"Quand le puits est sec, on connaît la valeur de l'eau."
Benjamin Franklin (1706-1790)
(Alice)
Décidément, je ne comprends plus rien. On devait aller chercher Bellatrix vers 14h à l'hôpital puis dans la matinée, quand on a voulu prendre de ses nouvelles, on a été informé que finalement c'était sa mère qui venait la récupérer pour une hospitalisation en psychiatrie. Mais quand on a appelé cette dernière pour en savoir davantage, celle-ci nous a appris qu'effectivement, suite à cet acte insensé de tentative de suicide, elle avait opté pour cette solution.
Ghislain a eu beau lui dire être persuadé que ce n'était pas elle qui avait pu se faire cela, elle n'en n'a rien cru et était même excédée. Dans sa fureur, elle a même demandé à mon nouvel ami de ne plus s'approcher de sa fille car il l'avait extrêmement déçue. Non mais je rêve ! Où était-elle quand, pendant des mois, sa fille a été dominée, harcelée et violée par l'un de ses professeurs ? Pourquoi n'a-t-elle rien vu ? Pourtant une enfant qui ne va pas bien, normalement cela se voit !
Cette fois, j'étais très en colère et cela n'allait pas se passer comme ça. Mais comment aider Bellatrix alors que nous n'avions jamais pu l'avoir au téléphone, l'hôpital refusant de nous la passer ?
Mais lorsqu'à midi, alors que je me trouvais avec Bérangère à table et que nous allions attaquer le repas que j'avais ramené de l'extérieur, sous le prétexte de ne pas lui imposer tous les jours une corvée, ne voilà pas que la mère de Bellatrix a débarquée comme une furie.
- Où est ma fille ? Je la ramène à la maison !
- Mais pourquoi vous dites ça ? Elle est encore à l'hôpital !
- Non, elle n'y est plus. Elle s'est enfuie.
- Hein ? Mais qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
- Oh, ne faites pas l'innocente, je sais que vous l'avez aidée.
- Mais pas du tout ! Et maintenant que je vous vois, je voulais même vous donner mon avis sur le choix que vous avez fait !
- Vous l'appelez ou je monte la chercher moi-même ?
C'est alors que Bérangère a enfin pris la parole. Car si elle était restée silencieuse jusqu'à maintenant, elle avait suivi avec intérêt les propose de cette mère plus que nerveuse.
- Madame Bouschet, je vous en prie, assieds-vous un instant. Je crains que l'émotion ne vous fasse avoir un malaise et cela ne serait vraiment pas le moment. Vous ne croyez pas ?
- Mmm
Après avoir grommelé, la visiteuse obéit à contre cœur.
- Tenez, je viens de nous concocter une boisson naturelle à base de plantes, c'est un délice. Je vous en sers un verre tandis que vous nous expliquez tout cela. Pour ma part, je peux vous assurer, que je suis la première surprise. Car si, d'ores et déjà, je ne savais pas que vous aviez choisi de retirer votre fille de ma colocation intergénérationnelle, je peux vous assurer qu'elle n'est point revenue ici. Je n'aurais pas pu la manquer.
- Alors elle est forcément avec Ghislain !
- Mais son frère travaille. Comment aurait-il fait pour s'absenter sans que personne ne s'en rende compte ? Car je suppose que la police a été prévenue de cette disparition.
- Oui, oui, bien sûr.
- Je suppose que vous allez dire à votre fils de rentrer, lui-aussi, chez vous ?
Au silence prolongé, j'ai senti que la mère de Bellatrix hésitait entre dire la vérité et s'en tenir à ce que la vieille savait déjà. J'ai croisé les doigts car si elle avouait qu'il n'était rien pour elle, c'était sûr, je serais toute seule pour continuer cette enquête qui semblait une nouvelle fois s'épaissir.
- Non, non, je n'ai aucune raison de lui demander de rentrer puisqu'il n'est sans doute pour rien dans les gestes désespérés de sa sœur. Les études ont dû être trop dures pour elle et elle aura voulu se punir elle-même.
