Chapitre 11

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 « Raphaëlla, je te présente mon chômeur de frère. Emilio. Emilio, Raphaëlla. Je t'ai déjà parlé d'elle, mais je pense pas que tu t'en souviennes. On a un exposé à faire pour la semaine prochaine, donc elle vient travailler à la maison. Elle restera aussi manger, pas vrai Raph ?

J'acquiesce, sans trop vraiment penser à la question qu'on vient de me poser. Je ne peux détacher mes yeux d'Elio. Ou plutôt d'Emilio. Sa beauté est différente, en plein jour. Je distingue de légères taches de rousseur sur son nez. Ses yeux reflètent une couleur miel, tandis que dans l'obscurité, je les percevais noirs comme l'encre. Puis je me rappelle que c'est un connard, qui m'a traitée comme une pute il y a à peine trois jours. Hors de question que je retombe sous son charme.

Il est tellement conscient de l'effet qu'il produit.

Il me dévisage d'abord pendant trois longues secondes. Ses sourcils se lèvent d'étonnement. Et sa bouche s'étire doucement en un sourire imperceptible. Puis, ses sourcils comme les deux coins de sa bouche s'affaissent. Il adopte maintenant une mine désintéressée, et retourne son attention sur l'écran de son téléphone, comme si rien n'était.

_ Mmh, ok. T'façon c'est à toi de faire la cuisine ce soir donc balec.' »

Nous rentrons rapidement dans la maison. Je dévie le sujet de conversation sur notre exposé, afin qu'Elio n'entende pas que je parlais justement de lui à sa sœur. Je suis maintenant installée sur la table à manger, et Sofia est montée dans sa chambre pour aller chercher son ordinateur. Je détaille autour de moi, fascinée par la décoration de la pièce. Tout a l'air si... cher.

Je savais déjà que Sofia Mendoza venait d'Amérique latine. Mais ses origines se font encore plus évidentes, quand on observe la décoration de sa maison : il y a une croix en bois au-dessus de la porte d'entrée, un portrait de la Vierge Marie dans le corridor, mais surtout un drapeau de la Colombie dans le jardin. Je l'aperçois à travers la grande baie vitrée qui s'élève en face de moi. Je ne l'avais pas remarqué la dernière fois. Il faut dire aussi que je ne m'étais pas trop occupée de ce qui m'entourait, plutôt intéressée par autre chose.

Mes yeux se posent sur la table d'extérieur et ses trois chaises en plastique, sous le chêne au fond du jardin. Des souvenirs me remontent en mémoire. Je n'arrive pas à me rendre compte de la réalité des événements. Cela doit évidemment être dû à la drogue que j'ai fumée. Mais je pense aussi que je n'arrive pas à croire que le garçon dix fois plus beau que moi que je viens de croiser, le grand frère de ma camarade de classe, est le même que celui sur qui j'étais à califourchon, complètement défoncée. Je sens encore ses doigts se balader le long de mon échine, et sa respiration saccadée contre mes lèvres.

« Je me rappelle de toi, maintenant, déclare une voix derrière moi.

Je ne prends pas la peine de me retourner. Je sais très bien qui me parle. Je saisis le verre de Coca-Cola que Sofia m'a servie à l'instant, en essayant de maîtriser mes tremblements.

_ T'es aussi la meuf qui a niqué mon carrelage.

Il s'assoit en face de moi, à l'autre bout de la table en bois sombre. Il me désigne la bouteille de soda et je lui fais glisser pour qu'il puisse la saisir. Il s'en sert un grand verre, puis plonge ses yeux dans les miens tout en le portant à ses lèvres.

Raphaëlla [TERMINE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant