A mon retour, rien n'était plus pareil dans cette maison. Je ne supportais désormais plus du tout le comportement de Bérangère. Heureusement, je ne la voyais plus beaucoup. D'autant qu'elle et son mari faisait désormais chambre à part.
Je me demande pourquoi je n'y ai jamais pensé avant, mais sachant qu'ils n'avaient pas d'enfants, j'ai bientôt estimé que la moindre des choses, serait qu'ils me couchent sur leur testament... Un prêté pour un rendu.
Entre deux contrats de travail, je me montrais gentille et affectueuse envers Charles-Henry. Et comme il aimait passer du temps avec moi, cela facilitait d'autant plus mon approche. C'est ainsi qu'un jour, alors que nous étions allés nous promener au célèbre parc de la Tête d'Or, à Lyon, j'abordais le sujet.
- Avec ta femme, vous avez déjà prévu ce que deviendront vos biens immobiliers lorsque vous serez morts ?
- Voilà bien une drôle de question de la part d'une si jeune femme !
- Jeune, jeune, tu es gentil mais hélas, les années passent tellement vite ... Je te rappelle que je suis tout de même une trentenaire. J'hésite à signer un contrat d'assurance décès...
- Toi ? Mais tu n'y songes pas. C'est trop tôt.
- Ah bon, tu crois ?
Je jouais la fille naïve et même si cela ne m'avais, en réalité, jamais effleuré l'esprit, il me fallait un sujet pour amener la conversation là où je le souhaitais.
- Et toi alors ? Vous en avez une ?
- Si nous n'avions pas été si proche, j'aurais trouvé déplacé de ta part de m'interroger sur un tel sujet. Mais je te considère un peu comme ma fille alors je vais te répondre. Oui effectivement, nous avons depuis quelques années, chacun, une assurance décès. Ainsi, le premier qui partira, ne laissera pas trop de dépenses pour les frais d'obsèques.
- Tu te rends compte, si malheureusement, c'était toi ?
- Je suis conscient que la situation ne serait pas simple, d'autant que je trouve que Bérangère perd de plus en plus la jugeotte. Je l'aime encore, mais elle est tellement étrange parfois que cela me fait peur.
- Tu ne crains pas qu'un jour, elle puisse s'en prendre à toi ?
- Non, elle ne pourrait pas !
- Permets moi d'en douter. Je sais qu'ici c'est toi le docteur mais tu sais comme moi que parfois les sentiments empêchent un bon diagnostic. En tout cas, il est certain que si c'est toi qui, un jour, vient à décéder en premier, elle ne perdra pas de temps à me foutre dehors.
- Non, elle ne pourrait pas !
Quel naïf ! En vieillissant, se voiler la face était, pour lui, le meilleur moyen de vivre à peu près normalement avec une dingue à ses côtés. Je ne pouvais pas insister davantage car cela aurait pu lui sembler louche. Mais après cette conversation, il devrait forcément cogiter à tout cela. Si notre balade auprès des animaux se poursuivit, elle se fit dans un silence absolu.
Une semaine plus tard, je fus appelée pour un film qui se déroulait à Montpellier. Agréable pause car décidément ces deux vieux commençaient à me fatiguer. Quelques fois, j'aurais bien tout laisser tomber. Mais il ne fallait pas se leurrer. Jamais je ne pourrais m'offrir une telle demeure, à seulement une dizaine de kilomètres de Lyon. Cela vallait bien encore quelques sacrifices ! C'est ainsi que je suis allée jusqu'à les inviter dans l'appartement que je louais sur place. Comme je l'avait dit à mon nouveau père d'adoption, ça leur ferait des vacances. Effectivement, à ma plus grande surprise, ils acceptèrent tous les deux et les voilà bientôt à déambuler dans le cœur de la préfecture héraultaise tandis que je m'activais au travail. Le soir, à mon retour, ils sont heureux de me raconter ce qu'ils avaient fait. Je fus surprise de constater à quel point ce séjour leur redonnait la pêche.
