Chapitre 8.3

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Quand j'ouvre les yeux ce matin, c'est pour recevoir les soins. Et dans mon cas, à moi, c'est plutôt bref : une prise de tension, la température puis le changement du pansement qui m'a été fait, la veille aux urgences. S'ils ont été surpris par ma plaie, ils n'en n'ont rien dit et se sont contentés de me recoudre. En revanche, comment expliqué cet état de trans dans lequel mes amis m'ont amenée ? Evidemment, ils m'ont fait des prises de sang mais je n'ai eu aucun retour.

Aussi, je demeure sur mes gardes, lorsque peu de temps après que l'on m'ait apporté le plateau de mon petit déjeuner, je vois débarquer deux policiers en civil. Toutefois, le brassard fluo qu'ils viennent de se passer autour du bras me renseigne suffisamment. Heureusement, on m'a installée dans une chambre seule. J'observe tour à tour ces deux mecs qui n'ont, selon moi, pas la gueule de l'emploi.

Le premier, belle gueule, la trentaine, en jean et blouson polaire, le second, un peu plus enrobé, et au visage plus antipathique, vêtu d'un pantalon de toile et d'un pull bleu marine, m'observent un instant avant de m'adresser la parole.

- Mademoiselle Bellatrix Kariloumi ?

- Oui

- Que s'est-il passé pour que vous soyez dans cet état ?

- Quel état ?

- Lorsque vous êtes arrivée aux urgences, vous étiez totalement dans un état second et vous aviez été poignardée.

- Ah bon ?

- Vous ne vous souvenez pas ?

- Absolument pas. Je sais que je suis rentrée fatiguée de ma journée et je suis allée m'allonger.

- C'est tout ?

- Oui. Je me suis endormie quelques heures et lorsque je me suis réveillée, j'avais cette plaie qui ne me faisait absolument pas souffrir. Je ne m'en serais d'ailleurs pas rendue compte, si mes amis, ne m'avaient pas soulevé le maillot tâché.

- Vous n'étiez pas seule quand c'est arrivé ?

- Si mais comme j'étais bizarre, je suis allée voir mes amis, qui se sont inquiétés en me voyant de la sorte.

...

- J'ai bien une idée de ce qui s'est passée mais je doute que vous ne me croyiez.

- Allez-y, dîtes-nous.

- Je pense qu'il s'agit d'un fantôme qui m'aurait fait ça !

A voir la tête qu'ils font, pas de doute qu'ils se demandent si la mienne est bien d'aplomb ou si je ne me fous pas d'eux. Mais que leur dire d'autre ? Je ne vais tout de même pas leur demander s'ils ont trouvé un cadavre à la maison quand même.

- Comment expliquez-vous votre état et le fait que l'on ne vous ait rien trouvé dans le sang ?

- Je vous l'ai dit. Je ne me souviens de rien.

- Vous vivez en co-location, c'est bien ça ?

- Oui, co-location intergénérationnelle, pourquoi ?

- Et bien votre mère va venir vous chercher.

- Vous l'avez prévenue ?

- Bien entendue. Même si vous ne logez actuellement plus chez vous, elle est en droit d'apprendre ce qui vous est arrivée.

- Mais je suis majeure !

J'ai dû quelque peu m'emporter, car le plus moche s'empresse de me remettre à ma place.

- Ouh la, calmez-vous ou nous finissons cette petite conversation au poste de police.

A ces mots, je me mure dans un silence. Il faut absolument que je prévienne Ghislain et qu'il vienne me chercher. Je ne veux pas revenir chez ma mère ! Pour me débarrasser de ces flics, je feins de m'assoupir et au bout de quelques minutes ma supercherie fonctionne.

- Franchement, elle n'est pas nette cette nana. Si j'étais sa mère, je la ferais directement interner. Tu veux me dire pourquoi on est venu ?

- C'est le procureur, il est obsédé par ces corps automutilés.

- L'affaire des plantes multicolores ?

- Oui c'est ça !

Mais je n'en entends pas davantage. Ils ont, hélas, déjà quitté ma chambre. Alors, je m'empare de mon téléphone resté sur la table de nuit et j'appuie sur le raccourci de mon frère de cœur.

Une sonnerie, puis deux puis trois... puis plus rien ! Je me rends compte avec effroi que je n'ai plus de batterie et que mon téléphone vient de s'éteindre. C'est toujours comme ça ! Au plus mauvais moment !

Heureusement, une infirmière vient me retirer la perfusion que j'avais encore au niveau du bras. Et dès qu'elle est ressortie, je me lève et fonce jusqu'au petit placard. Là, je retrouve mes fringues, qui, même si elles sont en piteux états, sera toujours mieux que cette chemise de nuit qui ressemble plus à une tenue de stage pour naturiste qu'à autre chose.

Une fois prête, je sors à pas de loup dans le couloir et comme si j'étais dans un film, je marche tranquillement, comme si tout cela était tout à fait normal. Effectivement ça fonctionne puisque lorsque je croise du personnel médical, tellement occupé par ses diverses tâches, personne ne fait vraiment attention à moi.

Ouf, ça y est, je suis enfin dehors ! On ne dirait pas, mais lorsque l'on se retrouve dans ces bâtiments hospitaliers, la chose qui nous semble la plus importante, c'est d'en sortir et du coup, oui, l'air nous semble plus pur car c'est le symbole de la liberté retrouvée.

Cela fait quelques minutes que je me dirige vers les arrêts de bus, en traversant le grand parking hospitalier quand bientôt, une fourgonnette s'arrête à ma hauteur. Je n'ai pas le temps de dire un mot, qu'une silhouette dissimulée dans une tenue de camouflage noire surgit devant moi et m'entraîne de force dans ce véhicule. De sa cagoule, je n'aperçois que ses yeux et me mets à frissonner. Là, quelqu'un me réceptionne avec une étoffe qu'il me met directement sur le visage. Je lutte pour respirer. Non, non, je n'y parviens plus... pitié !

Lorsque je reprends connaissance, je me retrouve totalement nue et attachée sur un vieux lit d'une place. La personne qui s'occupe de me refaire mon pansement, je ne la connais pas... et pourtant j'ai vraiment une impression de déjà vue. Tout cela est totalement étrange. Alors que je veux lui demander la raison de mon enlèvement et pourquoi je suis en tenue d'Eve, je me rends compte que j'ai également un bâillon dans la bouche. Mon Dieu, que va-t-il m'arriver encore ? Finalement j'aurais dû rester tranquille dans ma chambre d'hôpital. Si seulement, je pouvais revenir en arrière....

La pièce est petite. C'est propre mais extrêmement de petite dimension. J'en arrive à la comparer à une cellule de prison et d'après ce que j'en ai vu à la télé, je dirais qu'ici c'est sûrement plus petit. D'ailleurs, hormis le lit sur lequel, on m'a installée, il n'y a qu'un WC, un lavabo, une mini table et sa chaise. Oups, il y a également une caméra qui surveille l'intérieur de ma cellule car maintenant j'en suis sûre. Je me trouve dans une sorte de prison. Mais qui a intérêt que je disparaisse ? Le compagnon de ma mère ? Mon ex tortionnaire ? La proprio du manoir ? Je ne sais pas, ne sais plus. Mais déjà, celle qui me refaisait mon pansement me fait une piqure avant de se retirer. Je suis de plus en plus fatiguée. Non, elle m'a droguée... A l'aide !!!

La musique maléfique...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant