27 | L'Apocalypse Touch

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— Ça aurait pu être pire, genre trois jours à la cave, plaisanta Agate.

Raphaël grimaça à l'évocation de ce souvenir.

— J'y ai passé quelques jours aussi, par le passé.

— Toi ?

Raphaël aurait dû cesser d'être surpris, mais il n'arrivait pas à se défaire de l'idée qu'il s'était fait de lui. Agate rit. C'était le bon vieux temps.

— Écoute, je comprendrais que tu ne veuilles pas me répondre, mais... putain, qu'est-ce que tu fous là ?

Agate prit un air sérieux. Il le regarda droit dans les yeux et son ton se fit formel.

— C'était il y a longtemps, un jour pluvieux et glacial...

Raphaël lui frappa l'épaule en saisissant qu'il le menait en bateau. Agate émit un nouveau rire clair de sa voix modulée vers le haut, mais cette fois il fut de courte durée.

— J'ai fui une vie qui allait se montrer impitoyable avec moi. L'ironie m'a envoyé ici.

Raphaël inclina la tête, les yeux plus ronds. Agate était vraiment imprévisible. Cette soudaine sincérité mit cependant en lumière la confiance qu'il lui portait et il la réaffirma par un regard entendu.

— Ta vie aurait été pire ?

Le sourire s'effaça de son visage et il reprit un air concentré, cette fois authentique. Ses yeux se promenèrent sur les poutres en bois du balcon, d'où ils avaient vue sur le salon désert, avant de se reposer sur un Raphaël attentif.

— Je pense qu'elle aurait surtout été plus courte.

Raphaël hocha lentement la tête, s'attendant à ce qu'il lui en dise plus.

— En fait, je suis le nouveau Prophète.

— Allez, va te faire foutre, lança Raphaël en le repoussant de la main tout en souriant.

Agate retrouva aussi le visage enjoué qu'il arborait tous les jours. Raphaël le dépassa de quelques pas avant de se retourner à nouveau. Son ami leva les yeux au plafond et souffla.

— Tu lâches jamais ?

Le sourire de Raphaël s'élargit. Agate secoua la tête de droite à gauche et posa son index sur sa bouche.


Le matin, Louka reçut un message inattendu. Il leva un sourcil en examinant l'écran de son téléphone. L'expéditeur était Rémi Levinim, l'actuel propriétaire de l'Apocalypse Touch.

Il n'existait sur Liverport que trois maisons closes : le Soprano, au nord de l'île ; le Collapsar, sur la seconde île et l'Apocalypse Touch, plus au sud.

L'Apocalypse Touch et le Collapsar étaient respectivement les bordels masculin et féminin de Liverport avant l'implantation du Soprano. Depuis, l'AT s'était diversifié et sa composition avait évolué pour devenir mixte. Il avait aussi changé de propriétaire. C'est l'un des anciens pensionnaires qui avait récupéré les lieux avec l'aide de Marco Lehum.

« J'ai appris que Calista et toi organisez régulièrement des concerts. Que dirais-tu d'une petite collaboration ? On fait moitié-moitié. J'ai aussi appris pour vos finances... »

Louka réfléchit. Il avait envie de répondre qu'ils n'avaient en aucun cas besoin de la charité. En même temps, ce n'était pas la réalité. Une association pour une soirée pourrait être bénéfique et pas seulement financièrement. Ils avaient besoin de redorer leur réputation. Il leva les yeux au plafond.

Calista partagea son avis, ils avaient besoin de ce genre d'événement. Ils acceptèrent la proposition de Rémi. L'Apocalypse Touch ayant plus de surface, il fut établi que le concert aurait lieu là-bas.

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