L'Astriale - Les Ombres de l'Hiver T1 [TERMINÉ]

Chapitre 31.I : ...et la naissance de l'Espionne

Provoque un Espion, protège tes secrets.
Adage populaire.

𝓔n apercevant Téo, le vieux Royle, un palefrenier des écuries de l'Académie, s'était appuyé contre sa fourche. Depuis le temps qu'il travaillait ici, mais également depuis le mois que Téo avait passé en sa compagnie suite à la punition qu'elle avait reçu de la part d'Arysia, Royle la saluait dès qu'il la voyait.

Téo le considérait comme un ami. Elle pensait la réciproque vraie, puisque Royle ne cessait de se plaindre des étudiants de l'aile est, qui ne faisaient guère attention à leur monture, à chaque fois qu'elle venait le voir.

– T'as l'air d'bonne humeur, toi, fit-il, de la paille parsemant ses cheveux grisonnant.

– Vous ne pouvez pas savoir à quel point, lui répondit-elle avec un grand sourire.

– Allez, file moi ton ch'val, ma filiotte, parce que j'vois bien qu't'as la tête dans les nuages.

– Merci !

  Elle lui confia les rênes, lui glissant par la même occasion une thene carré-argent de ses économies qu'il méritait bien, avant de récupérer son paquetage. Puis elle s'enfuit. Elle avait l'impression de voler, tant elle était en joie. Elle avait réussi son Espionnage et, en plus, Fanie Bélier en personne l'avait remerciée de son aide !

Elle avait hâte qu'Emyria l'apprenne, juste pour voir sa tête.

Depuis l'incident de l'année passée, elles avaient du mal à rester dans la même pièce sans se lancer des regards noirs. Téo ne lui pardonnerait pas, jamais. Elle était bien trop rancunière pour cela, tout comme Emyria. Sans oublier qu'Emyria l'avait provoqué (et tenté de la tuer par la même occasion) pour une raison absurde. En plus, cet accident lui avait donné de nouvelles cicatrices dans le dos, qui l'avaient fait grimacer pendant plusieurs jours après leur apparition.

Téo n'était pas idiote, elle savait qu'elle avait été droguée pour ne pas sentir les coups. Elle était même persuadée que l'anesthésiant utilisé avait été fabriqué par elle, quelques jours auparavant, tandis qu'elle travaillait avec Nylo.

Une fois, quand elle était seule, elle avait essayé d'observer son dos dans le reflet du miroir. Les marques, visibles sur sa peau claire et fine, ne s'effaceraient jamais, mais cela ne la dérangeait pas plus que cela.

Téo faillit rentrer dans deux étudiants sortant de l'Académie. Tandis qu'ils l'insultaient, elle se glissa entre-eux, sans cesser de courir. En montant les escaliers, sous le porche, elle manqua de tomber, déséquilibrée par le poids qu'elle portait, mais ses entraînements lui permirent de poursuivre sans même s'arrêter une seule seconde.

Elle avait chaud, ce qui la surprenait un peu : elle était à Opaltys, en début Geminer, et l'été n'était pas encore là. Mais après, il était vrai que le climat dans la Cité de l'Opale était plus doux que celui de la Cité d'Argent. Ce qui ne changeait rien au fait qu'elle sentait tout de même la sueur couler dans son dos. Elle n'en avait que faire : elle nageait en plein bonheur, à peine fatiguée par sa course.

Juste avant d'ouvrir la Porte des Secrets, Téo pénétra dans le laboratoire-salle de classe de Nylo, et poussa si fort la porte qu'elle crut quelques instants qu'elle l'avait fait sortir de ses gonds. Heureusement, il n'en fut rien.

– C'est quoi encore que ce boucan ?

Nylo sortit de son bureau, l'air mauvais. Téo ne put s'empêcher d'ouvrir les bras en grand, théâtrale.

– C'est moi, chantonna-t-elle. Tu sais, la meilleure élève que tu as jamais eue, celle que tout le monde rêve d'avoir.

Nylo la dévisagea, cilla plusieurs fois.