65/ Incompréhension

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Jane se laisse entraîner sans un mot sur la piste de danse. Le Comte affiche un air étrange. Pas contrarié, mais pas non plus ravi. Il semble réaliser un effort en l'invitant. Ce qui étonne d'abord Jane. Puis, elle en conclut que sa nouvelle situation le dérange. Très bien. Alors, il va falloir trancher dans le vif. Et au plus tôt.

— Vous ne dites rien, my lord ? demande Jane avec un brin de moquerie en réalisant ses premiers pas de danse.

— Que pourrais-je dire qui n'a pas déjà été murmuré sur votre passage ce soir ? Avez-vous besoin de plus de compliments pour vous sentir à votre aise ?

— Ah. Et bien dansons en silence. Donnons l'image d'un couple qui s'ennuie.

Marcus la regarde prendre un air froid, inaccessible. Elle est entre ses bras et pourtant, il a l'impression qu'elle est à mille lieux.

— Votre nouveau statut vous aurait-il rendue sotte ! s'exclame-t-il.

— Pardon ? Je vous prierai de me parler sur un autre ton, voulez-vous ! Je ne suis plus la petite blanchisseuse que vous accusiez à tort de vol.

— Non. En effet. Mais le titre que vous exhibez ne vous empêche pas d'être sotte.

— Je n'exhibe rien et je ne suis pas sotte.

— Vous vous pavanez comme une volaille qui aurait pondu un œuf plus gros que la moyenne. Et c'est ridicule.

— Je vois... Très bien, Lord Carver-Hill. Pourquoi dansons-nous déjà ? Ah oui, parce que VOUS êtes venu me demander une danse. Cela faisait partie de vos obligations, je suppose. En attendant la fin de cette interminable valse, imaginez-vous dans les bras de... Tiens, dans les bras de cette ravissante blonde aux yeux de biche. Elle vous mangerait tout cru si elle en avait l'opportunité. À moins que ce ne soit sa mère... Quel sourire ! De quoi décrocher la lune, à coup sûr. Une ravissante future épouse... Tout à fait dans vos cordes. À moins que vous ne fassiez que dans la blanchisseuse...

— Ça suffit, dit-il avec un ton rogue en tentant de garder son calme.

— Oh, je vous embarrasse. Vous m'en voyez navrée.

— À quoi jouez-vous ?

— Je ne joue pas, Lord Carver-Hill. Je prends la place que l'on m'a donnée sans me demander mon avis. Place que vous saviez m'échoir, si je ne me trompe.

— Ah, c'est donc ça qui vous rend aussi désagréable ? Le fait que Lady Stratton m'ait parlé de ses projets ? Sachez que j'ignorais que cela irait aussi loin. J'imaginais qu'elle vous doterait.

— Et cela vous suffisait pour imaginer que je vous céderais en temps voulu. D'où votre insistance à faire de moi l'une de vos maîtresses.

— Mais pas du tout.

— Vraiment ?

— Que comptiez-vous faire de moi, alors ?

— Vous êtes insupportable, murmure-t-il alors que la danse s'achève.

— Pour vous servir, dit-elle simplement en faisant la révérence d'usage avant de le quitter.


Camilla et le Comte Grisham sont revenus très rapidement dans la salle de bal sous peine de ne pouvoir résister à leur attirance mutuelle. Légèrement échauffée, la jeune fille voit immédiatement que quelque chose ne va pas entre son frère et Jane.

— Fergusson ?

— Oui, mon impétueuse.

— Je crois que mon frère va avoir besoin de vous sous peu.

— Pardon ?

— Il y a un problème avec Jane. Nous devons aller à sa rescousse dans les plus brefs délais à moins de vouloir le voir exploser dans cette magnifique réception et ruiner toute possibilité de mariage pour aucune des filles de la famille Carver-Hill, et donc de moi.

— J'y vais.

— Je vous accompagne, voyons. À deux, nous serons plus forts.

Grisham donne le bras à son impétueuse et s'avance vers Carver-Hill qui lui-même s'avance vers Jane qui a rejoint Lady Stratton. Marcus à un air contrarié de mauvais augure.

Il n'en a pas fini avec Jane. Future marquise ou non.

L'éducation de Jane ShawOù les histoires vivent. Découvrez maintenant