46. La Démission d'un Faucheur, Deuxième Partie

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13 juillet 1866

Il était environ trois heures du matin, un train à vapeur stationnait en gare de Londre. Devant le marchepied du wagon de tête, le conducteur conversait avec un jeune contrôleur.

«Assez perdu de temps, il est temps d'alimenter cette machine en charbon. Si je veux que le train soit prêt pour demain huit heures, faut pas que je traine à faire chauffer ce moteur. En tout cas, ce fut un plaisir de discuter avec toi, l'ami.

- Pareillement. Bon courage !

- Merci.»

Le mécanicien monta dans la locomotive d'acier vert, tandis que le jeune homme descendit du marchepied, s'en allant déambuler le long du quai.

La gare, à cette heure tardive, était déserte et plongée dans un silence oppressant. Les lampadaires, distants les uns des autres, projetaient leur lueur pâle sur les nombreux wagons de l' imposante machine de bois et de métal. Le « Flying Scotsman » n'était pas un train ordinaire, mais un véritable bijou technique, immense et luxueux, pouvant transporter plus de trois cents passagers de l'Angleterre à l'Écosse.

Il s'arrêta soudain. Une silhouette se dessinait à l'horizon, s'approchant des voies ferrées. Éclairé par la lumière d'un lampadaire, l'individu arborait un trench-coat noir et des bottes singulièrement hautes. Ses longs cheveux gris étaient maintenus par un ruban satiné. Il se hissa sur un marchepied, prêt à franchir la porte d'un wagon.

«Monsieur, vous n'avez pas le droit de monter maintenant ! Je vous ordonne de descendre immédiatement !»

Hélas, il était trop tard. L'homme s'était déjà engouffré dans le train. Le jeune contrôleur se précipita à sa suite, pénétrant à son tour dans le wagon. Il scruta l'intérieur de la cabine mais n'y trouva personne. Le vent souleva doucement les rideaux verts bouteille, révélant une fenêtre laissée ouverte.

Il referma la fenêtre et, en regardant à travers la vitre, constata que l'énigmatique personnage avait disparu. S'apprêtant à quitter le train, il heurta quelque chose du pied. Il se pencha, une expression d'horreur se dessina sur son visage. Sur le luxueux tapis qui recouvrait l'allée centrale gisait un crâne humain. Ses mâchoires étaient serrées autour d'un bâton de dynamite. Une lumière intense émanait désormais du squelette. Le wagon explosa, provoquant une terrible détonation. Le train entier bascula sur le côté, avant d'être secoué par une seconde explosion.

Une heure s'était écoulée depuis cette tragédie, et de nombreux curieux s'étaient rassemblés, alertés par les déflagrations.

Deux individus vêtus de noir se tenaient sur le toit de la gare. Le premier, répondant au nom de Ronald Knox, arborait une chevelure partiellement décolorée, évoquant une teinte de blond cuivré. Sa cravate était négligemment nouée, laissant les premiers boutons de sa chemise ouverts, une silhouette à la fois élégante et décontractée.

Le second, Donovan Myers, était plus petit, avec un visage rond et un nez légèrement retroussé. Sa coupe de cheveux auburn rappelait une coiffure au bol, et ses grands yeux brillants conféraient un air quelque peu candide à son visage. Son col était impeccablement ajusté, et il se tenait toujours avec une raideur presque obséquieuse.

Ils portaient tous les deux des mêmes sorte de lunettes aux verres ronds et à l'armature très fine. Les faucheurs n'avaient le droit de choisir une paire plus unique qu'une fois la totalité de leurs examens réussit. Ils étaient armés, pour la même raison, de deux armes tout à fait identiques, deux petites serpes rouillées qu'ils gardaient accrochés à leur ceinture.

Donovan feuilletait un livret noir, affichant une expression d'inquiétude manifeste. Ronald, quant à lui, passa son regard des débris du train à sa propre death list.

L' Âme Maudite (Terminée) SebastianxOCOù les histoires vivent. Découvrez maintenant