- Pourquoi dîtes-vous cela ? Ça lui est déjà arrivée par le passé ? Parce qu'ici, je la trouvais bien, moi. Nous étions même parvenues à sympathiser.
- Oui, oui, quand elle était au collège, parfois elle revenait avec des drôles de marques sur la peau mais elle se taisait. Au début, j'ai cru que c'était quelqu'un qui lui faisait du mal et puis une fois, alors que sa porte de chambre était mal refermée, j'ai entrouvert et je l'ai vu se fouetter devant sa glace.
Pour moi, qui connaissait désormais toute la vérité, j'étais outrée par tout ce que j'entendais. Vraiment, Ghislain avait bien fait de la prendre sous son aile, même si je persistais à penser que leur relation était malsaine.
Peu à peu son agressivité se calma et tandis que son hôte se chargeait de la rassurer, je pus constater l'effet qu'avait eu l'infusion sur Madame Bouschet.
Bientôt, elle prit congés, douce comme un agneau. Alors là, cela me confirmait bien à quel point la vieille maitrise les plantes.
Cette dernière, sentant probablement mon air suspicieux, ne put s'empêcher de se défendre en m'annonçant que vu l'énervement de cette femme, elle avait trouvé normal de lui faire boire une bonne infusion de houblon, pavot, jasmin, tilleul, camomille, fleur d'oranger, et mélisse.
- Whouah, avec tout ça, si elle ne dort pas comme un bébé !
Bref, une fois remontée dans ma tanière, je réfléchis en faisant les cent pas, suivie de près par mon Voldemort.
Où a bien pu passer Bellatrix ? Non mais c'est dingue cette histoire ! Je n'ai pas pris la peine d'appeler Ghislain au travail car je ne voudrais pas le perturber plus que de raison. D'autant qu'ayant prévu d'aller chercher sa sœur de cœur, il a posé son après-midi. Il ne devrait donc pas tarder à rentrer.
Et pour une fois que le repas était censé être sans danger, ne voilà pas que je n'ai plus pu avaler une seule bouchée. Tout cela me contrarie très fortement. Que s'est-il réellement passé dans cet hôpital ? Fugue ou kidnapping ? Si elle avait choisi la première solution, pas de doute qu'elle nous aurait appelé. De cela, je n'en doute pas un instant. Et si elle a été kidnappée, c'est pour la faire taire ! Et quand on sait qui a beaucoup à perdre dans cette histoire, je me doute de qui cela peut être mais alors, elle est sacrément en danger.
En bonne détective privée, je fonce dans la chambre de Bellatrix car si elle a été victime d'enlèvement, voir pire, forcément quelqu'un viendra ici fouiller à la recherche d'une preuve compromettante. Une fois devant la porte, je constate que celle-ci est évidemment fermée à clés. Mais une fois n'est pas coutume, m'inspirant d'un film d'espionnage regardé depuis peu, je décide de crocheter cette damnée porte. Pour cela, je chope une de mes pinces de cheveux et l'enfourne dans la serrure. Je tatillonne un petit moment. Merde, c'est plus simple à la télé que dans la vraie vie ! Mais au moment où je vais renoncer, clic, le petit miracle se produit ! Je ne perds pas de temps car déjà, j'entends un bruit de pas plus rapide que ceux de Bérangère, dans les escaliers. Serait-ce Ghislain ? Mais dans le doute, je préfère fermer la porte. Et je fais bien, car bientôt j'entends la chambre du bout du couloir s'ouvrir. Etrange ! Qui est entré chez Bérangère ?
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La musique maléfique...
Mystery / ThrillerBellatrix est une brillante étudiante qui a toujours baigné dans le monde des livres. Pour parvenir à ses objectifs professionnels, elle surenchérit encore et toujours. Une vie sentimentale ? Aucune ! Une vie de famille épanouie ? Que nenni ! Des lo...