86/ Un adieu

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— Je me demandais si je vous reverrai. Mon billet date d'il y a plusieurs jours déjà...

— Je suis là, répond simplement Jane.

Stevenson tire sans ménagement sur le col de la jeune femme pour la faire entrer. Une fois la porte fermée, il l'adosse à la porte et l'embrasse fougueusement.

Elle le laisse l'entraîner vers le salon plongé dans la pénombre. Elle voit à peine les registres et documents qui s'étalent sur la table.

— J'espérais que vous viendriez.

— Comment ?

— Vous n'êtes pas venue après l'enterrement. J'ai été déçu, mais j'ai compris. Si je suis à Londres alors que les routes sont impraticables, c'est que je vous espérais.

— Je... Stevenson ! Je ne vous aime pas ! s'écrit Jane en le repoussant.

Il éclate de rire et la renverse de nouveau sur la banquette où il l'a entraînée.

— Moi non plus, je ne vous aime pas, marquise, mais vous êtes une maîtresse tout à fait exceptionnelle. Les autres femmes sont bien fades en comparaison, murmure-t-il en écartant les pans de sa chemise pour la caresser.

Ce simple contact la fait gémir. Elle a faim de sa peau. De ses mains. De ses lèvres. De son membre déjà dur et érigé pour elle. Elle a faim de plaisir et de jouissance. Elle a faim de cette exultation du corps qu'il sait si bien lui donner.

Elle se fait audacieuse. Lui enlève ses vêtements tandis qu'il la déshabille. Ils sont bientôt entièrement nus comme lors de leur première étreinte.

— Vous êtes encore plus belle à la lueur du feu, Jane. Votre peau brille d'un éclat si intense, et vos yeux... Stevenson n'achève pas sa phrase.

Il la veut depuis trop longtemps. Il ouvre ses cuisses pour la pénétrer de ses doigts et voir son visage jouir, mais elle l'en empêche. Elle se redresse brusquement. Le repousse et s'empare de son sexe entre ses mains. Il la regarde en souriant. Il sait ce qu'elle va faire.

Lorsqu'elle le prend dans sa bouche, il soupire et gémit. Cette femme est d'une telle sensualité qu'il ne pourra jamais lui résister. Il sait pourtant que bientôt, elle ne sera plus à lui. Il le sent. Ce deuil est sa dernière chance de profiter d'elle. Ensuite, l'autre homme la lui ravira pour toujours.

Il se retient et l'oblige à arrêter. Il ne veut pas jouir seul. Il la retourne et s'empare de sa croupe qu'il admire un bref instant avant de la pénétrer lentement. Il veut l'attendre. Il caresse son intimité au rythme de ses coups de rein, et elle gémit de plus en plus. Il voit sa nuque transpirante. Sa main crispée sur le haut de la banquette. Il se rapproche de son dos et caresse aussi ses seins. Elle gémit de plus belle. Il sent qu'elle arrive à la limite, il accélère, et se perd dans son besoin de se libérer. Il prend. Il prend et donne. Lorsqu'il sent la jouissance le submerger, il sent qu'elle se contracte aussi violemment que lui. Elle crie avec lui. Et ce cri est comme un adieu.


Les amants se quittent sans un mot. La nuit s'achève en même temps que l'aventure. Si Stevenson l'a su dès le départ, Jane en prend conscience lorsque la porte se referme dans son dos. Cela la rend triste et un peu coupable d'abandonner un amant qui l'apprécie autant et dont elle retire elle-même autant de satisfaction. Mais il est temps.

Elle aime un autre homme. Il lui est pour le moment inaccessible, car elle attend de lui plus que ce que Stevenson a à offrir. Infiniment plus. Elle veut ce qu'Eugénia n'a pas eu la chance d'avoir : une véritable histoire d'amour affiché à la face du monde. Et lorsqu'ils s'appartiendront enfin, elle ne lui offrira pas seulement une partie d'elle. Elle lui offrira tout et elle prendra tout. Elle ne conçoit pas autrement ce qu'elle veut vivre avec lord Marcus Carver-Hill, Comte de Farmor.

L'éducation de Jane ShawOù les histoires vivent. Découvrez maintenant