Chapitre 3.3

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C'est en entendant les escaliers qui mènent à la chambre-grenier, grincer que Bellatrix émerge de sa bulle. Sans un mot, elle se lève, se rhabille et sort prendre une douche dans la salle de bain que nous avons en commun dans le couloir.

Pour ma part, mal à l'aise, je retourne dans ma chambre. Comme j'aimerais vraiment l'aider à se soigner. Mais pour cela, vers qui pourrait-elle se tourner ? Un psy, un gynéco ? Qu'est-ce que j'en sais, moi ? Je ne sais pas si cela pourrait être considéré comme un toc, mais en attendant, elle a un vrai rituel pour cela. En attendant, si un jour, je rencontre le grand amour et que je ne veuille plus l'aider, je ne sais pas ce qu'elle est capable de faire.

A 20 heures précises, je descends à la salle à manger. Je suis surpris d'y trouver d'ores et déjà toutes ces dames au grand complet. Bellatrix semble avoir suivi mon conseil puisqu'elle est en grande discussion avec Alice... bien évidemment sur des histoires de fringues. Notre hôte semble détendu car elle est plus souriante que ce matin. Cela est probablement dû au fait d'avoir du monde à sa table. Après une assiette de salade, nous avons droit à un salé aux lentilles qu'elle a, semble-t-il, fait mijoter durant de longues heures. Puis, après de la cervelle de canut, nous nous contentons de fruits et la félicitons pour ce si bon repas.

Comme c'est moi qui suis de corvée vaisselle, ce soir, je me retire de la table et m'acquitte de cette tâche ingrate. Pendant ce temps, ces dames se décident pour prendre un café sur la terrasse de derrière, histoire que le félin puisse prendre l'air.

Personnellement, cette journée m'a épuisé, donc après ma vaisselle, je passe leur souhaiter une bonne nuit à toutes puis me retire dans ma chambre. Avant de me coucher, je passe par la salle de bain car j'ai bien besoin de me prendre une bonne douche. Puis, une fois au lit, je m'allonge et m'endors aussitôt... Enfin, pas pour longtemps puisque déjà, je suis réveillé à minuit par d'étranges bruits, qu'évidemment, je n'identifie pas. Là, tout de suite, j'ai du mal à supporter une telle obscurité. Je trouve cela étouffant. Et tel que je me connais, je ne vais pas manquer, d'ici peu, à m'imaginer des choses qui n'auront pas lieu d'être.

Je dois reconnaître n'avoir jamais été un mec très courageux. J'ai peur des araignées, des serpents, et des fantômes... Si, si, pour moi, ces derniers existent vraiment. J'aime cerner les gens et je me rends compte que pour l'instant, tout le monde demeure un mystère en ce lieu. Suis-je certain de seulement bien connaître Bellatrix ? Ai-je eu raison de l'entraîner avec moi ici ?

Tandis que règne autour de moi, cette atmosphère étouffante, les bruits confus mais réguliers ont fait place à d'autres plus crispants que je ne parviens toujours pas à identifier. Je ressens soudain un besoin de respirer, plus fort que tout. J'allume la lampe de chevet la plus près de moi. Ouf, je me sens mieux. Puis, je me lève et je décide d'ouvrir la fenêtre puis son volet. Tout, plutôt que de demeurer plus longtemps dans la noirceur de cette pièce qui m'entraine dans les tourbillons d'une imagination beaucoup trop développée lorsque la couardise s'invite à mes côtés. Qui me dit, que cette pièce n'a pas été l'objet d'un funeste assassinat bien sanglant et que cela aurait été pour effacer toute trace de ce massacre, que cette chambre aurait été refaite de A à Z ?

Bientôt, un brusque mouvement d'ailes me fait sursauter, avant que je ne remarque ces chauves-souris qui ont entamé un ballet aérien désordonné, avec, en arrière-plan, cette pleine lune qui doit être la cause de mon insomnie... A moins que ce ne soit cette silhouette qui se faufile jusqu'au portail et prend la fuite ? Vu la haute taille de cette personne, cela ne peut être aucune des trois femmes qui vivent désormais ici. Mais alors qui ? Alice aurait-elle un amant secret ? C'est encore cela qui me semble le plus logique.

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Ce lendemain matin, autant dire que le réveil est douloureux pour moi car je n'ai quasiment pas fermé l'œil de la nuit et ne me suis rendormi qu'aux alentours de 5 heures. Mais alors que nous sommes samedi et que j'aurais pu faire une bonne grasse matinée, il a fallu que Bellatrix rentre dans ma chambre et se mette à me siffler dans les oreilles, histoire de me sortir des bras de Morphée.

Serait-ce dû au lieu où nous sommes ou au fait que ma patience a véritablement ses limites ? Car depuis quelques jours, j'ai de plus en plus de mal à supporter ses manières avec moi. J'en viens à regretter de lui avoir proposé de me suivre dans cette aventure intergénérationnelle. J'avais enfin la paix depuis que j'avais trouvé ce boulot et ne voilà pas qu'elle me manquait et que je ressentais un besoin fou de la revoir et de repartager ma vie avec elle. Je ne sais même pas si entre frères et sœurs, une fois adultes, les autres agissent comme ça. Notre relation est tellement bizarre...

- Allez, lèves toi, il y a des choses étranges qui se sont produites cette nuit !

- Mmm, je veux encore dormir.

- Tu te recoucheras après. Mais viens, je t'en prie, ça me fiche la trouille, tout ça.

- Merde, crotte, zut, tu as intérêt à ne pas m'avoir coupé mon sommeil pour rien.

Et tandis que j'enfile mon peignoir, elle me précède dans les escaliers. Une fois parvenus sur la terrasse de derrière, je découvre l'adjudant-chef et Alice qui se tiennent debout, comme figées par ce qu'elles viennent de trouver.

C'est alors en baissant le regard, que je découvre une dizaine de cadavres de chauves-souris. Les pauvres ! Je ne sais pas qui leur a fait ça, mais ce massacre n'est pas innocent. Puisque dans cette gigantesque flaque de sang, leurs corps ont été disposés pour reproduire une flèche qui montre le petit kiosque qui se dresse un peu plus loin à la limite du verger et de cette grande terrasse.

Je ne comprends pas pourquoi on s'en est pris à ces petits mammifères protégés en France. D'autant que vu la forme de leurs petits cadavres, la personne qui a fait ça, les a tués, tandis qu'elles étaient au repos, pendues à l'envers. Serait-ce pour cela qu'il y en avait tant cette nuit qui volaient autour de nous ? Ou est-ce comme ça durant toute la belle saison ?

- Je ne comprends pas qui a fait cela ? Alors qu'il y a tant de moyens de les faire dégager plus loin si elles dérangent ! S'exclame Alice.

- Tu as raison, mais regarde, elles ont été abattues alors qu'elles étaient au repos.

- Pourquoi s'être amusé à dessiner une flèche avec leurs cadavres ?

Nous en sommes là de toutes nos interrogations quand soudain la propriétaire prend la parole.

- Je ne vous ai pas tout dit, hier !

La musique maléfique...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant