"L'amour fait passer le temps, et le temps fait passer l'amour."
Proverbe italien
(Charles Henry)
27 mai 1995
- Mesdames et messieurs nous sommes ici réunis pour célébrer le mariage de mademoiselle Bérangère Dolanjiani et de monsieur Charles-Henry Del Castelix. Mademoiselle, monsieur, avez-vous fait un contrat de mariage ?
- Non
- Non
- Nous allons vous donner lecture de la première partie de l'acte de mariage. Les mariés, voulez-vous vous lever. Chapitre 6 du code civil....
Je suis tellement heureux d'enfin pouvoir m'unir à celle qui a fait battre mon cœur depuis maintenant si longtemps. Mais parfois l'amour ne fait pas tout et je suis hélas bien placé pour le savoir. Car si nous sommes sûrement considérés, par beaucoup des personnes ici présentes, comme des vieux qui se marient sur le tard, avec Bérangère, on s'est connus au contraire, très jeunes.
- Nous allons procéder au consentement des époux. Le 27 mai 1995, à 14h, à Ecully, devant nous est comparu publiquement dans la maison commune, Charles-Henry Roger Del Castelix, gynécologue, né le 6 juillet 1933 à Lyon, domicilié à Ecully, fils de Henry, Serges, Robert, Del Castelix architecte et de Huguette Marie Sophie De Ponceau, retraitée, domiciliés à Charbonnières-les-Bains.
Bérangère, Mathilde, Geneviève Dolanjiani, infirmière, née le 1er novembre 1934 à Champagne au Mont d'Or, domiciliée à Ecully, fille de René, Cathelin, Bernard Dolanjiani, cadre SNCF et Josette, Mallaury Chichoulin, femme au foyer. Sur notre....
Mes premières années à l'école, se sont faites dans une ambiance un peu particulière avec cette fameuse guerre 39-45. A cette époque, la rentrée avait lieu le 1er octobre ou ce qui s'en rapprochait le plus, si c'était un dimanche. La grande cour avec des platanes qui nous servaient de repaire à la récré, était séparée de celle des filles. Oui elles n'allaient pas dans les mêmes classes que nous les garçons ! Pourtant, très vite, de loin, j'ai repéré cette blondinette avec ses tresses. Il m'a fallut attendre quelques années, avant de découvrir qu'elle s'appelait Bérangère.
Pour la première année d'école primaire, point de cartable, mais une petite mallette contenant le goûter de la récré. Je me souviens de l'institutrice, Mlle Firmand. Chaque matin, le rituel était le même : on se mettait en rang au son de la cloche, dans le silence, et on entrait respectueusement. Dans la classe, il y avait deux divisions, ce qui nous permettait d'écouter les plus grands. Le par cœur et le calcul mental étaient les bases de l'enseignement et, bien entendu, les fameux devoirs.
Comme nous habitions le même quartier, ce fut vers sept-huit ans que nous avons commencé à nous côtoyer, en douce de nos parents. Cela ne durait que le temps du trajet qu'il nous fallait pour rentrer de l'école.
En classe, ça filait droit : Après avoir rangé nos vestes ou manteaux au vestiaire, et pris une blouse (obligatoire) c'était la marche en rang d'oignons vers la classe. Sagement nous attendions l'ordre de la maîtresse pour nous asseoir. Chacun devant son pupitre, nous sortions alors notre porte-plume, le cahier sans oublier l'indispensable livre de lecture. A cette époque, les livres, cahiers, et crayons restaient en classe. Point de cartables ou sacs à dos lourds comme aujourd'hui donc, une semi-liberté, à la sortie des classes, que nous mettions largement à profit.
- consentez-vous à prendre pour époux Charles-Henry Roger Del Castelix ?
- Oui, je le veux.
- Charles-Henry Roger Del Castelix consentez-vous à prendre pour épouse Bérangère, Mathilde, Geneviève Dolanjiani ?
- Oui, je le veux.
(applaudissements)
- Au nom de la loi, nous déclarons que Bérangère, Mathilde, Geneviève Dolanjiani et Charles-Henry Roger Del Castelix sont unis par le mariage.... Vous pouvez embrasser la mariée.
Tous, très attentifs à la leçon de morale journalière, nous apprenions le sens civique, c'est à dire comment on doit se comporter dans la vie, vis à vis de nos amis, parents, gens rencontrés dans la rue,
Puis c'était la séance d'écriture, sur un cahier à la réglure Sieyès*, avec des lignes et espaces,
Très appliquées nous entreprenions de remplir notre page de lettres bien formées, écriture penchée obligatoire, avec des pleins et des déliés, gare aux taches d'encre, car il était très difficile de remonter le délié sans faire un gros plâtras. Nous nous servions de nos buvards pour éponger le surplus d'encre.
Du plus loin que je me souvienne, dès que j'ai su écrire, j'ai crayonné son prénom ça et là sur des feuilles volantes. Pour moi, il était clair qu'elle était mon amoureuse et que c'était avec elle que je me marierais, plus tard. Après notre réussite au certificat d'étude, examen, à l'époque qui ouvrait ses portes, vers un bel avenir professionnel, je lui ai même volé un baiser !
Ce fut hélas, le seul avant longtemps car tous deux avions des études à poursuivre... Nous nous sommes en effet, quelque peu perdus de vue pendant une dizaine d'années... Le temps, pour moi, de faire médecine. A cette époque, c'était reconnu comme le métier le plus prestigieux. Et pour mon père, il était impensable de se contenter d'être généraliste. C'est ainsi que je suis devenu gynécologue. Non pas, pour le plaisir de découvrir tous ces sexes féminins, mais bel et bien pour le privilège de donner la vie, même si parfois, celle-ci m'échappait et emportait dans la tourmente un petit bout de chou.
Le destin est parfois fait de petites choses. C'est ainsi que nous nous sommes tous deux retrouvés, un matin d'octobre 1961, dans une maternité lyonnaise où je venais d'être nommé et où exerçait depuis quelques années, Bérangère.
Si à l'époque de l'école, je la trouvais belle, ce premier jour, dans son uniforme médical, je l'ai trouvée ravissante. Dés que j'ai pu, je l'ai invité à boire un café. Ce fut pour nous, l'occasion de nous rappeler de cette belle époque, malgré le temps de guerre. Puis, nous nous sommes très vite rapprochés. Malheureusement pour moi, mademoiselle était déjà fiancée et j'ai dû me battre très durement pour ne l'avoir qu'à moi. Il faut dire que mon métier, avait nettement joué dans la balance, quand Bérangère eut appris à ses parents, avoir rompu avec le cadre automobile pour se mettre avec un médecin !
Notre amour fut passionnel et entier. Je nous voyais déjà entourés de cinq ou six bambins que j'aurais personnellement mis au monde. Et alors que nous avions déjà fixé la date de notre mariage pour l'année suivante et avions emménagé depuis seulement quelques mois, voilà que la tempête émotionnelle s'en est prise à notre couple.
*la réglure Sieyès est le quadrillage que nous retrouvons sur les cahiers.
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La musique maléfique...
Mystery / ThrillerBellatrix est une brillante étudiante qui a toujours baigné dans le monde des livres. Pour parvenir à ses objectifs professionnels, elle surenchérit encore et toujours. Une vie sentimentale ? Aucune ! Une vie de famille épanouie ? Que nenni ! Des lo...