Si évidemment, Bérangère ne jurait que par la célèbre place de la Comédies et ses magasins, Charles-Henry, lui, m'avoua préférer, se balader sur les bords de la Méditerranée. Je ne doutais pas, que seul, il aurait investi dans un pied à terre du côté de Palavas les flots.
Pour moi aussi, bénéficier tous les jours du soleil et d'un beau ciel bleu en permanence était fort agréable. Puis mon contrat s'est achevé et nous sommes tous rentrés à Limonest. L'ambiance y était encore plus froide qu'avant. C'était comme si, quelque chose avait été cassé.
La vieille bique était encore plus sur mon dos et quand j'étais avec son mari, elle faisait son possible pour nous rejoindre. J'en vins à croire qu'elle était jalouse de cette relation quasi paternelle que nous avions développée. Le summum fut atteint, alors que nous entamions notre repas dominical. Charles-Henry prit la parole.
- Nous ne nous faisons plus très jeune, tu es d'accord avec ça, ma chérie ?
Comme cette dernière se contenta de hausser les épaules, il enchaîna.
- Je considère depuis maintenant assez longtemps, ma cousine, comme la fille que je n'ai jamais eue. Or, le jour où nous serons tous deux disparus, l'état gardera une grande part de nos biens et alors qu'elle est de ma famille, Elyne ne touchera qu'une poussière de notre fortune. J'ai donc décidé de la coucher sur notre testament !
Tiens, tiens, j'étais ravie de constater que notre petite conversation n'a pas servie à rien. Mieux encore, comme je ne lui en ai pas reparlé, il était tellement persuadé de ma bonne foi qu'il avait fini par aboutir tout seul là où je le voulais. Mais je n'eus pas le temps de me réjouir car déjà, son épouse se leva d'un bond. Tandis que ses yeux semblaient lancer des éclairs, son visages angulaire et ridé paraissait totalement crispé.
- Jamais ! Tu m'entends, jamais je ne tolèrerais, de mon vivant, que tu ne mettes cette garce sur notre testament. Je sais pertinemment qu'elle n'est pas ta petite cousine ! Tu as vraiment cru que j'allais gober toutes les balivernes que tu me fournissais ? J'ai engagé un détective privé et il n'a trouvé aucun lien de parenté.
- Hein ? Comment as-tu pu faire ça ?
- Quand mon mari s'offre une petite pute sur un plateau d'argent, je me renseigne sur elle, c'est normal. Je n'ai rien dit car si ça te permettait de te sentir viril, je n'avais que fiche que tu t'envoie en l'air avec elle...
- Mais ça ne va pas ? Vous êtes vraiment tarée ma pauvre ! Vous croyez vraiment que je me prostituerais pour simplement avoir droit à une chambre dans votre demeure, qui au demeurant, se décrépit autant que vous ?
- Que t'arrive-t-il Bérangère, je ne te reconnais plus ? Ne sois pas stupide, le démon de midi cela fait longtemps que cela m'a passé. Par contre oui, j'ai toujours rêvé d'avoir un enfant et ça, je te l'ai souvent dit. Alors quand j'ai fait la connaissance de Elyne, j'ai voulu me convaincre moi-même qu'elle aurait pu être une arrière cousine.
- Pfff ce n'est qu'une arriviste !
- De la part de quelqu'un qui a renié sa propre famille, c'est un peu gonflé, je trouve !
- Je ne vous permets pas !
- De quoi tu parles Elyne ?
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La musique maléfique...
Mystery / ThrillerBellatrix est une brillante étudiante qui a toujours baigné dans le monde des livres. Pour parvenir à ses objectifs professionnels, elle surenchérit encore et toujours. Une vie sentimentale ? Aucune ! Une vie de famille épanouie ? Que nenni ! Des lo...