Chapitre 16

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« Je suis désolée Mensah. C'est pas contre toi.

_ T'inquiète. C'est normal.

Quand Mensah a senti ma gêne, il a tout de suite arrêté. Mais il ne comprend pas pourquoi je ne veux pas aller plus loin.

_ Je veux pas te brusquer, mais on l'a déjà fait plein de fois toi et moi. Même si j'ai changé il faut pas que tu sois moins à l'aise qu'avant. Jamais je vais te juger ou quoi.

_ Oui mais t'es pas le seul à avoir changé, m'offusqué-je.

Une expression indéchiffrable apparaît sur son visage. Un mélange de surprise, de curiosité et de peine.

_ Ça a un rapport avec le gars d'hier soir ?

_ Le gars d'hier soir ?

_ Le mec qui était avec toi quand tu m'as appelé pour que je vienne t'ouvrir. Il était tapis dans l'ombre, mais je l'ai quand même vu.

J'étouffe un rire, à sa grande surprise.

_ Tu crois qu'il y a un bail entre Elio et moi ? T'as tort sur toute la ligne, c'est pas du tout par rapport à ça. C'est... C'est juste que je me bloque un peu quand on me touche ces derniers temps. »

Pour couper court à la conversation, je me lève et me réfugie dans la salle de bain. Quand j'en sors, Mensah s'affaire dans la cuisine à nous préparer un petit-déjeuner. Aucun d'entre nous n'ose parler. Nous mangeons donc en silence. Je me refuse de penser aux quelques minutes qui viennent de s'écouler. Je ne suis pas vraiment d'humeur à me faire des nœuds au cerveau.

« T'avais cours à quelle heure ? Finis-je par demander.

_ Huit heures trente.

Aïe. J'allume l'écran de mon téléphone en grimaçant : il est dix heures passées.

_ Moi ça va je commence à onze heure trente, mais toi t'es dans la merde.

_ Je dirai aux surveillants que je me suis pas levé à cause du décalage horaire, dit-il simplement en haussant les épaules. Ce qui est en partie vrai.

Il m'adresse un sourire en coin et je baisse le regard, un peu gênée. On sait tous les deux que quelque chose d'autre l'a mis en retard aujourd'hui.

_ Mais toi, il faut pas que tu traînes alors. », conclut-il en se levant.

***

Je n'ai pas pensé à parler à Mensah de Mélanie, ni de ses affaires louches. Peut-être parce que je devine déjà ce qu'il me conseillerait : « Reste éloignée de tout ça, ne te mets pas en danger bêtement ». Car il est le seul à m'avoir crue quand je lui ai dit que mon père était mort assassiné. Il a aussi compris comme moi que mon père était impliqué dans un réseau de dealers qui lui a coûté la vie. Ma mère ne l'a jamais accepté. Je pense qu'elle s'en veut de ne rien avoir pu faire pour l'en empêcher, d'avoir fermé les yeux toute sa vie. Et moi-même, je lui en voudrai toujours pour cela.

Alors si je peux encore sauver Mélanie, je le ferai.

Le problème, c'est que j'ai l'impression d'être abandonnée dans cette lutte. Mais je ne veux pas non plus y impliquer du monde, par peur de les mettre également en danger. Il faut cependant que je trouve de l'aide quelque part. Au moins quelques renseignements.

Sofia me tire de mes pensées :

« Ça va ? Ta mère t'a pas trop engueulée hier soir ?

Je mets trente secondes à comprendre sa phrase. Puis je me rappelle du mensonge inutile que je lui ai fourni la dernière fois, en partant de sa maison comme une voleuse.

Raphaëlla [TERMINE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant