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          ***Kathina***

J’entends le portail s’ouvrir. Je me demande bien qui celui-là laisse entrer, j’ai bien dit que je ne veux voir personne. J’entends des bruits de pas dans le couloir, jusqu’à la chambre. Je reconnais ces pas.

-je n’ai pas arrêté de t’appeler. Ça fait une semaine que ton téléphone ne passe pas.

-rentre chez toi Sylvain.

-qu’est-ce qu’il y a Kathy ? Ça fait une semaine que personne n’a de nouvelles de toi.

-qu’est-ce que tu veux ? Qu’est-ce que tu es venu faire ici ?

-je m’inquiétais pour toi.

-comme tu le vois, je vais bien. Merci d’être passé.

Je me recouche, la couverture au dessus de ma tête. Je le sens qui s’assoit sur le bord du lit, puis se couche. Il se colle à moi, me serre fort contre lui. Sa simple présence me fait du bien, pourtant il ne dit rien. Je profite de cette étreinte quelques minutes avant de revenir sur terre.

-merci d’être passé. Mais je préfère qu’on en reste là. Que tu ne m’appelles plus, ne cherche plus à me voir.

-Kathy s’il te plaît.

-non Sylvain. Justement non, ça ne me plaît pas. Tu as fait ton choix, je l’ai respecté quoi que douloureux. Maintenant assume tes décisions. Tu l’as choisie au détriment de moi. Tu l’as choisie.

-tu sais bien que non.

-alors quitte-la. Demande le divorce.

-ce n’est pas si facile. Donne-moi cinq ans, cinq années s’il te plaît.

Je retire sa main de mon ventre et m’assois sur le lit.

-les onze années données dans le passé c’étaient quoi ? Dans cinq ans j’aurai trente-huit ans, je devrais attendre les portes de la quarantaine pour devenir maman pour quelles raisons ? Je fais quoi pendant ce temps ?

-si tu veux un enfant, on s’y met de suite. Je te donne tous les spermatozoïdes qu’il te faut.

-il ne fallait pas me frapper au ventre, notre enfant aurait eu trois ans aujourd’hui.

-tu parles encore de ça ?

-oui. Tu m’as empêchée de vivre, me poursuivre dans toute la capitale pour me faire des scènes de jalousie, me porter main. Mais ensuite tu rentrais tranquillement retrouver ta femme et moi un lit glacé. Onze ans à vivre dans l’ombre, à raser les murs, ce n’est pas assez ? Ce n’est pas assez Sylvain. Cinq ans ? Tu crois que j’ai encore vingt ans ? J’ai cinq minutes à t’accorder, pas plus.

-le problème c’est que tu penses que c’est facile. Que ça ne dépend que de moi. C’est plus compliqué que ça je te jure.

-et je viens de tout simplifier. Maintenant pars.

Il s’allonge sur le dos, les mains sous la tête. Je sors donc du lit pour la cuisine où je me sers des tubercules de manioc bouillies que je mange avec du sel et de l’huile. Je suis trop énervée, j’ai trop de colère dans mon cœur. Actuellement je déteste la terre entière. La terre entière.

-je vais repasser quand tu te seras calmée.

-Sylvain si tu reviens ici, si tu viens encore m’emmerder, tu vas assumer ta polygamie. Rentre chez toi et oublie-moi. Baise ta femme et si vous avez une fille appelle-la Kathina.

Je sors de la cuisine avec mon assiette et monte dans ma chambre. Depuis mon retour je travaille de la maison, seul mon téléphone professionnel est ouvert. Je prends mon Mac et finalise la présentation que je dois faire demain. Si je n’avais pas déjà été payée, si je n’avais pas déjà fait attendre le client, j’aurai repoussé ou annulé.

KathinaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant