Chapitre 122 : Vide

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Deux jours plus tard, dans la matinée.

Embaumée dans une forte chaleur agréable, j'ouvre lentement les yeux en reprenant connaissance. Clignant des yeux à plusieurs reprises, je reconnais l'endroit comme une chambre de la base. Le bouclier appuyé au pied d'une commode et les photos posées sur les étagères me laissent croire que je suis dans la chambre de Steve. Ce qui signifie que ces gros bras qui m'entourent ne sont autres que les siens. Posant une main sur son avant-bras, je le repousse doucement pour ne pas le réveiller. Je descends du lit en faisant le moins de bruit possible, laissant le fils de l'Amérique avec un vide entre ses bras. Pour que la disparition de la chaleur ne le gêne pas, je mets un oreiller contre lui et remonte la couverture sur son corps. Il ne s'est même pas déshabillé en se couchant... et moi aussi, je suis encore vêtue de mon uniforme. Je n'ai aucune idée de comment j'ai pu finir endormie dans ses bras, mais j'imagine qu'il ne m'aurait pas laissée filer seule après ce qui est arrivé. Je me frotte le visage et m'éloigne de son lit pour trouver sa salle de bain. Il fait un peu plus frai ici... ce n'est pas désagréable. Je retire mon uniforme devenu inconfortable et allume l'eau du robinet. J'en glisse une bouffée sur mon visage, ce qui me réveille un peu plus. Pourtant...

Bien que réveillée et parfaitement consciente, je me sens... différente. Je me sens alourdie par une peine de cœur bien présente, bien que plus aucune douleur ne m'atteigne. Je... je ne ressens plus rien... plus rien du tout. A force d'hurler et de pleurer, peut-être que je me suis vidée de mes émotions. Il n'y a plus rien... plus rien du tout. Tout est parti. L'utilisation de mes sens me semble troublée ; je peux voir, je peux entendre... mais je ne peux plus sentir, ni goûter... ni toucher. Laissant mes mains sous l'eau qui coule encore, je ne ressens ni sa température, ni sa composition... rien. C'est comme si je portais des gants, bien que mes mains soient nues. Je peux bouger... je peux réfléchir... mais je me sens coincée. Je suis coincée... dans le néant.

Levant mon regard vers mon reflet, je l'observe un instant. Ce visage qui est le mien me semble étranger. Ces traits bien connus me semblent nouveaux, comme si je ne les avais jamais vus auparavant. Mais... c'est moi, j'en suis certaine. Je ne me sens pas bien. Mais je ne me sens pas mal non plus. Je ne sais pas ce que je ressens, à vrai dire. Cette sensation de lourd sur les épaules est désagréable, mais mes tremblements ont cessé. Quelque chose ne va pas. Je sais ce qui se passe... je sais ce que j'ai perdu... alors... pourquoi est-ce que je ne ressens plus rien... ? Pourquoi suis-je si vide... ? Pourquoi aucun son ne sort de ma bouche, aucune larme ne roule sur ma joue... ? Je me sens aussi anéantie que lorsque... Oh... Je me sens de la même façon que je me sentais le lendemain d'avoir perdu mon père. Le lendemain de son assassinat, que j'ai causé. C'est étrange... c'est cependant différent, car je suis parfaitement consciente de ce qui se passe, mais... mes sentiments sont les mêmes...

Mes sentiments sont les mêmes que lorsque je servais Hydra sous l'uniforme noir au logo rouge. Je suis aussi perturbée et incapable de ressentir des choses qu'au réveil d'un conditionnement. Pourquoi... ? C'est pourtant différent. Est-ce que c'est parce que c'est ce que je suis..., ce que je suis condamnée à être ? Oui, c'est le cas. Je suis condamnée à être un soldat. Un assassin. Un être sans âme. Sans émotions. Je ne peux pas être autre chose, je ne peux pas changer quoi que ce soit de mon destin. Je ne suis plus Logan. Je suis seulement un soldat, et rien d'autre. C'est tout ce que j'ai le droit d'être. Et cette apparence qui est la mienne ne me plaît pas du tout.

Fouillant dans les tiroirs de la salle de bain de Steve, entre autres choses compromettante je parviens à trouver des ciseaux et une tondeuse à cheveux. Je commence alors à couper mes longs cheveux qui tombaient alors en bas de mon dos, les raccourcissant de plus en plus. Je suis un soldat. Je n'ai pas le droit de ressembler à ça. Et à quoi bon être aussi mignonne, si Natasha ne peut plus me voir ainsi ? Je ne peux pas rester comme ça, ça ne me plaît pas du tout. Coupant et rasant le dessous de mes cheveux, je finis par réveiller Steve avec tout ce bruit. Je le vois entrer dans la salle de bain dans le reflet du miroir, perdu et les sourcils froncés.

