Liverport

38 | Traqué

Lino passa une main tremblante dans ses cheveux, essayant de chasser les images perturbantes de son esprit. Il marchait depuis une dizaine de minutes et commençait à peine à remettre de l'ordre dans le flot de ses pensées. L'adrénaline l'avait anesthésié jusqu'ici, mais son corps commençait à se rappeler à lui. Les sensations se réveillaient et le bourdonnement dans ses oreilles se dissipa.

Contre sa poitrine, son portable vibra une nouvelle fois. Lino sentit son cœur s'accélérer et une vague d'appréhension s'empara de lui. Il s'arrêta au milieu du trottoir, fixant l'écran lumineux de son téléphone. La tentation de l'ignorer était forte ; de se perdre dans le tumulte de ses émotions sans avoir à les partager. Un sentiment de culpabilité s'empara de lui. Il devait trouver une excuse plausible, quelque chose qui apaiserait l'inquiétude de Left sans le mettre en danger.

Left avait toujours été là pour lui, depuis son plus jeune âge, le protégeant et lui offrant un soutien inconditionnel.

Le cœur de Lino se serra en pensant à la perte de son père, qui les avait détruits tous les deux. Ils avaient traversé cette période sombre de deuil et de chagrin ensemble. Lino pouvait sentir l'inquiétude grandissante de Left face aux récents événements qui semblaient le rapprocher d'un destin similaire.

Il savait que Left ne montrait pas facilement ses émotions, préférant souvent garder une certaine retenue. Il pouvait cependant lire entre les lignes, ressentir l'anxiété qui se cachait derrière ses paroles. Left ne voulait pas perdre un autre être cher, il ne voulait pas revivre cette douleur insoutenable.

Lino savait que le temps viendrait où il devrait tout lui expliquer, partager ses craintes, ses souffrances et ses secrets, mais pour l'instant, il devait trouver un moyen de mettre un terme à cette spirale de danger, de reprendre le contrôle de sa vie et de protéger ceux qu'il aimait.

Finalement, Lino inspira profondément et décrocha le téléphone. La voix de Left résonna bien de l'autre côté de la ligne.

— Désolé, j'avais oublié de rentrer ton numéro dans mon répertoire, annonça aussitôt Lino.

— Tu aurais pu m'attendre devant le restaurant. Ça fait une heure que je t'appelle.

­— Excuse-moi, j'ai eu...

— Ça s'est mal passé ?

— Non, non, c'est bon. Tout est bon. C'est juste moi qui ai eu... J'avais envie de me promener. Seul. Tu vois ?

Évidemment, Left ne buvait pas ses paroles. Il eut un silence au bout du fil dont la lourdeur écrasa la gorge de Lino.

— D'accord, finit par répondre Left. Je viens te chercher. T'es où ?

Lino regarda autour de lui, essayant de trouver un point de repère pour indiquer sa position. Il lui décrivit un petit café en bord de rue. Il indiqua l'endroit à Left et raccrocha, le cœur lourd.

L'attente fut pénible, chaque seconde semblait s'étirer dans le temps. Il sentait l'anxiété grandir en lui, sachant qu'il allait devoir maintenir la façade qu'il avait érigée.

Enfin, la voiture de Left apparut à l'horizon. Lino inspira profondément et se força à sourire quand il grimpa à l'intérieur du véhicule.

— Qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi es-tu parti comme ça ? Demanda Left, ses yeux reflétant à la fois le soulagement et l'inquiétude.

Lino regarda ailleurs, essayant de dissimuler ses émotions.

— Je suis désolé. J'avais besoin de prendre l'air, de réfléchir. Je ne voulais pas t'inquiéter. C'est juste que... Les journées sont chargées et je suis un peu débordé.