Cicatrices Lunaires

Chapitre 37

Nous rentrons dans les vestiaires. Aujourd'hui nous avons cours de sport. Je n'aime pas particulièrement ça. Je ne suis pas vraiment sportive et le sport au lycée est la dernière chose qui me motive. Ce n'est pas intéressant. Surtout lorsqu'on fait de la danse. D'ailleurs ce n'est même pas de la danse. Je ne sais pas pourquoi ils veulent nommer cette étrange discipline ainsi. Le but est uniquement de bouger de manière plus ou moins logique sur une musique.

Je sors mes affaires de sport de mon sac et retire mon t-shirt. Je me retourne pour attraper mon haut de sport. Mais l'exclamation d'une fille de ma classe m'interrompt dans mes mouvements.

— Thémis ? C'est un tatouage que t'as dans le dos ?

Je me tourne dans coup vers la fille qui m'a posé la question. Je n'ai pas fait assez attention, elle l'a vu. Depuis que je me suis faite tatouée j'ai réussi à le cacher lors de ces moments mais cette fois-ci j'ai fait n'importe quoi Personne n'était censé savoir qu'il existe. Mais je l'avais oublié. Je suis habituée à ce dessin sur ma peau, je l'ai entièrement intégré à mon corps. Un peu trop même. Je plaque par réflexe ma main dessus, si il me restait une chance de lui faire croire que non, maintenant c'est trop tard.

— Il est hyper joli !

— Depuis quand tu as un tatouage ?, s'exclame Sandra les yeux grands ouverts.

Je décolle ma main de mon omoplate. J'ai l'impression que si quelqu'un le voit il va immédiatement deviner qu'avec Alwin nous... sommes en couple ? Oui, c'est comme ça que ça nous définirait. J'ai peur que quelqu'un à la simple vue de Pégase sur mon omoplate devine que mon coeur bat un peu trop fort en la présence de ce garçon que personne n'accepte.

— Fais voir !

— C'est quoi ?

— Montre-nous !

Toutes les filles du vestiaire veulent le voir. Je me retourne laissant mon dos à la vue de tout le monde. Je ne me sens pas bien c'est bien plus oppressant d'être face à ces filles que d'être ainsi avec Alwin.

— Waouh ! Il est trop beau !

Les exclamations fusent, je jette un coup d'oeil en arrière et vois les regards émerveillés. Personne n'en a la signification.

— C'est quoi ?

— Pégase, la constellation.

— Pourquoi ? Y'a une signification ou c'est juste que tu trouvais ça joli ?

— Je connais presque toute la mythologie, donc les créatures comme Pégase et les constellations. Et j'aime bien cet animal.

Personne n'en saura la signification.

— C'est hyper stylé !

— Ça a fait mal ?

— Un peu.

— C'était long ?

— Tu l'as fait où ?

Une fois l'engouement autour de l'encre sur ma peau terminé, j'enfile un t-shirt et me retrouve seule avec Sandra.

— Tu me l'as même pas dit que tu t'étais fait ça ! Est-ce que ta mère est au courant ?

— Personne ne le sait, à part la tatoueuse. C'était pas censé se savoir.

Une seule personne le sait, mais si je dis le contraire Sandra me demandera qui est au courant. La je ne pourrais plus répondre. Elle commencera à se poser trop de questions.

— Thémis ? Tu comptais m'en parler ?

— Non, je voulais le garder pour moi.

— Comment ta mère va réagir ?

— Elle ne le saura pas. Mais si elle le découvre elle ne va pas non plus me hurler dessus.

Non elle ne va pas hurler. Mais je ressentirai sa colère, son non-consentement par rapport à ce que j'ai fait.

— T'es bizarre en ce moment, tu deviens distante, perdue dans tes pensées très souvent et maintenant un tatouage mystère. Tu l'as fait quand ?

— Il y a un mois.

— Oh mon Dieu. Qu'est ce qu'il se passe ? Pourquoi tu deviens... comme ça ?

— Comme quoi ? Je suis normale, je ne vois pas en quoi j'ai changé. J'ai juste fait un tatouage ça ne veut pas dire que je vais devenir punk, gothique ou je ne sais quoi. Tu n'as pas à t'en faire.

Je n'aime pas les questions qu'elle me pose. Si elle continue elle va découvrir tout ce qu'il se passe et je n'ai pas besoin de quelqu'un pour me faire la morale. Je sais ce que je fais, je contrôle ma vie.

— Si il y avait quelque chose qui n'allait pas ou qui changeait dans ta vie. Tu m'en parlerais ?

Je lui adresse un petit sourire et prend un air sûr.

— Bien sûr, je mens comme si c'était évident.

Sandra m'observe encore en silence.

— Ne t'inquiète pas pour moi. Rien ne change.

Elle hoche la tête et soupire. Rapidement, je trouve une idée pour changer de sujet.

— Comment ça avance avec Paul ?

Un sourire apparaît sur le visage de Sandra.

— Ça va hyper bien ! On se voit souvent, il flirte un peu avec moi parfois.

Je souris face à son enthousiasme. Mais j'entends cette petite voix résonner dans ma tête. Je culpabilise de lui mentir autant, j'ai l'impression de manipuler mon amie en changeant de sujet. Il va falloir que je lui dise. Il faut que je fasse ça au plus vite, je n'en peux plus.

Je vais devoir trouver une solution afin de mettre Sandra au courant. Elle voit que quelque chose est différent de mon côté. Il faut que je réfléchisse à la manière dont je peux lui annoncer. Ce sera difficile. Rien ne collera. Je vais devoir tout lui expliquer, me justifier. Et je sais qu'elle sera quand même triste que je lui ai caché ma vie, un aspect important d'autant plus.

Cela fait un sacré bout de temps que je lui cache mon amitié avec Alwin. Je lui mens sur ce que je fais. Tout d'abord, elle m'avait vivement conseillé de ne pas aller lui parler et j'ai fait l'inverse de ce qu'elle m'a dit. Puis en plus d'être devenue amie avec lui, je suis restée même en sachant qu'il pouvait être violent. J'ai pris un risque pour moi-même et Sandra m'en voudra pour ça. Enfin je me suis mise en couple avec Alwin.

— Tu l'aimes ?

Sandra s'arrête de bouger et perd son regard dans le vide.

— Je n'en sais rien. Je crois bien que oui.

Elle soupire avant de me regarder et continuer.

— En fait j'en suis presque sûre. J'essaye de lutter contre mes sentiments car je n'ai pas envie de découvrir qu'il ne s'intéresse pas à moi comme moi je m'intéresse à lui.

Je reste silencieuse et lui souris. Je ne peux rien répondre. Je ne suis pas censée connaître ça, les sentiments amoureux. Il va falloir attendre que je lui révèle tout. Ça devient vraiment urgent.