19 | Astrid

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Il était presque dix heures quand Lino franchit la porte du Soprano. Il n'accorda aucun regard aux pensionnaires réunis sur les banquettes et monta les marches trois-à-trois jusqu'au bureau dans lequel il entra sans prévenir. La porte resta entrebâillée.

Raphaël, assis sur la scène, se figea.

Trois jours s'étaient écoulés depuis cette soirée dans la cuisine. Trois jours qu'il anticipait le moment où il reviendrait pour dire à Louka ce qu'il lui avait fait. En le voyant enfiler les escaliers, l'anxiété s'était réveillée et diffusée dans tout son corps. Plusieurs minutes s'écoulèrent avant que Lino ne réapparaisse. Il descendit les marches aussi rapidement qu'il les avait montées et quitta le Soprano.

Louka resta dans le bureau.

Le silence persista.

À l'ouverture, les garçons eurent tous cette drôle d'impression que quelque-chose clochait. Dans le dortoir, Agate leur fit signe de se taire. Ils entendaient bien la musique de fond habituelle, mais au-dessus, ils pouvaient percevoir le bruit de plusieurs conversations. Beaucoup de conversations.

— C'est quoi encore, ce bordel ? Lâcha Dorian.

Il termina d'enfiler sa chemise et s'approcha de la porte qu'il ouvrit en grand. Le brouhaha s'invita dans la chambre et ses yeux s'écarquillèrent.

— Mais putain, ils sont combien ? Demanda-t-il soudainement inquiet.

Quand ils descendirent jusqu'à l'escalier principal, ils purent en effet constater que la salle était bondée. Ce n'était pas la clientèle habituelle. Hommes comme femmes, tous portaient de belles tenues.

— On est devenu un bar à cocktails ? Dit Allan en se penchant par-dessus la rambarde.

Raphaël étudia la foule et un petit groupe de femmes attira son attention.

Calista traversa le couloir en furie et entra dans le bureau. Louka releva les yeux de son écran de surveillance.

— Doucement avec la porte, dit-il.

Elle frappa du plat de la main devant lui.

— Tu es sérieux ?! Cria-t-elle.

Il soupira.

— J'ai invité quelqu'un qui s'est empressé d'en faire un événement... Je ne pensais pas que ça prendrait cette tournure.

Il resta si évasif que ça éveilla la suspicion de Calista.

— C'est-à-dire ? Tu as invité qui ?

Calista sortit du bureau en claquant la porte derrière elle. Louka la rouvrit, vérifia qu'elle n'était pas dégondée et attrapa sa sœur par le poignet.

— Attends, dit-il.

Elle vit le groupe de femmes en petites robes près du bar et son sang ne fit qu'un tour.

— Astrid ! Tu as invité Astrid ?!

Louka la lâcha et fit un pas en arrière.

— Je ne savais pas qu'elle rametterait toute la ville.

Ce n'était pas ça, le réel problème ici. Calista se fichait bien que toute la ville soit dans son salon. Ce qu'elle ne voulait pas en revanche, c'était qu'Astrid y soit.

Calista lui lança un regard plein de haine et se dirigea vers les garçons, toujours figés en haut des marches.

— Vous attendez qu'on vous y invite ou quoi ?

— Cali, l'interpella Dorian. C'est quoi tout ça ?

— Une mauvaise idée. Allez, dépêchez-vous.

Elle était en train de descendre quand elle se tourna à nouveau vers eux.

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