Liverport

14 | Serial killer

Lino se réveilla aux alentours de dix heures. Il traîna au lit encore quelques minutes, vérifiant ses mails et écoutant les messages vocaux qu'on avait pu lui laisser pendant la nuit. Quand il eut réussi à rassembler assez de motivation pour se lever, il descendit se préparer un café, – avec trois sucres, – et grilla deux tartines aux pépites de chocolat avant de se poser sur la terrasse, devant sa piscine. La journée s'annonçait chaude, le thermomètre affichait déjà vingt-trois degrés.

Left passa la porte de la baie-vitrée.

— T'as reçu ça, dit-il en lui tendant une pochette cartonnée.

Lino remonta ses lunettes de soleil sur sa tête, bloquant ses cheveux en arrière.

C'était arrivé plus tôt que prévu.

Le dossier s'ouvrit sur la photo épinglée d'un jeune homme blond aux yeux bleu azur. Raphaël.

Left s'assit sur la chaise d'à côté.

— T'as commandé une enquête ?

Lino hocha la tête, déjà plongé dans sa lecture.

Raphaël Jack Loris Swarovski était né au Texas le 22 novembre 1995, il allait avoir vingt-quatre ans. Un mètre soixante-treize. Il avait d'abord vécu dans une famille d'accueil et en avait enchaîné trois différentes avant de finir dans un foyer pour jeunes l'année de ses quinze ans.

Lino leva un sourcil.

Une vie compliquée, pensa-t-il.

Il n'avait aucun diplôme et n'avait même pas terminé l'école. Aucune assurance, rien à son nom. Il aurait pu tout aussi bien ne pas exister. On avait perdu sa trace à ses dix-huit ans quand il était sorti du système. Il vivait dans la rue depuis.

Ses parents biologiques étaient morts peu de temps après sa naissance. Lawrence Swarovski et Alex Slaven.

Lino stoppa net sa lecture et releva les yeux.

— Alex Slaven, ça te parle ?

Left acquiesça d'un signe tête.

— Le tueur en série ?

Alex Slaven était responsable du meurtre de six jeunes femmes, – toutes blondes aux yeux bleus, – et avait été dénoncé par l'une de ses victimes : Lawrence Swarovski, une cheerleader de dix-huit ans. Elle avait rencontré Alex Slaven, de huit ans son aîné, et s'était entichée de lui. Les deux étaient musiciens : il jouait du piano et elle, de la flûte traversière. Ils avaient entretenu une relation durant plusieurs mois avant qu'elle ne tombe sur les vidéos de ses jeux sadiques.

Lawrence avait découvert sa grossesse lors du procès et avait sombré dans une grave dépression, s'enfermant dans le mutisme. Alex avait été condamné à 128 ans de prison sans possibilité de remise de peine. Lawrence avait ensuite été internée en hôpital psychiatrique. Selon les autorités, elle était inapte à s'occuper de Raphaël ; il lui avait été retiré quelques jours après sa naissance. Elle avait subi harcèlements et menaces de mort : on l'accusait d'avoir d'avoir attiré les autres filles et d'avoir participé aux meurtres. Dévastée, elle avait mis fin à ses jours.

Quant à Alex, un détenu lui avait brisé la nuque avec une barre de fer quelques semaines plus tard. Il avait déclaré que c'était Alex qui se l'était procuré et lui avait demandé de l'aider à se suicider, lui expliquant comment s'y prendre et où viser. Il s'y était repris à deux fois ; la première venant lui défoncer l'arrière du crâne, la deuxième venant lui briser les cervicales.

— Raphaël n'est pas au courant ? Demanda Left.

— Personne n'a jugé utile de lui dire apparemment.