeunes fassent autant de bruit, il chercha à savoir ce qui les mettait dans un tel état.

  – Il se passe quoi là-haut ? demanda-t-il à la ronde en haussant imperceptiblement un sourcil.

  La plupart de ses camarades haussèrent les épaules, mais leur regard était désormais attiré comme un aimant par la table aux capes bleues.

  – Je crois qu'il y a un Apprenti qui part pour la première fois en mission, mais j'en suis pas certaine, répondit Emyria en passant un doigt autour de son œil. Il me semble que c'est ce que j'ai entendu. Et c'est le genre de cris que les Apprentis poussent à chaque fois que c'est le cas.

  Serval, une Espionne s'étant unie à un Espion de la même espèce et qui avait une fille encore Apprentie, Saleann, fit signe à Jillan qu'elle lui répondrait une fois sa bouchée avalée. Son compagnon, Rat, la prit de court en répondant à sa place.

  – Sal nous a dit que Chouette s'est enfin décidée à emmener son Apprentie, la petite Téonary, avec elle, pour sa mission.

  Serval donna un coup de coude à Rat, visiblement mécontente, tandis que Zibeline, leur autre fille, leva les yeux au plafond. Mais Jillan ne put s'attarder sur cette affaire, car son voisin fit grincer sa fourchette contre son assiette. Il se tourna vers Zym, qui n'était pas de très bonne humeur, vu à quel point sa mâchoire était contractée. Ses grains de beauté à sa joue tressautaient furieusement.

  Cela n'étonna pas Jillan, même s'il en était désolé. Il savait – comme tout le monde – que Téonary et Zym ne pouvaient pas se supporter, ne cessaient d'avoir des accrochages depuis le jour où elle s'était cassée un bras. Emyria avait déjà essayé de les raisonner tous les deux, et même Jillan s'y était risqué, car il s'agissait de leurs amis.

  Mais bon, Zym avait failli lui cracher au visage, tandis que Téonary avait fit mine de se pendre (elle l'avait même mimé). Ils se vouaient une haine trop profonde pour se réconcilier, et étaient bien trop différents.

  C'était dommage, car Jillan les appréciait tous les deux. Même s'il était un peu lunatique, Zym avait toujours pris sa défense lorsqu'il était arrivé à Opaltys, avec ses problèmes de diction. Jillan ne lui avait jamais dit qu'il avait toujours du mal à lire, mais il pensait que Zym le soupçonnait, et pourtant jamais il ne s'était moqué de lui.

  Quant à Téonary, elle avait une joie de vivre et une façon de tout prendre à la légère qui était rafraîchissante. Certes, Jillan l'avait un peu utilisé, au début, mais depuis il appréciait vraiment l'entraîner. Il avait douté de pouvoir faire en sorte qu'elle soit meilleure, mais était désormais persuadé qu'elle serait un jour la meilleure.

  D'ailleurs, il l'aperçut en train de parler avec de grands mouvements, les yeux brillants de bonheur, avec ses camarades. Elle dut sentir le regard qu'il posait sur elle, car elle tourna ses iris brun vers lui, avant de lui offrir un grand sourire et de lui mimer un « merci ». Il répondit par un signe de tête, et ne put sentit une ébauche de sourire soulever le coin de ses lèvres face à tant d'entrain.

  – Au moins, on sera débarrassé d'elle pour quelques temps, marmonna Zym.

  Il devait sans doute penser que personne ne l'entendrait, ou alors il le faisait exprès pour que Jillan l'entende ; dans les deux cas, il laissa couler. Il pensait qu'il entendrait Emyria le réprimander, or celle-ci n'en fit rien.

  Surpris, il tourna les yeux vers son amie. Le regard dans le vide, elle semblait perdue dans des pensées bien tristes à son expression, pour une raison qui lui échappait.

L'Astriale - Les Ombres de l'Hiver T1 [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant