43.

1.8K 108 7
                                    

          ***Kathina***

L’avantage de travailler avec les mêmes équipes depuis des années : ils te connaissent. Ils connaissent tes goûts et les anticipent même. J’étais tellement occupée ailleurs que je n’ai pas pu être sur le chantier du spa régulièrement. Le bâtiment est terminé et livré ce jour même. Etonnement je n’ai rien à redire si ce n’est que je suis agréablement surprise.

Aujourd’hui c’est dimanche, les vendeuses du magasin me servent de cobayes. J’ai hâte de voir si le hammam et le sauna passent bien. En vrai le projet à long terme est d’en faire une centre de bien-être en ajoutant une salle de sport, danse, yoga, etc. et une piscine intérieure. Pour le moment on va juste se contenter du hammam, sauna, massages et tout ce qui se fait en institut. 

Certaines techniciens sont présents observant la moindre anomalie. Je suis stressée. Je n’ai pas encore annoncé de date d’ouverture, j’attendais d’être sûre que tout soit prêt.

-ayoooooo ! Je vais mourir oh !

On se précipite tous dans la deuxième salle du hammam.

-Virginie ? C’est comment ? je demande affolée.

-les choses des blancs Madame. La chaleur, l’humidité, je respire mal.

-mais sors !

-qui ? Que qui va encore m’offrir ça ? Non oh ! Je vais supporter.

Je ressors, d’autres problèmes plus importants à régler que MAROUNDOU. J’attends la fin des séances pour demander les avis, qu’est-ce qu’ils ont ressenti ? Je suis contente, le hammam et le sauna fonctionnement parfaitement bien. Maintenant place aux esthéticiennes pour les massages et autres soins.

-ayoooo ! Tat’ ooooh ! Ayi mbouk’ ooooh !

-Maroundou arrête ça !

-laisse maman. Na mourang’ ! Mourangou ooooh ah Nzembi ! (le goût mon Dieu). Donc le massage c’est comme ça ?

-mais Virginie gêne-toi quand même.

-pardon Madame Kathina. Ah je comprends pourquoi vous êtes tous les jours au spa. Ah ! Hum ! Eh ! Maman regarde la belle vie.

Il fallait tester tous les appareils, tout le matériel. Elles ont eu droit à la total.

-Virginie MAROUNDOU kokolo (pardon), reste ici.

-oh ! Moi aussi je veux l’épilation à la cire. Il paraît que ça dure, tu peux faire trois mois sans t’épiler.

-oui mais ça fait mal.

-Madame Kathina il ne faut pas suivre le corps la. J’ai poussé quatre enfants. C’est quelle douleur que je ne vais pas supporter.

          ***Dix minutes plus tard***

-oyiooooo ! MAROUNDOU qui t’avait envoyé dans les choses des autres ? Aïe ! Laisse ! Laisse ne fais plus.

Ses collègues sont gênés, ils espéraient que ça devienne une petite habitudes de leur offrir des dimanches au spa. Selon eux, le comportement de Virginie a tout gâché alors que nenni. J’avais juste besoin de cobayes.

A la fin de la journée ils rentrent tous et toutes satisfaits. Moi aussi j’ai pu tester mon matériel ainsi que les esthéticiennes. Je pense qu’il est temps d’annoncer la grande ouverture. Bien sûr après la petite mise au point avec le personnel, dame de ménage inclue.

-j’ai pu vous voir à l’œuvre, dans l’ensemble je suis satisfaite. Au prix auquel je vous paie, j’attends des prestations cinq étoiles.

-oui Madame.

-ton mari t’a quitté, ton chien est mort, tout ça tu laisses au portail et tu récupères quand tu pars. Ici on sourit. On est poli. Courtois. Le client est chiant mais chaque client est la Reine d’Angleterre. Si tu sens que ça monte, appelle une autre collègue gérer la situation.

-oui Madame.

-je ne veux pas voir cet endroit bondé de monde. L’heure du rendez-vous c’est l’heure du rendez-vous donc prenez toutes les dispositions. Le client doit attendre maximum trente minutes avec une coupe de champagne ou une canette de soda.

-oui Madame.

-je ne veux jamais voir la mèche ou la saleté au sol. La mèche se fait derrière et non ici, dès que la mèche ou les cheveux tombent on balaie. S’il y a une tâche on essuie immédiatement. De même que ce n’est pas au client de donner la mèche, je dis bien service cinq étoiles. Avant de faire ou dire quelque chose, demandez-vous si vous auriez fait ou dit cette chose à Beyoncé. Vous pouvez taper l’épaule de la première dame pour qu’elle vous donne la mèche ?

-non Madame.

-ici mes clientes sont des premières dames. Toujours nettoyer et désinfecter, vérifier que les serviettes et peignoirs soient blancs de chez blanc. La propriété corporelle ! Il y a une douche dans votre permanence, je ne veux pas humer d’odeurs. Aisselles, bouche ou intimité. Le citron est à cent francs l’unité dehors. Il vaudrait mieux pour vous qu’un collègue vous fasse le reproche qu’un client.

-oui Madame.

-et pour finir, la ponctualité. La structure ouvre à 8h ça veut qu’à 8h quand le client arrive il est directement pris en charge. Pas qu’à 8h on nettoie et branche encore les appareils. On est tous d’accord ?

-oui Madame.

-le WiFi ce n’est pas pour regarder les directs de la Black Queen qui ne raconte rien de bon, c’est pour aller sur le net regarder ce qui se fait actuellement dans le monde dans votre domaine. Quand le client viendra demander un modèle sorti de l’espace que vous ne soyez pas dépassées. Vous êtes les cobayes les unes des autres. Parfois la cliente arrive et ne sait pas ce qu’elle veut, vous pouvez les inspirer. Je suis une patronne très exigeante. Ce bâtiment ne s’est pas construit avec deux pièces de cinquante. J’ai investi plusieurs millions sur dix mois pour en arriver là, ce n’est pas pour jouer.

-oui Madame.

-c’est bon, vous pouvez y aller. On se revoit à l’ouverture, je vous notifie la date dans le groupe. Bonne soirée.

-merci Madame.

Je dois encore recevoir ma gamme de soins de la peau. Je n’étais pas satisfaite du premier échantillon envoyé par le laboratoire. En ce qui concerne les produits capillaires, c’est calé. Je veux inaugurer la fin du mois mais c’est tout une organisation.

Je sors mon calepin et note. Il me faut au moins deux influences et un chanteur. Les personnalités de ce pays ne sont pas chers, pour un soin du visage tu obtiens une pub. Des personnes qui touchent des centaines de milliers de personnes. Quand tu penses que leurs collègues occidentaux avec la même audience peuvent s’offrir des voitures voire des maisons. Ils ne s’y connaissent pas et c’est tant mieux pour nous.

Je continue ma liste de choses à faire puis je sors du spa, ferme tout et rentre. Il y a déjà un gardien à cause du matériel. Il prend son service à 21h, jusqu’à 7h le lendemain.

A la maison je prends une douche et commence l’organisation de ma cérémonie d’ouverture. Deux semaines ça me paraît court avec tout ce qu’il y a à faire.

On cogne à la porte et c’est le gardien qui m’informe que « mon ami » est là.

-quel ami ?

-celui qui a la voiture bleu.

-Yvon ? Fais-le entrer s’il te plaît.

Il ressort et j’entends le portail s’ouvrir. Je range mon bazar le temps qu’il s’emmène.

-bonsoir Mademoiselle AGNIAMATHI.

-bonsoir Monsieur ANDENO. Prenez place.

Il se laisse lourdement tomber sur le fauteuil.

-longue journée ?

-la vie d’entrepreneur n’est pas facile. Même après tant d’années. En décembre je te suis dans tes bagages.

-à qui le dis-tu ? Tu as déjà mangé ?

-je n’ai même pas faim. Juste envie de retrouver mon lit… enfin, un lit.

-pourquoi tu me regardes comme ça ?

-on offre à boire aux invités, pas à manger. Ça veut dire que j’ai eu une promotion.

-tu es bête oui. Et pourquoi tu es venu jusqu’ici alors que tu habites de l’autre côté de la ville ?

-j’étais dans les alentours. Et je voulais qu’on me chouchoute un peu. Le célibat m’amarre. C’est fort.

Je rigole en me levant pour la cuisine. Je réchauffe la nourriture et dresse la table. Si je peux profiter de sa présence quelque peu, effrayer la solitude. Pourquoi je vais me gêner ?

-viens manger.

Il se lève avec difficulté et me rejoint dans la salle à manger. Je le regarde mieux et peux voir les signes de la fatigue. Il touche à peine à son assiette, lui gros mangeur.

Après manger, je vais lui faire le lit dans l’ancienne chambre de mémé que j’ai vidée depuis. Il y a déjà des serviettes, j’ajoute une brosse à dents, du savon et un gant propre.

-je t’ai préparé la chambre d’amis. Tu as l’air trop fatigué pour conduire.

-merci.

Je lui montre sa chambre et il va directement se coucher. Moi je finalise ma cérémonie d’ouverture puis je monte aussi me coucher. Quand je serai encore plus riche, je mettrai un ascenseur dans cette maison.
.
Je me lève à 5h comme d’habitude mais toujours incapable de faire du sport. La motivation n’y est pas malgré les quelques kilos en trop. J’essaie pourtant, mais rien. A 6h je vais me doucher et m’habiller mais ce n’est qu’à 7h que je descends.

Yvon est déjà dans la cuisine à préparer le petit-déjeuner en peignoir.

-bonjour. J’ai lavé mon tee-shirt d’où la tenue. Assieds-toi. Tu veux des œufs ?

-brouillés oui, mais il y a quelqu’un pour le faire.

-je sais.

Pendant que moi je mange des œufs brouillés, bacon et saucisses, Monsieur a chargé un « un peu de tout » fait maison (spaghettis, viande, frite, etc.)

Tandis qu’il s’affaire aux fourneaux, je vais vérifier dans sa chambre si j’ai bien mis de la crème pour le corps. Je suis surprise de voir une chambre propre, un lit fait. On ne dirait même pas que quelqu’un y a dormi.

-tu as fait ta chambre ? je demande en le rejoignant à table.

-oui. Question d’habitude.

-un homme rangé qui sait faire la cuisine ? C’est quoi l’arnaque ?

-il n’y en a pas. Quand j’étais petit, mes deux parents ont été affectés en province. Ils n’ont pas voulu nous déplacer et faire changer d’école donc nous sommes restés à Libreville avec ma grand-mère. Avant moi il y a une fille et un garçon, après moi deux filles. Les tâches étaient réparties en cinq en fonction des âges. Il n’y avait pas de tâches pour femmes et des tâches pour hommes. Avant d’aller à l’école tu fais tes tâches, la seule chose qu’elle faisait c’est aller au marché et nous faire à manger. Sauf le dimanche où chacun passait en cuisine. Le plat en fonction de l’âge. Dès huit ans tu dois apprendre à faire le riz et les pâtes.

-ah bon ?

-on a été formés à la dure. Et quand je suis allé à l’étranger, j’ai béni ma grand-mère. Tu vois des garçons qui sont obligés de se ruiner en fast food car ils ne savent rien faire. D’autres toujours chez les autres pour manger ou alors on s’empresse de se mettre en couple avec n’importe qui pour pouvoir bien manger. Moi aucune ne pouvait me faire la bouche.

-les grands-mères sont vraiment les meilleures. Bon appétit et merci à ta mamie.

-merci.

Je prends une bouchée et c’est vraiment bon.

-tu vois que si tu acceptes de sortir avec moi tu seras gâtée ?

-c’est ça ? Pourquoi tu es célibataire au faite ? C’est Medy qui chasse tout le monde ?

-Medy c’est qui ? Médor ?

-tu ne trouves pas que c’est plus humain comme prénom ?

-tchouooh ! Kathina !

-réponds à ma question.

-non, ça n’a rien à voir avec lui. J’étais avec une fille au lycée, nous sommes sortis du pays ensemble avec une vision bien tracée, un avenir bien planifié. Deux médecins qui plus tard ouvriront leur structure. En cours de route j’ai changé d’avis. Elle n’était pas prête à prendre ce risque. Vivre dans l’incertitude, se demander si la fin du mois les affaires auront été assez bonnes pour payer les factures. On s’est séparé et je l’ai attendue environ trois ans. Jusqu’à ce qu’elle refasse sa vie.

Ensuite j’ai eu une autre relation. L’argent commençait à rentrer mais pas vraiment. Dans la tête de la fille, les bénéfices c’est pour aller faire ses ongles tous les mois, acheter des brésiliennes qui vont jusqu’aux fesses, etc. Quand tu dis non elle te pique de ces crises. Je commençais à régresser donc je l’ai valsée.

Puis ma dernière relation, on était juste incompatible. Que ce soit la vision de la vie, la mentalité, la façon de tenir une maison, etc. On a gagné en temps.

-trois relations seulement ?

-je parle de relations sérieuses pas de relations sexuelles.

-ok !

-je trouve dommage que tu t’obstines autant pour une raison qui pour moi n’a pas de sens.

-on parle de quoi ?

-de nous. Du couple qu’on pourrait former. Ou il y a autre chose ?

-ton ami Medy il est amoureux de toi ? Tu es bi ?

-pardon ?

-son comportement est étrange.

-c’est long à expliquer. Il veut me protéger.

-de quoi ? De qui ? Moi je vois un mec jaloux. Il va jusqu’à te suivre, faire ma planque devant ma maison pour te surveiller.

-je ne suis pas bisexuel. Je te parle de nous, je ne comprends pas ce que Médor vient chercher ici. J’ai été ton client, mais ce n’est plus le cas. Qu’est-ce qui t’empêche de me donner ma chance ?

-la réputation de mon entreprise.

-ce n’est pas une demande en mariage, on n’est pas obligé de chanter partout qu’on est un couple. Juste se donner une chance et voir ce que ça donne.

Quand l’homme veut de quelqu’un !  Collant. Mais bientôt pour qu’il réponde à mes messages ça sera compliqué, il n’aura plus le temps.

-tu sais quoi ? Aujourd’hui on prend notre journée. Je t’invite quelque part.

-tu es fou ? Je ne peux pas.

-tu pourras appeler et gérer à distance. Rien que pour cette journée, laisse-toi aller.

Le bruit dans mes oreilles, j’ai fini par céder. Avec juste un sac de voyage et mon passeport, mon ordinateur dans son sac je le suis vers l’inconnu. Il passe par chez lui prendre son passeport et un petit sac.

-mince on risque de rater le vol de midi.

-on va où ?

-tu verras bientôt.

Vu l’heure, on se rend à l’aéroport en taxi. Il est 10h et on va directement se faire enregistrer. C’est là que je prends connaissance de notre destination : Sao Tomé et Principe.

-tu es fou.

-parfois on a besoin de ces moments de folie pour garder notre lucidité.

En 1h seulement nous sommes sur l’Etat insulaire de deux cent mille habitants pour mille kilomètres carrés. Apparemment Monsieur connaît bien les lieux, une voiture nous attend pour nous conduire à la réserve dans laquelle nous allons passer la journée. On fait des activités d’eau, on mange très bien surtout. Mais pour visiter ça sera pour un autre jour. Le temps est court.

Nous sommes dans l’eau, à la plage privée de la réserve. C’est un lundi et il n’y a pas grand monde autour. Yvon pose ses paumes sur mes joues et plonge son regard dans le mien.

-tu vois qu’on peut aussi prendre une décision sur un coup de tête et ne pas le regretter ?

-j’avoue.

Subitement il se met à m’embrasser avec une telle douceur. Je me laisse aller. Peut-être parce que nous sommes loin et qu’ici personne ne me connaît, peut-être parce qu’il a su me mettre en confiance. Ou peut-être parce que j’ai simplement envie d’avoir un homme dans ma vie. Un homme que je n’aurai pas à partager, que je pourrais appeler à toute heure. Je ne supporte plus la solitude. Je ne sais pas comment font certaines femmes, moi je n’y arrive pas.

-arrête-moi Kathina.

Je m’éloigne de lui, le pousse et nage jusqu’à la rive. Il en fait de même et on a à peine de temps de faire un Safari avant de courir prendre notre avion.

-l’argent c’est bien. Deux cent trente mille pour les billets d’avion, juste pour quelques heures hors du pays. je le taquine.

-on souffre pour cet argent ou pas ? il rigole.

-merci.

On se tient la main et l’avion décolle. En taxi, on rentre chez moi qui suis plus proche. On a encore du sable de la plage car la douche a été rapide, il fallait arriver à temps à l’aéroport.

Yvon ferme la porte d’entrée et me plaque contre elle. Il m’embrasse a avec fougue et je réponds à ce baiser.

-arrête-moi Kathina.

Non. J’introduis ma main dans son short de plage à la recherche de son manche que je masturbe en l’embrassant.

-tu as des préservatifs ? je demande excitée.

-j’en ai.

Il me soulève et je croise mes pieds dans son dos et mes bras derrière son cou. Je pèse. Avant les hommes me soulevaient sans soucis. Petit voiture facile à garer. Yvon a un peu de mal. Dès demain on reprend le sport.

C’est avec de légères difficultés qu’on arrive dans la chambre du bas sans que nos lèvres ne se quittent.  Il me jette sur le lit, retire son short et pose le préservatif sur le lit.

-tout le malin la pour ça ? il me taquine en souriant.

Je ne peux pas répondre quand mes lèvres sont devenus un tableau sur lequel il dessine des ronds avec son gros pinceau.

-tu ne parles plus ? Je ne suis plus ton client ?

Je ris un peu honteuse.

-à cause d’un petit voyage de quelques heures à côté-là. Maintenant si je t’emmène en Australie ?

Fais chier ! Je me redresse et le renverse sur le lit. Je monte sur lui, en me frottant à lui.

-ta gueule !

KathinaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant