24 | La chaleur des draps

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Agate enfila un pantalon imitation cuir très moulant et des bottes lui arrivant sous le genou.

— On doit leur dire quoi aux clients ? Demanda Aaron. Ils posent encore des questions... Je sais pas quoi leur dire, moi.

— S'ils veulent des réponses, qu'ils demandent directement à Louka, répondit Collin qui ne parlait encore que très rarement depuis le suicide d'Adam.

Agate sourit à Raphaël qui avait réussi à se tourner sur le côté sans trop éveiller les lacérations dans son dos. Il s'assura que les autres étaient sortis d'un coup d'œil circulaire avant de poser la question qui lui tournait dans la tête depuis sa rencontre avec l'homme au chapeau.

— Dis, je me demandais... Pourquoi t'as choisi « Agate » comme pseudonyme ?

Le jeune homme sourit, les yeux baissés sur le parquet. Quand il regarda à nouveau Raphaël, un air plus sérieux s'était peint sur ses traits. Il avait perdu cet aspect juvénile qu'il revêtait tous les jours comme une seconde peau.

— T'as déjà joué aux billes ?

Raphaël leva un sourcil.

— Quand j'étais enfant, j'aimais bien jouer aux billes. Elles ont des noms et plus ou moins de valeur pour faire des échanges... et à côté de ça, tu as les agates, des billes transparentes avec une sorte de vague de couleur à l'intérieur. C'était les billes du pauvre, plaisanta-t-il. Celles que personne ne voulait.

Raphaël hocha la tête en percevant le ton nostalgique de sa voix.

— Moi, je les aimais bien, conclut Agate.

Quand il quitta la chambre, Raphaël se rallongea sur le ventre et croisa les bras sous son menton.

— Ça va pas, mon amour ? Demanda Allan qui venait s'assurer qu'il n'avait besoin de rien, comme il le faisait depuis deux semaines.

— Tout va bien.


Le lendemain midi, pour se changer les idées, Louka avait invité Calista et Lino au restaurant. Ça faisait très longtemps qu'ils ne s'étaient pas vus à trois, loin du Soprano, juste pour le plaisir d'être ensemble.

Calista attrapa les clés.

— Je vais conduire.

Louka leva les yeux au ciel. Il s'installa côté passager et Lino se serra à l'arrière, sa tête touchant pratiquement le toit de la voiture de sport.

— On va où ? Demanda-t-elle par-dessus le bruit du moteur.

— Le Classique ? Proposa Lino.

Calista accéléra en voyant la ligne droite de la route déserte qui s'étalait devant elle.

— C'est une manie dans votre famille de griller les feux ?

Elle était aussi à l'aise que son frère derrière un volant et ses réflexes étaient intacts. Elle aimait la vitesse et les brusques ralentissements qui diffusaient l'adrénaline à travers ses veines. En quelques minutes, ils arrivèrent sur la digue où les restaurants faisaient face à l'océan. Elle repéra une place en sens inverse.

— Là, lui désigna Louka.

— Trop tard, quelqu'un va s'y mettre, constata Lino.

Calista enfonça l'accélérateur et prit de la vitesse. Elle donna un coup de volant et tira le frein à main. La voiture dérapa tout en pivotant sur elle-même dans un crissement de pneus. Calista appuya sur la pédale de frein et elle s'immobilisa dans la place, entre les deux autres voitures, juste devant le restaurant.

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