« Logan... Qu'est-ce que tu es en train de faire... ? »

Je cesse ce que je faisais alors qu'il s'approche. Il soupire longuement et regarde mes cheveux sous toutes les coutures avant de ne me prendre la tondeuse des mains. Il s'applique pour m'aider à faire quelque chose de mieux, alors que je reste silencieuse. Lorsqu'il pense avoir terminé, il donne un coup de main sur mes épaules pour dégager les cheveux qui y étaient. J'arbore maintenant une coupe courte avec undercut, qui me rappelle vaguement celle d'un personnage de manga que j'ai commencé à lire il y a quelques années...

« Est-ce que ça te va, comme ça ? Demande-t-il. Ou est-ce que tu veux autre chose.

- Ça ira, répondis-je. »

Il sourit et repose la tondeuse. Il essuie mon visage du bout des pouces et me prend par les épaules.

« Tu devrais prendre une douche pour enlever ce qui reste sur toi. Je vais nettoyer le reste. »

Je m'attendais à ce qu'il me gronde. Steve ne fait que de me gronder, c'est dans sa nature de flic si on puit dire. Je hausse les épaules et retire mes sous-vêtements sans prendre garde au fait qu'il pourrait me voir, puis vais sous la douche. Je l'entends soupirer alors que j'allume l'eau sans faire attention à la température. Steve passe le balai juste à côté, alors que je lève le visage vers l'eau s'éclatant sur mon visage. Je l'ai perdue... j'ai tout perdu. Je n'ai plus rien... plus jamais je ne pourrais me sentir bien. Je ne peux plus être que ça... un soldat... un assassin... Et je trouverais bien des cibles à éliminer. Il y a toujours des cibles... partout dans le monde... je trouverais bien. Le monde est rempli de monstres... j'en trouverais bien quelques-uns à trancher avant de mourir. Mourir... non, c'est étrange... je n'ai pas envie de mourir... plus maintenant. Je me sens tellement bizarre... je ne comprends rien.

« Logan, tu devrais couper l'eau, suggère Steve. Tu es dessous depuis dix minutes... tu vas attraper froid. »

Je coupe l'eau et lui emprunte ses produits pour me laver. Je me rince une fois cela de fait, puis récupère une serviette qu'il m'a préparée pour m'enrouler dedans. J'enfile ensuite le teeshirt qu'il me prête et lui rends la serviette avant de partir silencieusement.

« Heu... Logan, attends... Où est-ce que tu comptes aller, habillée comme ça ?

- Je vais m'habiller. »

Je n'ai pas d'autres vêtements ici, à part des uniformes. Alors je porterais un uniforme. C'est ce que font les soldats. Me dirigeant vers la salle d'équipement, je fouille dans mon casier pour trouver l'uniforme que je préfère. Il s'agit d'un combinaison entièrement noire à col montant, mais sans manches. Il ressemble à mon premier uniforme, bien que l'autre ait un buste croisé et un col en V. Mais j'aime bien celui-ci... il est différent en restant proche de l'original, donc ça change un peu. Les gants qui vont avec cet uniforme sont des mitaines longeant les bras jusqu'en haut du coude, ajustées comme il le faut et incapables de glisser. Elles ne sont pas électrifiées. Je ne peux pas non plus ajouter de ceinture à cet uniforme pour y mettre mes couteaux de lancer, alors je m'équipe simplement de deux sabres dans le dos et de couteaux dans les bottes. Une fois habillée, je me tourne vers le miroir en regardant mon reflet. Il manque quelque chose... Je fouille dans un tiroir pour y trouver la touche finale de mon uniforme : mon masque. Recouvrant le bas de mon visage et ne laissant paraître que mes yeux, il me convient mieux. Pourquoi s'embêter de montrer mon identité à mes ennemis... ? Je suis un soldat, du simple bétail. Je n'ai pas besoin d'un nom... d'une identité... ça ne sert plus à rien. Je baisse cependant mon masque et l'accroche à mon poignet pour ne pas le porter à l'intérieur.

Ici, je n'ai pas d'ennemis. Que des amis. Et nous avons encore quelque chose à terminer, tous ensemble...

Ce après quoi je reprendrais la chasse.

LOGAN - MARVELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant