── Chapitre 42 : Jacob.

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- Wow, soupire Jesper une fois que j'ai fini de lui résumer la situation. C'est... intense, tout ça. 

- Tu l'as dit.

   Le problème, quand on a trop l'habitude de se reposer sur quelqu'un dès que ça ne va pas, c'est que quand ça ne va pas précisément à cause de cette personne, rien ne va. 

   Autrefois - d'accord, il y a deux jours -, je me serais tournée vers Willem. Mais Willem s'acharne à prouver par tous les moyens du monde qu'il n'est qu'un excellent menteur et que dans cette histoire, je suis définitivement la cruche de service. Alors quand Caspian a fini par dissoudre son dôme d'Ombre, je n'ai même pas cherché à discuter plus longtemps avec qui que ce soit et j'ai traversé tout le jardin jusqu'au Petit Palais.

   Ce n'est pas comme si je pouvais aller ailleurs, de toute façon. Dans mon dos, j'ai entendu Willem prononcer mon prénom - une seule fois -, mais ce qu'il avait à me dire ne devait pas être important au point de me courir après. Le Darkling aussi m'a appelé, mais j'ai là aussi continué mon chemin.

   Une fois au palais, j'ai essayé de me souvenir du chemin qui menait à ma chambre. Au moment où je montais la dernière marche de l'escalier, Jesper a failli me rentrer dedans - il avait une pile de vêtements dans les bras qu'il était plus ou moins en train de voler, et...

   Et bien je crois que ça se voyait sur mon visage que je n'allais pas trop bien.

   Sans hésiter plus longuement, Jesper a posé le tas de vêtements par terre et m'a dit de le suivre. J'ai obtempéré, parce qu'il a prononcé ces mots avec un sourire en coin et que Jesper Fahey peut se montrer très charmeur quand il le veut. Nous avons emprunté un escalier, puis un autre, jusqu'à arriver au dernier étage. De là, il nous a emmenés dans un interminable couloir - apparemment, ce n'était pas la première fois qu'il se promenait ici comme chez lui - et a ouvert une petite porte qui donnait sur une sorte de chambre de bonne tout au fond. 

   Au moment où je m'apprêtais à lui demander si on était ici pour faire le ménage, il m'a fait signe de le suivre sur un tout petit balcon que je n'avais pas vu sur la gauche. Jesper s'est assis sur le carrelage du balcon, de sorte à ce que ses jambes pendouillent entre les barreaux dans le vide. La vue donne sur les jardins ; le ciel est plongé dans un nuancier jaune et rose pâle en cette fin de journée.

   Je l'ai imité, puis j'ai passé au moins vingt minutes à tout lui raconter depuis le début. Mon arrivée ici avec Nina, Mathias et le général Zlatan ; tous les autres mensonges de Willem. Le fait que la vie n'a clairement plus trop de sens, maintenant.

- C'est Kaz qui va être content, marmonne Jesper en balançant ses pieds dans l'air. Il a toujours dit que Willem avait quelque chose de louche. Et on peut difficilement faire plus louche que d'être le demi-frère du Darkling. (Il secoue la tête.) J'arrive pas à y croire qu'il soit finalement pire que Kirigan - oui, Kirigan a créé le Fold, mais te manipuler comme il l'a fait, depuis que tu étais littéralement une gamine? 

- Depuis que j'étais un bébé, théoriquement. C'est lui qui m'a récupéré à Londres, pas Jan Van Eck comme il a voulu me le faire croire. 

- Dégoûtant. Ca me fait penser à la façon dont Jacob se comporte face à Renesmee, et pas dans le bon sens du terme - non pas qu'il y ait un bon sens du terme à la façon dont Jacob se comporte face à Renesmee, ajoute-t-il avec une mine remplie de dégoût.

   Malgré la situation, je ne peux m'empêcher d'hausser un sourcil.

- Tu connais Twilight?

- Bien sûr que je connais Twilight! s'indigne-t-il presque. Il fallait bien qu'on apprenne à connaître la culture de ton monde, et Twilight fait indéniablement partie des classiques. Mais... pour revenir à nous moutons, je n'ai toujours pas compris pourquoi Jacob numéro deux s'est donné tant de mal avec toi. Pourquoi est-ce qu'il s'est amusé à récupérer un nouveau-né à Londres pour le rapatrier à Ketterdam? S'il voulait simplement connaître les joies de la paternité, il y a des orphelinats pleins à craquer dans littéralement tout le pays.

Sankta ─ SHADOW AND BONEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant